Non-annonces, désaccords, rapport critique de la Cour des comptes, problématiques de financement, retard incommensurable : voici cinq points qui illustrent le flou autour du volet transport du plan Marseille en grand.
Marseille : deuxième ville de France, deux lignes de métro. Cette seule phrase résume l'immense dossier du transport, posé sur la table du fameux plan Marseille en grand annoncé par Emmanuel Macron le 2 septembre 2021. Un immense défi, encore flou. Voici pourquoi.
Fausses nouvelles annonces
Effet communication. Rattraper les retards immenses de la cité phocéenne en termes d'école, de logement, de santé ou encore de transport est un défi sans nom. Difficile de croire au respect des délais et des promesses. Alors pour les politiques locaux, le maître-mot est de rassurer. C'est ce qu'ont tenté de faire le maire de Marseille, Benoît Payan, la présidente de la Métropole, Martine Vassal et la secrétaire d'État chargée de la Citoyenneté et de la Ville, Sabrina Agresti-Roubache. Ils se sont réunis, avec d'autres acteurs, jeudi 14 mars 2024 dans le cadre du GIP : le groupement d'intérêt public Aix-Marseille-Provence Mobilités. La presse a été conviée, mais les annonces faites n'en étaient pas vraiment. Cinq ? Sept ? Huit ? La présidente de la Métropole s'emmêle les pinceaux. "On va vous donner un tableau précis" annonce-t-elle quant aux projets qui doivent se concrétiser en 2025. Ces derniers, considérés comme l'annonce du jour, ont déjà été abordés en 2022. Depuis deux ans, il est question de 15 projets, répartis presque à moitié : l'une prévue pour 2025 et l'autre pour 2030.
Cette réunion a surtout permis de faire le point sur les travaux en cours et sur les projets en cours de réflexion.
Des désaccords
Encore faut-il se mettre d'accord. Lors de ce micro-tendu, les trois élus sont revenus sur leurs désaccords et se sont félicités d'avoir trouvé un terrain d'entente. "Je ne suis pas venu pour faire la bagarre. Quand on est content, on le dit et quand on n’est pas content, on le dit aussi", sourit le maire de la ville. "On n'a pas fini de travailler sur le tramway des Catalans par exemple. Et alors ? On va pouvoir le délivrer, c'est ça le principal", tient-il à nuancer. "Évidemment qu'on peut avoir des différences et des caractères compliqués, on n'a pas la même conception des choses, mais sur certains sujets, on y arrive", s'est-il réjouit. L'un des points de discorde : la question des priorités. "Moi, en tant que maire de Marseille, la présidente de la Métropole le sait, ce sont d’abord et avant tout les projets Marseillais qui m’intéressent", a rappelé Benoît Payan. Elle répond, quelques minutes plus tard : "la première priorité de la Métropole, depuis 2015, depuis que je suis élue d’ailleurs (…), c’est de faire de la priorité numéro un, excusez-moi monsieur le maire pour les écoles, mais pour nous c'est la mobilité." Sabrina Agresti-Roubache conclut : "on a le droit de ne pas être d'accord sur un tracé, sur un choix d'école mais on n'a pas le droit d'abandonner les projets financés très massivement par l'État".
Un rapport critique de la Cour des comptes
Ce point presse intervient une semaine après la fuite, dans la presse, et plus précisément dans les colonnes de nos confrères de Marsactu, d'un rapport critique de la Cour des comptes. Ce rapport d'évaluation du plan Marseille en grand, en est à sa version provisoire. D'ores-et-déjà, les conclusions des magistrats financiers sont qualifiées de "sévères" par nos confrères. Des critiques semblent faites à la gestion de ce projet et à son approximation. Des faiblesses sont relevées. Mais ce rapport ne paraîtra au grand public que dans quelques mois : le temps pour les services de l'État et les collectivités concernées d'y répondre.
Vaste question du financement
Le plan Marseille en grand est budgétisé à hauteur cinq milliards d'euros. Et puis il faut répartir entre les différentes catégories. La présidente de la Métropole avait demandé à l'État plus d'argent pour le volet transports. Interrogée à ce sujet, elle répond aux médias : "ce n'est plus un problème l'argent. Aujourd'hui, il nous a été donné par l'État et après, c'est à nous de le dépenser. Moi, quand on me donne un milliard, je dis merci. J'en avais demandé trois, pour tout vous dire. J'en ai obtenu un, je prends, je dépense vite, et après j'en demanderai un autre." Martine Vassale ajoute : "je crois que les habitants de cette Métropole n’en ont rien à faire de savoir qui fait quoi. Ce qu’ils veulent, c’est que ce soit fait maintenant et qu’ils puissent laisser leur voiture au garage pour prendre les transports en commun en quinze minutes et se rendre d’un point A à un point B : c’est notre objectif."
Un retard incommensurable
Les travaux ont bel et bien avancé dans différents endroits, comme peuvent le constater les Marseillais aux abords de la place Castellane par exemple, ou encore les Aubagnais au niveau du projet "Valtram". Mais l'ambition est immense. Benoît Payan reconnaît : "on avait, et on a encore, vingt ans de retard sur la question des transports. Nous sommes ici dans un dépôt, celui de la Rose, où un métro a été inauguré quand je n’étais pas encore né, en 1977, par Gaston Defferre. Depuis, plus rien." Et d'assurer : "c'est la ville la plus polluée du pays, on fait cinq fois Lyon et on a deux lignes de métro, on avait un retard qui n'était pas acceptable et donc on va rattraper, on va rattraper, on va rattraper". Pour ce qui est du calendrier, Martine Vassale promet : "on le dit tous les trois : on trouve que c’est trop long et trop embêtant. (…) On aimerait aller encore plus vite, mais il y a des délais techniques qui sont incompressibles."
S'il y a une avancée à noter : c'est celle des réunions, qui seront plus régulières. Ce GIP devait se réunir tous les dix-huit mois. Finalement, ce sera tous les trois mois, ont annoncé les trois élus ce jeudi 14 mars. Une façon de suivre de plus près, l'avancée concrète de cet immense chantier.