Fichier des malades Covid et des cas contacts : un généraliste de Marseille révolté, "je suis médecin, pas flic"

Alors que le déconfinement débute lundi, les autorités craignent une nouvelle vague. Elles demandent aux médecins généralistes d'entrer dans un fichier les coordonnées des personnes contaminées au Covid-19 et celles de leurs contacts. Certains praticiens dénoncent un précédent très dangereux. 

La mise en place d'une base de données permettant d’identifier les malades et les personnes en contact est-elle compatible avec le secret médical ?

La réponse est clairement non pour ce jeune médecin généraliste de Marseille. Sur sa page "Karim Doc révolté", il dénonce les mesures du gouvernement pour rompre les chaînes de contamination alors que le déconfinement débute lundi. 

A partir lundi, si vous êtes testé positif au Covid-19, le médecin qui vous reçoit devra enregistrer toutes les informations vous concernant ainsi que les personnes ayant eu un contact avec vous dans les 48 heures précédant l’apparition des premiers symptômes.

Une brèche dans le secret médical

"On nous demande de recenser toutes les personnes qui vivent avec vous et tous les cas contact avec leurs coordonnées et leur adresse pour faire les faire remonter à l'Assurance maladie afin qu'elle leur envoie une brigade sanitaire. Je suis médecin, je suis pas flic", s'insurge Karim Khelfaoui. Le 7 mai dernier, le ministre de la Santé, Olivier Véran, avait détaillé la procédure prévue. "Si votre test est positif, votre médecin alertera l'Assurance Maladie qui vous contactera et commencera avec vous une enquête afin d'identifier les personnes que vous auriez pu contaminer autour de vous sans le savoir de manière à ce qu'on puisse les appeler, ces personnes sont désignées "cas contacts".

La loi précise que le recueil de ces données doit se faire avec le consentement du patient.  

L'absence de cadre légal inquiète les médecins

Le Conseil national de l'Ordre des Médecins demande des garde-fous. Il exige du gouvernement de "garantir que les médecins n’aient en aucun cas à transmettre de données médicales à une plateforme, mais uniquement une donnée d’identification, pour éviter la constitution de fichiers de malades qui contiendraient des données médicales."

"Tout partage de données médicales de leurs patients serait absolument inacceptable pour les médecins," insiste-t-il.  Pierre Jouan, président du Conseil régional de l’Ordre des Médecins, s'inquiète lui aussi de l'absence d'un cadre qui précise à qui seront communiquées ces données et qui limite le dispositif dans le temps.

"Il y a toujours de bonnes intentions derrière, mais de dérogation en dérogation, on risque d'avoir un secret médical qui se réduit comme peau de chagrin", souligne-t-il.

Un télé-déclaratif opérationnel le 11 mai

La Confédération des Syndicats Médicaux Français (CSMF) soutient ce traçage opérationnel dès le 11 mai pour éviter une deuxième vague.

C'est indispensable, on ne peut combattre une maladie si l'épidémie continue à se répandre.

estime le docteur Eric Senbel, le secrétaire régional de la CSMF.

"On espère que les patients adhèreront massivement parce que c'est quand même pour protéger les Français que ces mesures sont mises en place. Et même si elles ont l'air d'être un petit peu autoritaires, elles sont probablement nécéessaires". 

Ce qui n'empêchera pas le syndicat d'être "attentif quand même à ce que ça ne soit pas une dérive en terme de prise en charge des patients". 

De son côté, l'Assurance Maladie se veut rassurante par la voie de son directeur général Nicolas Revel. Interrogé sur France Inter, il explique comment le secret médical sera préservé. L'Assemblée nationale a validé vendredi soir la création de ce "système d'information" pour identifier les personnes infectées par le coronavirus et leurs contacts.
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