Créées près d'Arles, ces bornes anti moustiques reproduisent la respiration humaine pour attirer les moustiques femelles, seules à piquer, et les capturer. Résultat : moins de piqûres et moins de ponte, la population d'insectes est régulée.
Sur les cartes qui évaluent la présence du moustique tigre en France, les départements de la région Paca s'affichent presque tous en rouge, le niveau le plus élevé.
En Provence-Alpes Côte d'Azur, le pourcentage de la population habitant des communes colonisées par le moustique tigre est supérieur à 40%, comme on peut le voir sur la carte ci-dessous.
Le pourcentage de communes colonisées par cette espèce atteint lui aussi des records.
Ce moustique n'est pas seulement la cause de piqûres inconfortables, il est aussi vecteur de maladies telles que la dengue et le chikungunya.
Essentiellement urbain, le caractère anthropophile du moustique tigre, c'est-à-dire qui aime les lieux habités par l’homme) explique qu’une fois installé dans une commune ou un département, il est pratiquement impossible de s’en débarrasser.
Eviter les pulvérisations massives
Lorsque les créateurs de cette borne anti moustiques ont fait leurs premières recherches pour créer un moyen écologique de lutte contre les moustiques, le tigre faisait son apparition en France.
"Dans les années 2010, les produits larvicides autorisés pour la démoustication, même écologiques, ont eu un impact néfaste sur la faune insectivore", décrit Pierre Bellagambi, co-fondateur de l'entreprise Qista.
"Ils ont détruit des insectes qui avaient le même développement que le moustique et qui étaient à la base de la chaîne alimentaire".
C'est dans ce contexte que les créateurs de Qista recherchent une solution qui permette d'éviter les pulvérisations en masse et de protéger les insectes qui ne s'attaquent pas à l'homme.
D'autant que les traitements de l'époque, envoyés par avion, ne peuvent pas être appliqués dans les grands centres urbains, où se développe le moustique tigre.
La borne qui voit le jour imite la respiration humaine en relâchant du dioxyde de carbone et des molécules semblables aux nôtres. La femelle moustique, qui a besoin de piquer pour pondre, est alors attirée et aspirée par le dispositif.
Moins d'œufs et moins de piqures
"Cela lui empêche de pondre 200 œufs toutes les 48 heures. Il y a moins d'œufs, donc moins de moustiques et moins de piqûres", précise Pierre Bellagambi.
Autre avantage : il y a moins de dégâts collatéraux que sur les autres types de larvicides : seule la femelle moustique et quelques insectes hématophages (comme les moucherons qu'on appelle "arabis" ou certaines espèces de mouches) sont attirés. Les autres insectes restent disponibles comme proies pour la faune locale.
En Camargue, où le dispositif est testé au centre de recherches de la Tour du Valat, les créateurs constatent une baisse notable des nuisances : "on passe de 15 piqûres toutes les 10 minutes, à un une piqure toutes les 10 minutes."
Mais la faune sauvage qui se nourrit de petits insectes (comme les chauves-souris par exemple), elle, n'est pas affectée.
"Le centre de recherche mandaté par la région pour mesurer leur taux de natalité dans les zones traitées par la machine constate un taux équivalent à une zone vierge", précise Pierre Bellagambi, alors que la natalité baisse avec les larvicides classiques.
"La borne travaille au même titre qu'un être humain qui respire dans son jardin", explique Pierre Bellagambi.
Le succès commercial est aussi au rendez-vous. L'entreprise, qui commercialise les bornes pour les particuliers (1.098€) et pour les collectivités (2.220€), est passée de 16 salariés en 2019 à 65 en 2022.
Basée à Senas, dans les Bouches-du-Rhône, elle fabrique ses dispositifs en France et exporte dans 18 pays. Des bornes sont présentes aux abords de certaines crèches marseillaises, à Arles ou à Hyères. Elles sont efficaces sur un rayon de 60 mètres.