Matelas, agora, combats... L'occupation se poursuit au Théâtre National de Nice

A 14h, c'est agora. Ce moment est devenu un rituel quotidien pour le petit groupe qui s'installe chaque jour à l'entrée de la coulée verte, dans le centre de Nice. Le jeudi, les étudiants mènent les débats. Un temps et un espace sans limites où chacun peut parler, chanter et jouer. 

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C'est une pièce dont on ne connaît pas le nombre d'actes car il s'écrit au jour le jour. A Nice, l'occupation du théâtre national (TNN) a commencé il y a deux semaines. Ils dorment ici depuis 10 jours, juste devant les portes de la grande salle du théâtre, fermé depuis plusieurs mois à cause de la crise sanitaire.

Cuisine d'appoint

Anastasia Cassandra, artiste intermittente s'exclame pendant cette visite : "c'est pas du tout adapté, mais à la guerre comme à la guerre !" Dans le hall où se pressent habituellement les spectateurs, les nouveaux occupants ont installé une cuisine d'appoint. A quelques pas, un espace de travail leur permet de discuter de leurs combats.

"Pauvreté extrême"

Jean-Louis Ruf, musicien, représentant de la CGT spectacle martèle : "On a tous les mêmes revendications au premier rang desquelles le retrait de l'assurance-chômage qui doit entrer en vigueur le 1er juillet et qui nous scandalise quoi. On ne comprend pas comment dans cette situation le gouvernement peut appliquer une réforme qui plongerait dans la pauvreté extrême 150.000 personnes qui ne sont déjà pas riches."

En attendant une hypothétique réouverture des lieux culturels, pour la journée mondiale du théâtre le 26 mars, la direction du TNN a posté une vidéo sur Facebook : 

Parler, chanter et jouer

A 14h, c'est agora, du nom des places publiques de la Grèce antique. Ce moment est devenu un rituel quotidien pour le petit groupe qui s'installe chaque jour à l'entrée de la coulée verte, dans le centre de Nice. Le jeudi, les étudiants mènent les débats. Un temps et un espace sans limites où chacun peut parler, chanter et jouer. 

"On n'est pas seuls"

Aline Cassiano De Souza Lima, jeune étudiante en théâtre au conservatoire, participe à ces échanges : "je m'inquiète pour mon avenir, pour certains d'entre nous on est en théâtre, on ne sait pas si ça va nous amener quelque part. Du coup, on fait en soerte que ça nous amène quelque part".

Des moments qui font du bien aux apprentis artistes. 

Voir des gens qui sont de notre métier et qu'on ne connaissait pas, ça fait un an qu'on n'a pas rencontré des nouvelles têtes du métier, ça fait beaucoup de bien. On se rend compte qu'on n'est pas seuls dans cette situation en fait, on est beaucoup à avoir des choses à dire.

Robin Delval, étudiant au conservatoire.

L'Odéon occupé

Parti du théâtre de l'Odéon, le mouvement d'occupation se poursuit à Nice et dans une centaine de théâtres partout en France. A Paris, depuis le 4 mars, des acteurs occupent les lieux pour alerter sur la situation des précarisés du Covid. Un air de déjà vu. L'Odéon a déjà été occupé pendant un mois en mai 68, ainsi qu'en 1992 et 2016 pour protester contre une réforme du régime des intermittents. 

"Plus de 500 heures qu'on occupe l'Odéon et on ne lâche rien", répètent les occupants. La réforme de l'assurance chômage doit entrer en vigueur le 1er juillet, elle menace de diminuer les allocations mensuelles des intermittents de l'emploi (guides conférenciers, employés dans la restauration, l'événementiel etc.).

Commission "inter-occupation"

Concrètement à Odéon, on dort dans les loges et ailleurs, sur des matelas ou dans des sacs de couchage. Une seule douche à partager, tours de garde 24h sur 24 et respect d'un protocole sanitaire, Covid oblige. Jamais plus d'une cinquantaine à l'intérieur, avec parfois de nouveaux venus qui prennent le relais. Des commissions d'approvisionnement et de communication ont été créées. Il y a même une commission "inter-occupation" en charge des discussions avec les autres théâtres occupés. 

Evacuation à l'Opéra de Bordeaux

Depuis le 15 mars, l'Opéra de Bordeaux faisait partie des théâtres occupés dans le cadre des revendications pour la réouverture des lieux de culture. Les militants ont été évacués mercredi 24 mars, sur décision de la mairie. C'est la première évacuation d'un lieu culturel occupé par des intermittents. Il y a eu quelques incidents lors de l'évacuation.                                                                                                                                                                                           

Deuxième année blanche 

Spécificité française, le régime des intermittents concerne 120.000 artistes et techniciens indemnisés chaque année avec comme condition d'avoir travaillé 507 heures sur 12 mois. Emmanuel Macron leur a accordé une année blanche qui expire en juillet, mais ils réclament une deuxième année blanche, à cause de la prolongation de la crise. Quant aux millions d'euros versés pour la culture, les occupants estiment qu'ils ne profitent pas aux plus précaires.

En attendant un heureux dénouement, étudiants et intermittents dormiront encore ce soir au théâtre, à défaut de pouvoir y jouer. 

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