Le bras de fer entre la librairie musulmane IQRA et le préfet des Alpes-Maritimes en trois actes

La librairie niçoise IQRA contestait sa fermeture ordonnée par le préfet des Alpes-Maritimes. Saisie en référé-liberté, la justice administrative a exigé la réouverture du magasin. Le représentant de l'État a décidé de faire appel.

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C'est un dossier qui est loin d'être terminé. Au centre de la polémique, la librairie IQRA située non loin de la gare de Nice, rue Marceau. Elle vend des livres et des vêtements musulmans.

Le préfet des Alpes-Maritimes Hugues Moutouh parle de fondamentalisme islamiste et veut la fermeture du magasin, mais la justice administrative est passée par là et le magasin a rouvert ses portes. Une polémique sur fond de communiqués sur les réseaux sociaux !

Acte 1 : la librairie est fermée après un arrêté du préfet

Le 28 février dernier, un volet métallique descend sur la porte de la librairie. Hugues Moutouh, préfet des Alpes-Maritimes, a en effet pris un arrêté dans lequel il ordonne la fermeture de la boutique pour une durée de trois mois. Deux motifs principaux :

  • La présence d'ouvrages religieux fondamentalistes au sein de la librairie, dans lesquels "des propos (...) sont susceptibles de constituer les délits de provocation à la haine ou à la violence à l’égard d’un groupe de personnes à raison de leur orientation sexuelle". En clair, certains ouvrages contiendraient des appels au meurtre à l'encontre des homosexuels ou prôneraient la violence faite aux femmes.
  • Un défaut d'autorisation de la vidéoprotection relevé lors d'un contrôle inter-services du 23 octobre 2023 suivie d'une mise en demeure. Selon la préfecture, le dossier de régularisation est demeuré incomplet à l'issue du délai imposé par les services de l'État.

Sur X (anciennement Twitter), l'avocat de la librairie, maître Sefen Guez-Guez parle d'acharnement car il aurait demandé en vain au préfet de communiquer les livres en cause pour que la librairie les retire de la vente.

Le 3 mars, il dépose un référé-liberté pour contester l'arrêté.

Acte 2 : le tribunal administratif de Nice autorise sa réouverture

Le tribunal administratif de Nice rend son jugement : la librairie peut rouvrir immédiatement. Le juge estime que l'arrêté du préfet est disproportionné et excessif car il porte atteinte à la liberté d'entreprendre.

Pour le juge, le préfet n'aurait pas apporté la preuve que sur quatre ouvrages cités, il y aurait un trouble à l'ordre public. Il est aussi précisé que ces livres visés par l'administration sont en vente libre sur des plateformes ou dans d'autres librairies musulmanes. 

L'arrêté préfectoral est ainsi suspendu, la préfecture est condamnée à payer les frais de justice de la librairie, soit la somme de 15 000 euros.

Acte 3 : la préfecture fait appel de la décision

La riposte du préfet ne se fait pas attendre. Hugues Moutouh annonce qu'il fait appel du jugement du tribunal administratif.

Le préfet peut compter sur le soutien du maire (Horizons) de Nice et président de la Métropole, Christian Estrosi :

Après la suspension par le tribunal administratif de cet arrêté, je veux redire tout mon soutien à la décision du Préfet Hugues Moutouh de prononcer la fermeture administrative de cette librairie islamique IQRA que nous avions signalée à ses services. Face au séparatisme qui menace tous les pans de notre société, nous ne pouvons que soutenir toutes les initiatives qui limitent le communautarisme et le non respect des principes de notre démocratie.

Christian Estrosi sur le réseau social Threads

L'avocat de la librairie se dit pour sa part confiant dans la perspective d'un appel devant le Conseil d'État. 


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Sefen Guez Guez réagit à l'appel du préfet des Alpes-Maritimes suite au jugement du tribunal administratif. ©PIERRE-OLIVIER CASABIANCA ET YANNICK FOURNIGAULT

Hugues Moutouh a par ailleurs saisi le procureur de la République de Nice.

Une enquête préliminaire pour "provocation publique à la haine ou à la violence en raison de l’origine, l’ethnie, la nation, la race ou la religion" a depuis été ouverte par le parquet. La police judiciaire est chargée de l'enquête.

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