Chaussure, Minitel, portière de voiture, des objets sauvés des eaux racontent l'histoire des sinistrés des inondations d'Arles

Arles, 20 ans après les inondations de décembre 2003. Une exposition replonge les sinistrés dans leurs souvenirs au travers d'objets familiers, disparus ou récupérés.

Se souvenir via des objets. Vingt ans après les inondations qui ont meurtri Arles en décembre 2003, une exposition "réactive" la mémoire et les émotions des sinistrés au travers d'objets familiers, disparus ou récupérés. Dessins, photographies et de témoignages redonnent vie aux souvenirs.

Depuis le mois d'octobre 2023, à l'espèce Van Gogh où se tiendra dès dimanche 3 décembre cette exposition, quatre artistes s'activent pour faire naître leur projet intitulé "Des hauts et des bas" : Constance Biasotto, metteuse en scène de la compagnie Bazar Palace, l'autrice Camille Nauffray, Rosalie Parent, photographe et Élisabeth Guyon, géo-artiste, se sont mis en tête de dresser "une retranscription sensible de ce que les sinistres ont traversé à travers des objets préservés ou disparus qui ont survécu à l'inondation".

La valeur intime des choses

Une vieille dame est venue apporter une poupée qu'elle avait réussi à sauver des eaux, le seul cadeau de petite fille qu'elle n'ait jamais reçu de ses parents. Comme pour beaucoup de sinistrés, la valeur de l'objet est intime et personnelle.

Élizabeth Guyon est arlésienne. Elle a elle-même connu cet épisode de crue du Rhône il y a 20 ans. En 2018, à l'occasion d'une production artistique autour des zones inondables, elle s'était déjà plongée dans la vie des sinistrés. Aujourd'hui codirectrice artistique de cette exposition, elle a accompagné le recueil de témoignages et la collecte de ces objets, en s'attachant aux récits des habitants.

"Notre travail a re-déplié des tranches de vies"

Une trentaine d'objets seront mis en lumière, de la touche d'un piano en ivoire, à la sellette de mule en passant par une basket ou un panneau de signalisation. Ou encore, "une portière de voiture, un morceau de stèle funéraire, un Minitel... ces objets parlent d'eux-mêmes", explique Elisabeth, "car qu’ils portent des traces visibles de limons, et puis les histoires de vie qui les accompagnent disent le reste".

Ces objets réunis nous parlent du monde agricole, des champs et des hangars autant que du chez-soi et de la rue, de la vie au quotidien de ce territoire qui est rurbain [rural et urbain]

Elizabeth Guyon, codirectrice artistique de l'exposition

France 3 Provence-Alpes

Parmi les habitants qui ont accepté de participer au projet, des personnes très âgées qui avaient plus de 60 ans à l’époque, des gens qui "venaient de vivre des événements importants avant la catastrophe, ou qui ont connu tout de suite après une perte douloureuse... Notre travail a redéplié des tranches de vies autour de cette période" raconte l'artiste arlésienne.

Dessiner l'objet perdu pour retrouver la mémoire

"Les objets sont des filtres à travers lesquels l'émotion va passer et sont aussi des supports de parole", pour toutes les classes sociales, les profils, et tous les âges : agriculteurs, professeur des écoles, médecin, et même une jeune femme qui avait seulement cinq ans à l'époque des faits, ont confié leurs souvenirs perdus.

L’originalité du travail d'Elizabeth Guyon  au cœur de l'exposition est d'avoir fait "resurgir" des objets engloutis par les eaux, noyés dans l’inondation en les dessinant à "quatre mains" avec les sinistrés.

Dès qu'ils se croisent, les habitants sinistrés se mettent à échanger des souvenirs. L'exposition sera un lieu de réactivation de la mémoire.

Elizabeth Guyon, codirectrice de l'exposition "Des hauts et des bas"

France 3 Provence-Alpes

C'est ainsi qu'elle a redonné vie, sous sa plume, à un costume de scène et à son propriétaire disparu, ou à des "pages de cours de philo de terminale" qui manquaient à une habitante depuis leur disparition dans les flots. Au total, huit dessins sont ainsi consignés dans les pages d’un vieux dictionnaire qui sera exposé.

"Cela n'a pas été facile de leur expliquer ce que l’on voulait faire et on ne savait pas trop à quoi s'attendre, mais au bout du compte, nous avons de belles une surprise", conclut l'artiste. 

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