INFO FRANCE3. Selon nos informations, un témoignage décisif a été versé au dossier judicaire du crash de la Caravelle Ajaccio-Nice. Un tir de missile effectué par le Suffren, de la Marine nationale, serait à l’origine du drame au large du Cap d’Antibes.
Le 11 septembre 1968, 95 personnes ont trouvé la mort dans le crash du vol Air France 1611. Au départ d'Ajaccio, l'avion devait rejoindre Nice (Alpes-Maritimes), mais il s'est abîmé au-dessus de la Méditerranée. Ce sont 95 morts - dont 6 membres d'équipage - qui restent inexpliquées à ce jour.
Un témoignage décisif a été versé au dossier, selon les informations de France 3 Côte d'Azur. Celui-ci accrédite, une fois de plus, la thèse d'un missile ayant provoqué la chute de la Caravelle.
Une juge d'instruction du parquet de Nice a accepté ce témoignage, le procès-verbal de l'audition étant enregistré désormais dans le dossier. Les familles des victimes ont été reçues par la justice il y a quelques jours. Elle leur a communiqué l'intérêt particulier qu'elle porte à l'hypothèse du tir accidentel et fatal pour la Caravelle.
Au printemps 2022, c'est le travail de nos confrères de France 2 qui avait jeté l'opprobre sur la Marine nationale. Et d'éclairer, témoignage à l'appui, le rôle de la frégate lance-missiles Suffren.
Mise à flot le15 mai 1965, elle a été admise au service actif le 20 juillet 1968, soit quelques semaines avant le crash de la Caravelle. La Marine a d'abord affirmé que le navire était à quai, mais pour cet ancien membre d'équipage, cette version est erronée.
Des essais de missiles confirmés
Des tirs de missiles étaient bien prévus ce jour-là. Dans le journal local, le Provençal, la préfecture avait averti la population de dangers potentiels pour les dates du mardi 10, mercredi 11 et jeudi 12 septembre, pour une fenêtre de tir de plusieurs heures.
Un récit que confirme un ancien matelot à bord du Suffren. Jean-François de Poilloué de Saint-Perier a déjà parlé aux gendarmes et, au printemps dernier, à nos confrères de France 2. C'est son témoignage qui est intégré à l'instruction, alors que la Marine s'est entêtée pendant plus d'un demi-siècle d'avancer qu'aucun exercice n'avait eu lieu à cette époque.
"On était parti en exercice, et nous avons tiré un missile MASURCA", a t-il affirmé ce vendredi 21 octobre au cours d'un entretien accordé à France 3 Côte d'Azur.
Ce système, pour MArine SUpersonique Ruelle Contre-Avions, est entré en service en 1968. Il pèse environ deux tonnes.
Tir fatal ?
Après le tir, c'est un souvenir toujours vivace qui refait surface pour cet ancien matelot du Suffren. "On rompt le poste de combat, on reprend nos activités normales et, dix minutes après, à peu près, on a une annonce faite par le commandant qui nous dit qu'il y a eu un crash d'avion et que l'on doit se dépêcher sur place", se rappelle celui qui évoluait ce 11 septembre 1968 à bord du navire de surface.
Le missile aurait-il pris la Caravelle pour cible ? C'est en tout cas le sentiment immédiat de l'équipage : "En rentrant à nos postes, on croisait des regards, on se disait 'tiens il s'est passé un truc, on a peut-être fauté'. On se doutait qu'il y avait peut-être une cause à effet."
En arrivant sur les lieux du crash, "on a vu qu'il y avait des bateaux qui tournaient, aussi bien des bateaux civils que des bateaux militaires puisqu'on était plusieurs en opération, mais il n'y avait plus rien à voir. Tout ce qui a pu être ramassé a été ramassé. Les survivants, il n'y en avait pas."
Témoignages concordants
À terre, Étienne Bonnet était, le matin du drame, sur le littoral azuréen. Il a vu "une lueur bleue, de derrière la caravelle, qui est venue la frapper derrière le réacteur, côté gauche. Après cela, une énorme explosion a coupé la caravelle en deux." Il n’avait jamais été entendu par la justice lorsqu'il a témoigné en 2011 devant les caméras de France 3.
Emmanuel Macron a demandé la levée du secret-défense, en septembre 2019, concernant le crash de cette Caravelle. Une étape attendue par les familles de victimes qui demandent simplement de connaître l'histoire qui se cache derrière les dernières minutes du vol Air France 1611.
Il y a des années, l’enquête avait débouché sur un non-lieu, concluant à un incendie à bord lié au chauffe-eau. La reconnaissance de leurs souffrances et de leur deuil est toujours au centre des attentes de ces Azuréens.