Faudra-t-il bientôt un permis pour louer son bien immobilier dans certains quartiers de Nice ?

La Métropole Nice Côte d'Azur a présenté ce lundi son quatrième programme local de l'habitat (PLH), qui définit les objectifs et les actions à entreprendre en matière de logements jusqu'en 2029. La capitale azuréenne souhaite notamment mettre en place un "permis de louer" pour lutter contre l'habitat indigne.

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Lutter contre l'habitat indigne c'est avant tout obliger les bailleurs privés à louer des logements conformes aux normes sanitaires, de sécurité et thermiques, c'est-à-dire "'intervenir sur les propriétés privées dégradées", précise le vice-président de la Métropole Nice Côte d'Azur, Anthony Borré. 

Beaucoup de locataires ne vont pas oser franchir le pas de signaler ce type de difficultés (insalubrité) et il nous appartient de prendre des mesures supplémentaires pour agir contre les propriétaires "marchands de sommeil".

Anthony Borré, vice-président de la Métropole NCA

à France 3 Côte d'Azur

La Métropole souhaite donc instaurer un permis de louer dans certains quartiers de Nice.

Protéger les plus vulnérables

Le permis de louer, c'est La loi ALUR du 24 mars 2014 qui offre cette possibilité. Cette loi a pour objectif de réguler les marchés immobiliers, d'encadrer les pratiques abusives, de favoriser l'accès au logement, en protégeant les populations les plus vulnérables.

Dans un premier temps, la commune ou l'EPCI (Établissement public de coopération intercommunale) doit délimiter une zone où cette disposition sera aplliquée. Bien entendu, dans un même périmètre, des conditions spécifiques seront appliquées selon l'année de construction du bien.

Les propriétaires qui se trouvent dans ce périmètre et qui ont l'intention de louer leur bien doivent alors impérativement faire une demande d'autorisation préalable de mise en location de logement. Les services de la ville viennent faire une visite des lieux afin d'attribuer, ou non, ce "permis de louer".

Les critères d'attribution d'un permis de louer sont nombreux. Il s'agit de lister très précisément la présence de fissures, plus généralement l'état des murs et des sols, la disposition et l'état des sanitaires, le système de chauffage, la lumière des pièces principales, l'état des fenêtres, l'alimentation en eau, etc.

Si le logement à louer n'est pas conforme "aux normes de décence en vigueur", le propriétaire devra réaliser les travaux nécessaires. Une seconde visite après les travaux de remis en état permettra d'octroyer le permis. Ces interventions sur le parc privé ont pour but de lutter contre l'habitat indigne, d'une part et, d'autre part, de remettre également sur le marché des logements à loyers maîtrisés.

Des aides pour les propriétaires concernés

Pour accompagner (au mieux) les propriétaires qui se retrouvent dans l'obligation de rénover leurs biens immobiliers, des aides de divers organismes leur sont accessibles : la Métropole, l'Agence nationale de l'habitat (ANAH), le Département, etc.

La Métropole NCA indique qu'elle "développera les contacts avec les propriétaires bailleurs pour les mettre en relation avec un conseiller compétent afin de les sensibiliser sur la question de la vacance et de les inciter à remettre leur bien sur le marché, en locatif ou en accession (présentation des différents dispositifs, aides financières)".

Grasse l'a mis en place il y a 3 ans 

Grasse est la première ville des Alpes-Maritimes à avoir mis en place le permis de louer, en avril 2021, soit sept ans après sa création au niveau national.

Nicole Nutini, adjointe au maire de Grasse, déléguée à l'hygiène et à la salubrité publique, se souvient que l'équipe municipale, à peine élue, cherchait un moyen de chasser les nombreux "marchands de sommeil" de la vieille-ville. Avant de mettre en place le dispositif, l'État impose six mois de concertation avec les différents acteurs du secteur visé : les notaires, les agences immobilières, les bailleurs privés, etc. L'enquête de terrain n'a pu débuté qu'après ce délai.

On a dessiné un premier périmètre : le centre historique. 2.800 logements ont été recensés. On voulait lutter contre les nombreux "marchands de sommeil".

Nicole Nutini, adjointe au maire de Grasse déléguée à l'hygiène et à la salubrité publique

à France 3 Côte d'Azur

Sur les 2.800 logements ciblés de ce périmètre, plus de 300 font partie de l'habitat social, et 660 sont vacants. "C'est vraiment beaucoup", précise l'adjointe au maire. "À la fin de l'année 2024, ce sont plus de 1.000 visites qui auront été faites depuis le début du dispositif". "Depuis 3 ans, on a refusé le permis de louer 21 fois. Et 37 appartements sont jugés indignes en l'état."

Sur les 2.800 appartements identifiés, il y a 3 ans, 800 ont été rénovés afin d'obtenir un permis de louer. Seuls 4 propriétaires ont loué sans permis.

Nicole Nutini, adjointe au maire

à France 3 Côte d'Azur

Dans le cas d'une location malgré un refus, d'une location "sans permis", ou d'un défaut de demande, le propriétaire s'expose à une amende pouvant atteindre 15.000 euros. Mais ceci sera sans conséquence sur le bail signé par le locataire.

À Grasse, les services de la ville n'ont été confrontés qu'à  seulement quatre cas et ils étudient actuellement les sanctions possibles, le montant des amendes, etc. Ce sera mis en place à partir de janvier prochain.

Nicole Nutini estime qu'il s'agit d'un bon dispositif qui permet d'aider les collectivités locales, les propriétaires et de protéger les locataires. La semaine prochaine, la prolongation de ce dispositif pour une durée de trois années supplémentaires sera soumise au vote lors du Conseil municipal.

Etude sur l'habitat indigne

L'habitat indigne, ce sont ces logements vétustes et/ou insalubres, dont les propriétaires sont souvent désignés par le terme "marchand de sommeil". 

Le 13 novembre dernier, la fondation Abbé Pierre a publié une étude sur l'habitat indigne dans la région Paca, et plus particulièrement à Nice. Des chiffres qui font froid dans le dos car, sous le soleil azuréen, un Niçois sur 5 vit sous le seuil de pauvreté. Cette étude comporte de nombreux témoignages auprès de ménages en situation de mal-logement. L'enquête tente de démontrer que "les difficultés à trouver un logement dans la métropole niçoise conduisent certains ménages à recourir à des solutions inadaptées et précaires".

Pour la ville de Nice, l'enquête de la fondation est parti du constat suivant :

  •  Attribution de logement social : 1 pour 19 demandes
  •  Un taux de rotation de 5 % dans le parc social
  •  Augmentation de 25 % des prix de l’immobilier ces 5 dernières années

De son côté, la Métropole NCA constate que le rythme des constructions est en baisse, depuis quelques années, en raison des différentes crises (sanitaires, économiques, etc.), que la rotation dans le logement social s'est ralenti, et que l'important développement des meublés touristiques a fortement réduit l'offre locative.

Le parc immobilier niçois, et plus largement celui de la métropole Nice Côte d'Azur, est tendu. Une pression qui ne se relâche pas. Pour preuve : le prix de l'immobilier est le seul en France à ne pas avoir baissé, il affiche même une hausse sensible d'environ +3% pour les logements neufs.

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