La Cour des comptes demande une clarification des rôles des régions, de l'Etat et de la SNCF dans la gestion des TER dont le service aux usagers "se dégrade", en vue de l'ouverture à la concurrence en 2023. Dans les Alpes-Maritimes, l'opérateur italien Thello est déjà présent.
Votre train est en retard, ou supprimé ? Vous pensez être seule à vivre ces situations de stress ? La Cour des Comptes vient de confirmer ce que de nombreux voyageurs avaient déjà constaté : le service de la SNCF se dégrade. Elle demande une clarification des rôles des régions, de l'Etat et de la SNCF dans la gestion des Trains express régionaux (TER) en vue de l'ouverture à la concurrence en 2023.
"Baisse de la fréquentation"
Devenues autorités organisatrices de transports (AOT), les régions ont massivement investi dans le renouvellement du matériel roulant (3,3 milliards entre 2012 et 2017) et le réseau ferré régional, note la Cour dans un rapport publié mercredi. Mais ces dépenses accrues "se sont paradoxalement accompagnées d'une baisse de la fréquentation". "Cela tient pour beaucoup à un effort insuffisant de maintenance sur l'ensemble de ce réseau, avec une qualité de service qui pouvait être considérée comme insuffisante par les usagers", souligne le président de la Cour des comptes, Didier Migaud.
TER subventionnés à 88 %
Le directeur de la branche TER, Frank Lacroix, a fait valoir que si la situation s'est effectivement dégradée jusqu'en 2016, "un programme de transformation" a alors été lancé. "D'autres opérations font que nous sommes dans une phase de préparation intense à l'ouverture à la concurrence", a-t-il assuré.Mais pour la CGT, l'ouverture à la concurrence n'est pas inévitable. Pour trouver des sources de financements, il suffirait de demander aux entreprises de mieux prendre en charge le déplacement en train de leurs employés. Ce n'est pas l'avis de la Cour des Comptes qui trouverait normal que le voyageur paye plus. Aujourd'hui, les TER sont subventionnés à 88% par des financements publics. Les régions pourraient en économiser en fermant certaines lignes jugées pas assez rentables comme la liaison Breil-Nice.
Philippe Tabarot, vice-président Conseil Régional Sud PACA, délégué aux transports s'oppose à cette idée. L'une des pistes envisagées serait de faire payer plus cher les voyageurs occasionnels.
Trains italiens Thello
En région, le transport des voyageurs pourrait être confié à d'autres entreprises que la SNCF. Pour les Alpes-Maritimes, département frontalier de l'Italie, les trains italiens Thello sont une réalité depuis 2017. C'est le premier opérateur ferroviaire alternatif de transport de passagers en France.
Trois départs quotidiens de Nice
Il exploite deux lignes entre la France et l’Italie : un train de nuit Paris-Dijon-Venise qui dessert quotidiennement les villes de Milan, Brescia, Vérone, Vicence, Padoue et Venise. Un train direct entre le sud-est de la France et l’Italie avec trois départs quotidiens de Nice toute l’année et un départ quotidien de Marseille à fréquence variable pendant l’année. Cette ligne dessert les gares de Marseille Saint Charles, Toulon, Saint Raphael, Cannes, Antibes, Nice Ville et Monaco et poursuit son parcours en Italie dans les gares de Vintimille, jusqu'à Milan Centrale.
Des coûts en "hausse constante"
La Cour recommande de limiter les coûts d'exploitation, "notamment en ajustant le niveau de présence d'agents en gare et à bord des trains au strict nécessaire". Interrogé sur l'actualité récente, l'accident de TER mi-octobre dans les Ardennes qui a déclenché un mouvement social à la SNCF, M. Migaud a souligné que la Cour n'avait "pas la compétence de fixer les conditions de sécurité du trafic ferroviaire", qui relève d'un organisme indépendant. La Cour déplore enfin la "préparation encore insuffisante à l'ouverture à la concurrence", qui sera la règle à partir de 2023 et "offre l'opportunité d'un "rééquilibrage" des relations entre les régions et SNCF Mobilités.
Les recommandations de la Cour des Comptes :
- Transférer aux régions qui le souhaitent la propriété des infrastructures régionales (réseau secondaire, gares locales) et leur laisser le choix des modalités de gestion et d’entretien (État, régions).
- Accroître l’exigence sur le niveau de qualité de service attendu de l’exploitant et renforcer le niveau d’incitation (pénalités, bonus/malus)(régions).
- Réaliser une analyse sociale, économique et environnementale de chaque ligne peu fréquentée permettant à chaque région de choisir entre les options suivantes : développer la ligne, la maintenir en la gérant de façon plus économique, l’organiser avec un autre mode de transport ou la supprimer (régions, SNCF Mobilités, SNCF Réseau).
- Veiller, dans l’élaboration des cahiers des charges, à limiter les coûts d’exploitation, notamment en ajustant le niveau de présence d’agents en gare et à bord des trains au strict nécessaire (régions).
- Revoir les plans de transport afin de les rendre plus fiables et d’améliorer la régularité des trains (régions, SNCF Mobilités, SNCF Réseau).
- Réexaminer le niveau de contribution des clients aux coûts du TER en lien notamment avec la qualité du service (régions).
- Fiabiliser les informations qui sont susceptibles d’être demandées par les régions en application du décret du 20 août 2019 (SNCF Mobilités).
- Renforcer l’expertise technique, juridique et financière des régions afin de préparer efficacement les futurs appels d’offres (régions).
- Filialiser l’activité TER et lui transférer l’essentiel des fonctions support assurées actuellement pour son compte par SNCF et SNCF
Mobilités.
Les TER... en chiffres
Le réseau TER représente :- 900.000 voyageurs
- 7.000 trains
- 1.300 cars
- 20.500 km de ligne dont seulement 11.850 sont électrifiées
- 285 gares accueillent en moyenne moins de trois voyageurs par jour
- les coûts d'exploitation des TER sont coûts sont couverts à 88% par des subventions publiques
- les clients ne payent que 12% du prix réel du billet
- coût total de l'activité TER : 8,5 milliards en 2017.