Le pouvoir d'achat immobilier des français a chuté dans les plus grandes villes, en raison de la hausse des taux de crédit. A Marseille, les acheteurs ont perdu 7 m2 en un an, d'après l'étude de Meilleurtaux, société en courtage, publiée ce mardi 2 janvier. Un spécialiste de l'immobilier, contacté par la rédaction, nous explique les raisons de cette crise et de quelles façons elles impactent le marché.
En seulement un an, le pouvoir d'achat immobilier à Marseille a chuté de 7 m2. C'est l'étude publiée par Meilleurtaux, ce mardi 2 janvier, qui dresse ce constat. La société de courtage affirme également que la cité phocéenne a perdu 24 m2 de pouvoir d'achat immobilier en quatre ans.
Olivier Chartier, directeur de Pardo & Chartier immobilier, agence immobilière située dans le 12e arrondissement de Marseille nous explique les raisons de cette crise du logement.
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Comment on en est arrivés là ?
"La situation n'est pas simple", nous confie Olivier Chartier. Et cette flambée des prix remonte au moins à 2018. Plusieurs éléments sont à prendre en compte. À l'époque, le système bancaire a favorisé la création et le développement d'une bulle inflationniste sur les biens immobiliers en accordant des prêts à des taux dérisoires, "moins de 1 % dans certains cas".
Puis à la sortie du Covid, vers 2020-2021, il y a eu une "sorte de frénésie d'achat de la population à fort pouvoir d'achat". Maisons en bord de mer, résidences à la campagne... Les Français ont voulu acquérir des biens secondaires. Et pour notre expert, cela a "renforcé la hausse des prix sur les zones côtières, comme sur les zones rurales". Et pas seulement, ce mécanisme, selon lui, a aussi eu des "effets sociaux très négatifs, car il bloque l'accession à la propriété et à la location des populations locales et favorise l'habitat touristique au détriment de l'habitat secondaire".
Puis, à partir de 2022, la France est rentrée dans une période d'inflation. "La guerre en Ukraine est à l’origine d’une forte inflation en Europe", précise l'agent immobilier.
Dès le troisième semestre 2022, selon l'expert, "les banques ont volontairement diminué leur volume d'octroi des prêts immobiliers, estimant que cela ne leur était plus nécessaire pour assurer leur croissance". Elles exigeaient des niveaux d'apport parfois de 25 %. "Pas possible pour les primo-accédants, ils n'ont pas pu se porter acquéreurs."
Parallèlement, les taux d'intérêt, ont considérablement augmenté, passant de "1 % à 4,50 %, soit une augmentation de 350 %" en quelques mois. Olivier Chartier affirme que la capacité d'emprunt des ménages a donc diminué de plus de 15 %.
Dans les derniers trimestres de 2022 - 2023, le blocage du marché se met en place. "Seuls les ménages à haut pouvoir d’épargne et hauts revenus sont en capacité d’acheter", alors, d'après l'agent immobilier, "ils ne négocient pas ou peu".
Résultat, les prix ne baissent pas, et augmentent parfois dans certaines villes. Comme c'est le cas à Marseille, même si l'augmentation est faible.
Les primo-accédants ne se positionnent alors plus sur le marché. "Ils ne peuvent plus emprunter et donc les vendeurs ne mettent pas en vente non plus", donc "beaucoup de biens ne sont pas allés sur le marché".
En partie à cause de la guerre en Ukraine, les matières premières ont augmenté. "Le marché du neuf subit de plein fouet la hausse des coûts de constructions et ne réussissent plus à vendre leurs programmes de moyen de gamme."
Quelles sont les conséquences ?
"L'offre n'étant pas abondante, les prix n'ont pas baissé", explique Olivier Chartier. Il précise également qu'avant la crise, plus de 60 % des ménages marseillais pouvaient acheter leur résidence principale. Ils ne sont plus que 24 % aujourd'hui.
Selon l'expert, cela pose un gros problème que le marché du neuf soit bloqué. Cela ne va "qu'accroître la disparition d'entreprises du bâtiment, dont nous aurons besoin pour mettre en œuvre la loi "Climat"".
Plusieurs conséquences à cela. D'après lui, "un grand nombre d’agences immobilières vont devoir déposer le bilan" et "le chômage risque d’augmenter dans les six mois à venir".
Quelles sont les pistes pour enrayer le phénomène ?
Olivier Chartier propose une solution pour fluidifier à nouveau le marché : l'obtention d'un certificat de solvabilité, une inspiration des Etats-Unis. Le futur acquéreur obtiendra un certificat de solvabilité, déterminant sa réelle capacité d'emprunt, soit son budget global, dès le début de sa recherche. Il se le procurera auprès d'un établissement bancaire ou d'un courtier.
L'acquéreur, après avoir trouvé un bien qui lui convient, pourra déposer son dossier auprès des banques, par le biais d'un courtier.
Si le prêt est systématiquement refusé, il sera remonté pour "une étude de contrôle" auprès de la Banque de France. Si le dossier est finançable selon les règles en vigueur, "un tirage au sort détermine la banque qui devra accepter le prêt, et subira une pénalité pour refus de vente".