INTERVIEW. Fusillades meurtrières : "Il y a une particularité à Marseille car les trafics ont lieu dans la ville" analyse un criminologue

Jean-Baptiste Perrier, professeur de droit privé et de sciences criminelles à l'université d'Aix-Marseille, rappelle que les trafics de drogue sont historiques à Marseille, ville portuaire et donc ouverte sur le monde.

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En Europe, la violence liée aux trafics de drogue se concentre dans des ports comme Marseille dans le Sud de la France, Anvers en Belgique ou Rotterdam aux Pays-Bas, ce qui est relativement nouveau, analyse Jean-Baptiste Perrier, professeur de droit privé et de sciences criminelles à l'université d'Aix-Marseille.

Pourquoi la ville de Marseille est-elle associée depuis des années au trafic de drogue ?

Marseille est un port ouvert sur le monde et donc sur les trafics, quels qu'ils soient. Dès le début du XXe siècle, la ville était un point d'étape sur la route de l'opium qui venait du Moyen-Orient pour aller vers les Etats-Unis, c'est le début de la French Connection, cette filière française de l'héroïne. Aujourd'hui, il ne s'agit plus d'héroïne mais du haschisch, qui vient plutôt d'Afrique du Nord, ou de cocaïne.

Il faut donc comprendre que le trafic à Marseille est ancien et il y est devenu une activité commerciale en quelque sorte. On remarque d'ailleurs que les trafiquants se sont adaptés en reprenant les codes du commerce licite : pendant le Covid, ils ont développé le click and collect, la livraison avec ce qu'on appelle "Uber shit". lls affichent les prix, font des de cartes de fidélité, recrutent des intérimaires qui viennent faire des jobs d'été.

L'an dernier, une trentaine de personnes, jeunes pour la plupart, sont mortes à Marseille sur fond de trafic de drogues. Depuis janvier, il y a déjà une quinzaine de morts. Cette ville est-elle une exception en Europe ?

En France déjà, il y a une particularité marseillaise car les trafics ont lieu dans la ville. Dans l'agglomération lyonnaise ou parisienne, on a aussi des règlements de comptes mais ils sont plus disséminés.

En Europe, on a des faits de violence assez graves dans le Nord, c'est assez nouveau. Avant, on les trouvait plutôt dans les pays du Sud parce que c'est par là que transitent les stupéfiants, en Espagne ou en Italie par exemple. Récemment les villes où il y a eu des règlements de comptes sont Anvers (Belgique), Rotterdam (Pays-Bas), des ports, comme Marseille, des lieux d'échanges commerciaux qu'ils soient illicites et licites. Le trafic de stupéfiants est tellement lucratif, qu'on a une escalade de la violence.

La procureure de Marseille craint une "mexicanisation" des réseaux, qu'en pensez-vous ?

Les cartels mexicains sont extrêmement violents et il y a une impunité : les faits sont commis et se répètent, sans toujours de recherche active des auteurs. Alors qu'en France, il y a une vraie volonté de lutte active, des enquêteurs qui font un travail conséquent pour remonter les filières, les auteurs de règlements de comptes sont régulièrement arrêtés. Il y a un taux d'élucidation qui a fortement augmenté à Marseille.

Mais les méthodes et les moyens que l'on met ne sont pas suffisants pour endiguer le phénomène. On voit une augmentation régulière de ces trafics. En 2016, on a eu un nombre record de morts, en 2022 un chiffre équivalent. Je ne sais pas où est le point de bascule vers une criminalité hors de contrôle, il n'est pas pertinent d'attendre de l'atteindre.

(avec AFP)

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