Le tribunal administratif de Nice interdit définitivement la vente en France de deux pesticides tueurs d'abeilles

Après une suspension d'autorisation provisoire décidée en 2017, la justice a décidé d'interdire la mise sur le marché de deux produits du groupe américain Dow AgroSciences. Les associations écologistes saluent une "décision exemplaire", qui "fera date".

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C'était une décision provisoire, elle est désormais définitivement actée. Le groupe américain Dow AgroSciences, producteur du Transform et du Closer, deux pesticides utilisés dans la culture de grands champs et de fruits et légumes - pour tuer les pucerons -, ne pourra plus les commercialiser en France.

Vendredi 29 novembre, le tribunal administratif de Nice, qui avait été saisi par les associations écologistes Générations Futures et l'Union nationale de l'apiculture française, "a estimé que le sulfoxaflor, qui entre dans la composition de ces pesticides et a pour effet d'agir sur le système nerveux central des insectes, était susceptible, en l'état des connaissances scientifiques de présenter un risque de toxicité important pour les insectes pollinisateurs".

Ces deux produits phytosanitaires font partie de la famille des néonicotinoïdes, qui ont la particularité de s'attaquer au système nerveux central des insectes. Plusieurs études ont démontré leur responsabilité dans le déclin impressionnant des colonies des abeilles et des bourdons, qui participent à la pollinisation des plantes.

Principe de précaution

Autorisés en septembre 2017 par l'Agence nationale de sécurité sanitaire, le Transform et le Closer avaient vu leur mise sur le marché français suspendue par le tribunal niçois quasi immédiatemment, en novembre de la même année, au motif du principe de précaution.

Deux ans plus tard, malgré la justification de Dow AgroSciences selon laquelle "le sulfoxaflor est un insecticide innovant qui ne présente pas de risque inacceptable pour les abeilles lorsqu'il est utilisé conformément aux recommandations de l'étiquette", la justice a définivement entériné sa décision.

Pour cela, elle s'est appuyée sur les études scientifiques et notamment des conclusions de l'Autorité européenne de sécurité des aliments, qui dans des rapports publiés en 2015 et 2019, a relevé des risques élevés pour les abeilles et les bourdons lors de l'utilisation de sulfoxaflor.

"Dans ces conditions, l'existence d'un risque pour les pollinisateurs doit être regardée comme une hypothèse suffisamment plausible en l'état des connaissances scientifiques", a estimé le tribunal administratif. Selon lui, le directeur de l'Anses avait "méconnu le principe de précaution" en autorisant la mise sur le marché des deux produits.

"Une décision exemplaire"

Les deux associations à l'origine de la saisine judiciaire, à qui le groupe américain devra verser à chacune 1.500 euros, se sont félicitées de cette décision.  Elle "servira, nous l'espérons, à inciter le gouvernement et les agences évaluatrices à réfléchir à deux fois avant de délivrer des autorisations de mises sur le marché de produits dont les utilisations pourraient s'avérer désastreuses pour la biodiversité ou pour la santé humaine", a réagi François Veillerette, directeur de Générations Futures, cité dans un communiqué.

Pour François Lafforgue, avocat de l'association il s'agit là d'une "décision exemplaire", qui "fera incontestablement date (...) dans la lutte pour la préservation de la biodiversité".

Selon l'Union nationale de l'apiculture française, "le processus d'autorisation de mise sur le marché de pesticides est faillible et nécessite d'être revu en profondeur afin d'éviter qu'à l'avenir, la précipitation soit la norme et la prise en compte du principe de précaution l'exception".
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