Fin du périple pour Kevin Bensimon, jeune antibois de 29 ans installé à Kiev en Ukraine. Il a fui les bombes et a réussi à franchir les frontières pour revenir sur la Côte d'Azur, près de sa famille.
C'est la fin d'un long périple au milieu d'un pays en guerre pour Kevin Bensimon, 29 ans.
Et la fin de longues heures d’angoisse pour sa famille, installée à Antibes-Juan-les-Pins.
Stéphanie Brodin patiente dans le hall de l'aéroport Nice Côte d'Azur. Son fils Kevin arrive par un vol de Copenhague cet après-midi.
Sa mère se précipite sur lui, s’ensuivent de longues embrassades entre la mère et le fils. L’attente a été trop longue, près d’une semaine et très angoissante depuis le début de l’invasion russe, le 24 février.
Kevin est conscient du stress occasionné : "Je voyais ma maman attendre comme ça je voyais qu’elle était très atteinte. Si je reviens, en grande partie c’est pour revoir ma famille. "
Mais ce n’est pas véritablement un soulagement :
"Je suis triste en fait. Après 4 heures en voiture j’ai compris qu’on n’allait pas mourir là-bas. Ma copine m’en voulait d’être trop détendu. Mais j’ai beaucoup d’amis qui sont là-bas donc ça me rend triste et j’espère que je pourrai y retourner."
Il explique :
On n’est pas préparé à ça, c’est juste un mauvais film, normalement c’est des films que j’aime bien mais là, c’était pas le cas. Le cauchemar c’est de tout laisser. Le cauchemar c’est de voir des personnes qu’on aime souffrir. Le périple c’était pas un cauchemar, c’était dur mais c’était pas un cauchemar. C’est pour ceux qui sont là-bas le cauchemar.
Kevin Bensimon
Là-bas, il sait qu'il a laissé des Français, des Ukrainiens, des amis dans la ville de Kherson, la ville qui vient d'être prise par les Russes : "les gens doivent marcher un à un en file indienne. S’ils ne répondent pas positivement aux Russes, ils peuvent se faire tirer dessus. J’ai une amie, sa voisine s’est fait descendre sans raison apparente."
Certains de ses amis retournent en Ukraine.
Autoroute à contresens à 150km/h
Pour revenir en France, Kevin a dû trouver des routes à travers la guerre et les bombardements.
Dès qu'il a eu une fenêtre de tir pour fuir Kiev, il est parti de la capitale assiégée.
Sur la route, lui et ses amis ont dû changer d'itinéraire (cf.carte), faire demi-tour, rouler à 150 km/h sur l’autoroute à contresens pour trouver une issue. Seule façon de sauver leurs vies.
Il a mis 17 heures pour arriver en Pologne, puis ils sont restés 37 heures bloqués à la frontière avant de rejoindre le nord de l'Europe en avion.
Direction le Danemark et l'aéroport de Copenhague puis Nice en avion.
Son père, Stéphane Bensimon et son petit frère Jordan sont soulagés de cette heureuses issue. "Je ne vous cache pas que l’arrivée à la frontière en Pologne c’était long !", lâche le père.
Il était 3 semaines auparavant à Kiev. "Quand votre fils vous téléphone à 5 heures et demi du matin et vous dit papa, écoute y a des bombes. On ne réalise pas. C’est un jeu vidéo. On est hyper impuissant. Heureusement que les Russes n’ont pas coupé internet et Whatsapp !" Cela lui a permis de rester en contact et de le rassurer.
Son petit frère lui a demandé d’activer la géolocalisation de son téléphone portable. "C’était très dur mais on a eu des échanges réguliers", souffle le père.
Jordan a vu ses parents très inquiets toute la semaine. Il est admiratif : « Je trouve qu’il a été très courageux, il a réussi à garder la tête froide. (…) Et il a essayé de représenter toutes les valeurs qu’a pu lui apporter l’Ukraine. »
"Une bombe dans les mains"
Kevin n'est pas arrivé seul en France : il est accompagné de sa petite amie, avocate en finance qui a tout abandonné là-bas et de la grand-mère de celle-ci.
Polina Reshetniak répond d'une voix douce et affirmée en anglais, presque en souriant aux questions des journalistes : « Je n’ai plus de foyer. On est en guerre. Ils détruisent tout (…) Vous êtes réveillés à 4 heures du matin par une personne qui frappe à votre porte avec une bombe dans les mains, c’est un cauchemar ! »
La jeune femme ne finira pas sa phrase, elle éclate en sanglots. Pour elle et sa grand-mère, le périple n'est pas terminé : elles se rendront aux Etats-Unis, loin de leur terre natale.