Ce lundi comparaît devant la cour d'assises d'Aix-en-Provence Yoan Gomis dans une affaire de viol qui a valu à son frère jumeau monozygote d'effectuer dix mois de détention provisoire, en partie parce qu'il partage le même ADN. Est-il possible de distinguer l'ADN de vrais jumeaux ?
Est-il possible de distinguer l'ADN de vrais jumeaux quand l'un d'entre eux est accusé de crimes ?
Oui, grâce au "Twin test" de la société française de biotechnologies Eurofins. Un test coûteux, jamais utilisé en France.
Depuis fin 2013, existe pourtant un test génétique - jamais utilisé par la justice française - qui permet de distinguer l'ADN des vrais jumeaux.
"Avec le temps, des mutations se produisent au cours de l'embryogenèse" après la séparation des deux jumeaux issus d'une même cellule souche, explique Olivier Pascal, de l'Institut français des empreintes génétiques (IFEG), le laboratoire d'Eurofins à Nantes. Pour les trouver, il faut séquencer "la totalité des trois milliards de nucléotides" de l'ADN et rechercher les différences.
"C'est comme rechercher une aiguille dans une botte de foin", dit-on chez Eurofins.
Ce test, qui n'était pas encore disponible lors de l'arrestation des frères Gomis, en février 2013, est "de toute façon délicat" et "soumis à la qualité" de la trace ADN. Rien n'assure qu'il aurait pu être utilisé dans cette affaire.
Selon Eurofins, qui revendique être le seul laboratoire capable de distinguer des ADN entre vrais jumeaux, le test n'a pour l'instant été utilisé par la justice
que dans deux pays: en Allemagne, pour une affaire de paternité en 2013 et aux États-Unis, à Boston, en 2014, pour une double affaire... de viols.
Premier obstacle à son utilisation: son prix. Si Eurofins n'a pas souhaité le préciser, expliquant que beaucoup dépend de la qualité de l'échantillon, le chiffre de 100.000 dollars (90.000 euros) a circulé.
L'autre obstacle, en France, est d'ordre éthique. La recherche ADN dans le domaine médicolégal ne peut porter que sur l'ADN non-codante (qui ne détermine pas les caractéristiques phénotypiques: couleurs des yeux ou des cheveux, taille, etc.), la partie codante étant réservée à la recherche.
Or, les différences dans l'ADN de vrais jumeaux peuvent se loger dans les deux parties, explique M. Pascal, qui souligne que "la France est en attente d'une jurisprudence". - Avec AFP-