Coronavirus : perturbés par le rythme des journées, le difficile confinement des enfants autistes

Des parents épuisés et parfois en détresse, des enfants déboussolés, dont les troubles du comportement risquent de s'aggraver: pour beaucoup de familles confrontées à l'autisme, les longues semaines de confinement sont vécues comme une épreuve de plus dans un quotidien déjà difficile.

Pour les familles d’enfants autistes, le confinement est une période extrêmement compliquée.

L’association Pas à Part, qui suit plus d’une centaine de familles à Marseille, a dû fermer son bureau d’accueil. Elle maintient le lien par téléphone, par mail et par sa page Facebook."Le confinement perturbe le rythme habituel des journées, qui est une chose importante pour les autistes. On assiste à toutes les situations, et à plus de crises que d’habitude", explique M’Barka Bouaroua, présidente de Pas à part.

"Les enfants qui bénéficiaient de structures n’y vont plus. Car elles sont fermées. Les autres, en plus grand nombre, restent à la maison, et bénéficient de la prise en charge d’éducateurs à domicile. Mais avec le confinement, rare sont les éducateurs qui poursuivent leur mission."

Pendant le confinement, seules restent en principe ouvertes les structures qui, habituellement, accueillent les enfants en internat. Les externes, en revanche, qu'ils fréquentent une école classique ou un institut médico-éducatif (IME), sont désormais confinés chez eux, avec leurs parents.

Beaucoup de mères vivent seules avec leurs enfants, comme c’est souvent le cas dans des situations de handicap.


"En temps normal, c’est déjà compliqué de vivre avec un enfant autiste, mais là…

Je connais des familles qui vivent à cinq dans 30 m2. Il y en a qui ont ni balcon, ni terrasse. Hier soir, une mère n’a pas réussi à retenir son fils de 17 ans en manque d’activités. Il est sorti et s’est déboîté l’épaule."

Chaque famille s’organise comme elle le peut. Certaines mères se retrouvent débordées par une fratrie nombreuse, et ne peuvent sortir leur enfant. D’autres y arrivent, "pour une petite heure".
"Les autistes sont comme nous, ils ont leurs habitudes. Ne plus sortir est pour eux une situation anxiogène. L’enfermement est source d’angoisse et d’incompréhension chez eux", poursuit la présidente de Pas à Part.

"Et cette incompréhension est due aux troubles de la communication. Il faut les occuper toute la journée. Il faut réussir à communiquer avec eux, souvent avec des pictogrammes.  Mais les parents sont ni éducateurs, ni soignants, ni médecins."

Jusqu’à lundi, ça allait. Mais depuis, ça n’est plus gérable.

Magali Mauro et son mari ont trois enfants. Leur fille Auréli, 20 ans, est l’aînée.

Malgré les changements du confinement, Auréli bénéficie encore de la visite à domicile de deux jeunes éducatrices.

"Jusqu’à lundi, ça allait. Mais depuis, ça n’est plus gérable", raconte la mère de famille. "Elle fait des crises tout le temps.  Elle court, elle se mord. Elle ne veut plus rien faire."

"On avait l’habitude d’aller au bord de mer, ou à la piscine. On allait aussi faire des courses dans des grands magasins, et là plus rien", rajoute Magali 

"Et le soir, elle ne se couche plus. Nous sommes obligés mon mari ou moi, de la balader en voiture pendant une bonne demi-heure, car elle monte en pression. Ca l’apaise, puis on rentre".

Le confinement a aussi changé l’organisation de cette famille, où les deux parents travaillent, même en ce moment.

La mère de Magali venait régulièrement s’occuper de sa petite fille. Mais elle est confinée chez elle, et ne peut plus aider.

"Je ne sais pas comment Auréli perçoit l’histoire du virus. Elle a compris qu’il se passe quelque chose, mais elle ne comprend pas pourquoi elle est impactée."

"On a mis des années à la faire arriver à communiquer. Depuis peu elle réclame d’elle-même à aller dans des magasins, par des pictos. Et là elle ne comprend pas, pour quelle raison on lui refuse. Elle m’a brandi le picto Aide-moi", explique Magali.

Sur sa page Facebook, l’association Pas à Part poursuit sa mission d’accompagnement des familles. Elle les met également en lien avec d’autres associations pour toutes les questions logistiques, comme le ravitaillement, les rendez-vous chez le médecin, ou autre.L'association propose aussi des liens vers des plateformes téléphoniques d'aide aux familles,comme Tous mobilisés, gérée par la Fédération Nationale Grandir Ensemble, sous l'égide du Secrétariat d'Etat aux Personnes Handicapées. 0 805 035 800

Les internes du Pôle de Psychiatrie Pédopsychiatrie et Addictologie dirigé par le Pr Da Fonseca ont aussi mis à disposition des usagers cinq guides et une bande dessinée permettant de bien appréhender le confinement sur le site Internet des Hôpitaux Universitaires de Marseille.

Depuis le début de la crise épidémique, la ligne téléphonique "Autisme Info Service" (0800.71.40.40), lancée il y a un an, a reçu quatre fois plus d'appels qu'à l'accoutumée. 

Pour répondre aux inquiétudes des associations, Emmanuel Macron a annoncé jeudi, dans un message vidéo, un aménagement des règles de confinement pour les personnes autistes.

Elles seront autorisées à sortir "un peu plus souvent" pour se rendre sur des lieux "porteurs de repères rassurants", a indiqué le chef de l'Etat.
 
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