Pour Guillaume Marchessaux, biologiste originaire d'Aix-en-Provence, manger le crabe bleu est une solution pour contrôler l'espèce qui envahit la Méditerranée.
Le crabe bleu envahit la Méditerranée et inquiète les pêcheurs. Cette espèce a pu être observée dans l’étang de Berre, aux abords de la plage de Figuerolles à Martigues et à Saint-Chamas. Ce crustacé est un véritable fléau. "Les callinectes sapidus sont très gros. Ils ont un comportement territorial et agressifs avec leurs congénères et autres espèces autochtones", nous explique Guillaume Marchessaux, écologue et biologiste, originaire d’Aix-en-Provence.
S’il dévore tout sur son passage et affaibli la biodiversité, il est aussi la bête noire des pêcheurs. "Il a beaucoup de force dans ses pinces, il craque les filets et mange les autres poissons. Cela a un coût énorme sur la pêche, car ils en remontent beaucoup. Il y a un impact financier conséquent qui inquiète les pêcheurs", explique le biologiste.
Chercheur à l’université de Palerme, en Italie, il s’intéresse actuellement à l’impact socio-écologique de l’invasion des crabes bleus, à l’échelle de la Méditerranée. L’objectif de la recherche de Guillaume Marchessaux est de quantifier l’impact du crabe bleu sur la pêche artisanale.
Manger le crabe bleu pour en finir ?
Et si la solution pour en venir à bout, c’était de les manger ? Selon le chercheur de l’université de Palerme, le crabe bleu a une chair très délicate, qui se rapproche de celle du tourteau et de la langouste.
"Un des moyens de contrôler les populations, c’est consommer le crabe bleu. On connait l’espèce. Elle est énormément consommée en Amérique, où il y a même de la surpêche."
Guillaume Marchessaux, écologue et biologisteFrance 3 Provence-Alpes
Mais les Français sont-ils prêts à manger du crabe bleu ? Guillaume Marchessaux est en charge de répondre à cette question. A travers un questionnaire qu’il a créé, il essaie de connaître les habitudes de consommation de crustacés de la population, et de savoir si elle est prête à en consommer et à quel prix. "L’objectif est de créer un circuit court, du pêcheur au restaurant ou à la poissonnerie. Vendre le crabe bleu permettrait aux pêcheurs de compenser les pertes financières et au citoyen de le consommer. Il s’agirait d’un geste citoyen en contribuant au contrôle de la population."
Peur bleue
Seulement voilà, les gens ne connaissent pas forcément ce crabe aux pinces et pates bleues, qui mesure jusqu’à 25 cm et pèse jusqu’à 700 g. "Il y a un travail de sensibilisation à faire comme il n’est pas intégré à notre culture. Un poissonnier à Aix-en-Provence en vend parfois, mais les particuliers n’en n’achètent pas, car sa couleur fait peur", explique Guillaume.
Déjà plusieurs pays se tournent vers cette pêche contrôle, tels que l’Espagne, la Turquie, la Grèce ou encore l’Italie. Pour l’heure, 1 300 personnes ont déjà répondu au questionnaire. 90 % des répondants se disent prêts à consommer du crabe bleu, pour la raison principale de découvrir un produit, mais aussi pour réaliser un geste citoyen. Pour autant, ils préfèrent le consommer au restaurant, plutôt que de le cuisiner.
En clair, vendre le crabe bleu, c’est supporter la pêche artisanale, et contrôler les populations de l’espèce, selon Guillaume. Le biologiste insiste cependant sur un point. "Ce n’est pas destiné à être dans la culture culinaire française de manière pérenne. Il s’agit plutôt d’une pêche à court terme, mais utile, pour le contrôle des populations. Peut-être que dans cinq ans ça ne se fera plus."
L’objectif de ce questionnaire est aussi de récolter des informations à transmettre aux décideurs et gestionnaires. "Il faut réagir rapidement et ne pas attendre des années avant de mettre en place des mesures de gestion", explique le biologiste.