Le yoga avec des chiots, dit "puppy yoga" : une nouvelle tendance qui laisse perplexes certains professionnels

Ces séances de yoga ponctuées de câlins et de selfies avec des chiots commencent à faire parler en France. Dernier né du business de la mignonnerie animale, le puppy yoga ne fait pas l'unanimité parmi les professionnels.

Après les bars à chats, le yoga avec des chiots. Tendance venue d’Outre-Atlantique, le Puppy Yoga attire depuis un an l’attention de la presse française, signe du succès grandissant de ces séances de câlinothérapie.

En témoigne aussi la croissance fulgurante de l'entreprise Pawsitive Yoga, qui a essaimé douze agences partout en France en seulement "six mois", affirme sa fondatrice, Nessrin Mbarki, 26 ans.

Cheffe de projet et éleveuse, la jeune femme raconte avoir été contactée par un studio de Puppy Yoga parisien. "En tant qu'éleveuse, je savais ce que cela apportait d'avoir des chiots autout de soi, leur mignonnerie", estime-t-elle. "Alors, je me suis lancée avec mes propres chiots et j'ai quitté mon boulot."

Après Paris, Nessrin Mbarki part à la conquête de la Côte d'Azur : Nice, Monaco, Cannes... À chaque fois, le concept séduit : 20 minutes de yoga, 30 minutes de détente en compagnie de petites boules de poils, avec en conclusion 10 minutes de relaxation. Le tout, à un prix largement supérieur à un cours de yoga traditionnel (41 euros par adulte), mais ponctué de selfies aux côtés d'adorables chiots.

Une pratique présentée comme bénéfique pour les chiots

Chaque semaine, ou presque, de nouvelles petites truffes défilent dans les locaux de Pawsitive Yoga. "On a noué des partenariats avec des éleveurs locaux", assure la jeune entrepreneuse, lancée avec son équipe dans un constat démarchage d'élevages.

Les chiots sont âgés de "huit à douze semaines", dit-elle, "en dessous, c'est trop jeune : il faut qu'ils soient sevrés et primo vaccinés." De fait, les portées et les élevages se succèdent pour offrir, chaque week-end, de nouveaux toutous aux clients de Pawsitive Yoga. "C'est du gros boulot", confirme l'entrepreneuse.

Sur les réseaux sociaux, elle redit les conditions d'accueil des chiots :

Au cours de la séance, "les chiots sont libres de leur mouvement, explique Nessrin Mbarki. S'ils sont fatigués, ils peuvent aller dormir." Un chien, durant ses premières semaines, dort jusqu'à 20 heures par jour.

Lâchés parmi les 10 à 15 yogis, les chiots seraient ainsi aidés durant leur phase de "sociabilisation" : "Ils sortent de leur élevage, toujours en compagnie de leur fraterie et de leurs éleveurs, assure Nessrin Mbarki. Au début, il leur arrive d'être timides avant de s'ouvrir petit à petit au fil de la séance." Une même portée va ainsi enchaîner deux séances d'une heure, entrecoupées d'une pause de 30 minutes.

Des professionnels méfiants

Ces nouveaux entrepreneurs de la mignonnerie animale ne font pas que des heureux. Une éleveuse, qui raconte avoir été approchée par une grande enseigne de puppy yoga, dépeint dans un post Facebook l'arrière-cour de ce business : "Le "prêt de chiots pour l’après-midi" est rémunéré", affirme-t-elle à France 3 Côte d'Azur.

Pour cette professionnelle, certains élevages pourraient être tentés "de placer des chiots qui ne seraient pas encore réservés", la séance de puppy yoga étant le "moment idéal pour le craquage envers un chiot". "Et l'intérêt du chiot là-dedans ?", s'indigne-t-elle. "C’est un être vivant et non un JOUET."

Le vétérinaire Jacques Delle Cave, à Menton, confirme : "Tant que le chiot a une bonne mère, qu'il est entouré, il n'a en rien besoin de ce genre de séances pour sa socialisation."

Le médecin se montre d'autant plus sceptique au sujet d'entreprises de puppy yoga, qui revendiquent utiliser des chiots âgés de 6 à 8 semaines, soit avant la première injection de vaccin. Avant cette primo-vaccination, les vétérinaires déconseillent les contacts avec l'extérieur.

Les arguments marketing employés par certains studios de puppy yoga font par ailleurs sauter aux plafonds des éleveurs : "Vous êtes libre [d']approcher [les chiots] et de jouer avec eux pendant la session", clame l'un d'entre eux.

"Dans un élevage, on manipule les chiots pour les habituer au contact humain. Mais manipuler n'est pas imposer un contact", explique Laëtitia, éleveuse en Bretagne. "Un chien a besoin de sa petite bulle, d'avoir ses moments de tranquillité. On les laisse venir à nous."

Des dérives observées en Grande-Bretagne

Une enquête journalistique de la chaîne d'information britannique ITV News a révélé, grâce à des images tournées en caméra-cachée, les dérives de cette pratique au Royaume-Uni, en juillet 2023. Des chiots perturbés dans leur sommeil pour satisfaire les envies de câlins des clients... et même, des animaux privés d'eau pour éviter les pipis intempestifs.

Ces images ont suscité une vive indignation en Grande-Bretagne, au point que la Société royale pour la prévention de la cruauté envers les animaux s'est fendue d'un communiqué "exhortant les amoureux des animaux à dire non au puppy yoga".

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