Agression d'Yvan Colonna en prison, ce qu'il faut retenir de l'audition du directeur de la pénitentiaire

Laurent Ridel, directeur de l’administration pénitentiaire était auditionné mercredi à l'Assemblée nationale à la suite de la tentative d’assassinat contre Yvan Colonna à la Maison centrale d’Arles. Point par point, il a répondu aux questions des députés sur l'agression.

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Pendant deux heures et demie, le directeur de l’administration pénitentiaire est revenu sur l'agression dont a été victime Yvan Colonna le 2 mars, précisant dans le détail les moyens de surveillance et le timing de l'attaque. 

Cette audition intervient dans le cadre de deux enquêtes ouvertes, l'une de l'inspection générale de la Justice, l'autre par le parquet national anti-terroriste à l'encontre de son agresseur radicalisé. 

Deux détenus particulièrement surveillés (DPS)

Inscrit au registre DPS, Yvan Colonna était incarcéré à la centrale d'Arles depuis 2012, où il avait ses habitudes et ses connaissances. Il était auxiliaire sport sur le terrain extérieur et le gymnase. 

Son agresseur, Franck Elong Abé qui a eu un parcours très chaotique au début de son incarcération s'était semble-t-il stabilisé, a indiqué Laurent Ridel. Il était lui aussi DPS. 

Ce statut prévoit une vigilance accrue quant à la surveillance des détenus et leurs demandes d'activité ou de travail, "mais il n'y a pas d'interdiction d'activité ou de travail (...) et rien n'indique le nombre de DPS qui vont se côtoyer dans cette activité", a précisé Laurent Ridel. 

Franck Elong Abé avait rejoint Arles en 2019. Il avait fait un séjour en isolement, puis dans un quartier spécifique d'intégration où il est resté neuf mois avant d'intégrer la détention classique en avril 2021.

Il avait été classé au service général d'entretien des salles d'activité de sport du bâtiment en septembre. Les deux détenus ne se côtoyaient pas en détention, hormis dans les salles d'activité. "Il n'y a pas eu de remontées d'altercation, y compris concernant un éventuel blasphème", entre les deux détenus. 

Le déroulé de l'agression 

Le matin de l'agression Yvan Colonna fait du sport. Le surveillant de service ouvre la porte à Franck Elong Abé. La porte reste ouverte. Le surveillant, "qui est seul va mettre en place un certain nombre d'activités ailleurs et c'est là que Franck Elong Abé commet les actes que vous connaissez", indique Laurent Ridel

Au bout de huit à dix minutes, le surveillant revient pour chercher Yvan Colonna et c'est là que Franck Elong Abé indique au surveillant qu'Yvan Colonna a fait un malaise. Le surveillant place alors Yvan Colonna en position latérale de sécurité et prodigue les premiers soins avant d'appeler les secours.

"Je ne peux pas vous dire si c'est normal que huit ou dix minutes se soient écoulées, c'est aux directeurs d'Arles de vous répondre, a indiqué le directeur de l'administration pénitentiaire, je ne peux pas vous garantir qu'il existe une surveillance constante de tous les détenus"

L'absence de témoins

"Je n'étais pas à Arles le 2 mars, selon les éléments qui m'ont été remontés, il n'y avait pas de témoin direct de cette agression", a défendu Laurent Ribel, à la question du député nationaliste corse Jean-Félix Acquaviva.

"Selon les éléments que je sais à ce stade, il y avait d'autres détenus présents dans un certain de salles d'activités. À ma connaissance, ils n'ont pas entendu de bruit"

L'exploitation de la vidéosurveillance

"Les bandes vidéos sont entre les mains des enquêteurs et l'ensemble des enregistrements de cette journée sont à disposition des enquêteurs", a indiqué Laurent Ribel, précisant que trois mois d'enregistrements étaient disponibles. 

Le directeur de l'administration pénitentiaire a toutefois admis qu'une opération de maintenance sur la vidéo aurait duré "entre 30 secondes et deux minutes" sans avoir eu "d'impact sur l'enregistrement de la séquence la plus dramatique".

54 caméras dont 2 dans la salle de sport 

Sur la surveillance, il y a trois postes, a précisé le directeur de l’administration pénitentiaire : un surveillant de brigade, affecté régulièrement qui connait les détenus et le fonctionnement, dédié à cette zone d'activité qui compte une quinzaine de salles.

Les deux autres postes sont des postes de sécurité où il y a des renvois de caméras. Dans la salle ou Yvan Colonna a été agressé il y a deux caméras sur un total de 54 caméras. "Compte tenu du nombre de caméras, il n'est pas possible de surveiller 24h sur 24, de façon constante, l'ensemble des caméras".

Tous les jours des scénarios sont mis en place pour choisir quelles caméras surveiller. "Ce matin-là, le scénario "mouvement en détention" était celui qui avait été retenu", a précisé Laurent Ridel. 

L'agression d'Yvan Colonna, "un acte manifestement terroriste"  

L'agression dont a été victime Yvan Colonna, dans la prison où il purgeait une peine à perpétuité pour sa participation à l'assassinat du préfet Erignac, "est un acte manifestement terroriste", a affirmé mercredi le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin au quotidien Corse-Matin.  

Un acte "dont l'objet aurait été le blasphème" a précisé Gérard Darmanin, en faisant référence à Samuel Paty, cet enseignant décapité en 2020 en région parisienne pour avoir montré des caricatures de Mahomet en cours à ses élèves.  

Le militant indépendantiste corse a été agressé le 2 mars à la maison centrale d'Arles (Bouches-du-Rhône), par un autre détenu, qui purgeait une peine de prison pour terrorisme.  

Depuis cet événement, la tension est fortement montée en Corse, pour culminer en "émeutes" dimanche à Bastia, selon la justice. Selon un dernier bilan, ces échauffourées ont fait 102 blessés, dont 79 membres des forces de l'ordre.    

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