Entre adulation et mépris, gloire et déchéance, la danse orientale au fil des siècles a toujours eu du mal à trouver sa place. Depuis les années 90, elle connaît partout dans le monde un engouement grandissant grâce à ses nombreux bienfaits physiques et psychologiques. Malgré son succès international, la discipline continue de se heurter à de nombreux préjugés bien ancrés dans l'imaginaire collectif.
Aujourd’hui, des milliers de femmes de tout âge, d’enfants et d'hommes aux quatre coins du monde pratiquent la danse orientale. Les professionnels viennent enseigner et se produire lors de festivals internationaux organisés sur tous les continents.
Les raisons du succès de cette discipline sont multiples. Il n'existe pas de contre-indications spécifiques à sa pratique qui procure de nombreux bienfaits pour le corps et l’esprit. Tout d’abord, c’est une danse accessible, quel que soit l’âge, le niveau en danse et la morphologie.
- Travail du corps et de la mémoire
La pratique de la danse orientale permet de tonifier son corps, de sculpter sa silhouette et de développer ses abdominaux. Le dos et les articulations sont assouplis, l’équilibre est amélioré. Elle génère essentiellement trois types de mouvement :
- les rotations,
- les ondulations
- les vibrations.
Les mouvements vibratoires favorisent le bon fonctionnement du système cardiovasculaire.
Outre l'effort de mémorisation nécessaire à l'apprentissage d'une chorégraphie, la pratique de la danse orientale exerce la capacité de concentration. Elle repose sur un travail important de coordination et d’isolation des mouvements.
Pour les femmes, sa pratique régulière permet de muscler le périnée et de faciliter l'accouchement.
- Bien être et estime de soi
En 2014, des chercheurs de l’Université australienne de Flinders ont réalisé une enquête sur la perception qu’avaient les danseuses orientales de leur image corporelle. Le docteur Marika Tiggermann, auteure principale de cette étude, s'est basée sur les résultats de recherches antérieures. Ceux-ci avaient conclu que les danseuses exerçant d’autres disciplines - comme le Modern'Jazz par exemple - auraient davantage confiance en elles.
En tout, 213 jeunes femmes ont participé à cette enquête. Parmi elles, 112 femmes pratiquaient la danse orientale, le reste étant composé d'étudiantes inexpérimentées. Il est apparu que les danseuses du ventre avaient une perception plus positive de leurs corps tout en étant moins focalisées sur leur apparence. Ainsi, les danseuses orientales danseraient d'abord pour le bien-être procuré, ensuite pour l’entourage.
Aussi, la pratique de la danse "du ventre" favoriserait le bien-être chez les femmes et augmenterait la confiance en soi.
La danse du ventre est associée à une image de soi positive parce que celles qui la pratiquent se focalisent moins sur leur apparence physique que sur l'expérience elle-même. Ces femmes se concentrent davantage sur ce qu'elles sont capables de faire avec leurs corps
Marika Tiggermann, chercheure australienne
Discipline technique et performante
Ces dernières décennies, la danse orientale est devenue remarquablement technique et performante. Les différentes fusions orientales ont indéniablement enrichi et fait évoluer la discipline en lui donnant un second souffle.
En France, elle se hisse sur la 3e marche du podium des danses du monde pratiquées dans l’Hexagone.
L’ampleur du phénomène est tel que l’on compte maintenant plus d’adeptes, de professionnels et de concours internationaux en dehors du Proche et du Moyen Orient. Du Japon à l’Argentine, en passant par la Russie et l’Afrique du Sud.
Par ailleurs, dans les festivals de danses où l’esprit de compétition bat son plein, on assiste à une véritable course à la performance.
Peu de place est laissée à l’émotion et à l’improvisation qui font pourtant l’essence même de la danse égyptienne originelle. A l’origine spontanée et intuitive, elle devient de plus en plus acrobatique et davantage basée sur des prouesses techniques que sur l’expression libre.
Prestation de la danseuse russe Oxana Bazaeva en 2019 au Portugal :
Préjugés et manque de visibilité
Or, toujours victime de solides clichés historiques, le travail considérable des artistes et des organisateurs évènementiels n’est ni considéré, ni apprécié à sa juste valeur.
Considéré comme un art de "second rang", faute de soutien et d’intérêt de la part de certains acteurs culturels et des institutionnels, les artistes et les organisateurs se voient contraints de s’auto financer pour pouvoir se produire. Ces derniers ne rentrent pas toujours dans leur frais. Certains subissent parfois des pertes financières.
Dans l’imaginaire collectif, en raison de stéréotypes historiques, la danse orientale reste considérée comme un simple divertissement et assimilée à du strip-tease voire à de la prostitution.
Afin de sensibiliser les acteurs culturels et l’opinion publique à cette problématique, de nombreux professeurs, danseurs professionnels, amateurs ou simples passionnés ont poussé un cri d’alarme.
Pour la reconnaissance et la visibilité
Puissante et gracieuse Majesté, je ne connais pas la réponse à votre question. La seule chose que je sais est ceci : l’âme du philosophe réside dans sa tête, l’âme du poète se trouve dans son cœur ; l’âme du chanteur demeure autour de sa gorge, mais l’âme de la danseuse vit dans son corps tout entier.
Khalil GibranExtrait du Poème "La Danseuse"
Symbolique, héritée de rituels ancestraux en hommage à la fertilité et à la maternité, c’est aujourd’hui une danse exprimant les émotions, les sentiments amoureux comme les choses simples de la vie quotidienne. Or, malgré son succès international et ses vertus incontestables, la danse orientale est une discipline artistique et sportive qui souffre toujours aujourd’hui, en France et à l’étranger d’un manque de reconnaissance et de visibilité.