1,5 milliard d’euros : la dette abyssale de la ville de Marseille vue, vécue, commentée par deux adjoints aux finances

La dette de la ville de Marseille pèse lourd. Le nouvel adjoint aux finances la porte sur ses épaules, son prédécesseur en a fait de même. Dans leur profession, l'un travaille avec les chiffres, l'autre avec les articles de droit. Tous deux nous parlent de la dette. Abyssale.

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On a peu l'habitude de lire ces nombres à dix chiffres : 1.540.000.000 euros, c'est la dette de la ville de Marseille, 1,540 milliard d’euros. Le budget de la ville de Marseille s’élève à 1,560 milliard d’euros. Inutile d’être un grand mathématicien pour comprendre que cette dette est énorme.

Elle pèse sur tous les adjoints et en particulier sur Joël Canicave. "On ne s’attaque pas à la dette on la subit", rectifie l'élu. L’adjoint aux finances de la ville de Marseille est aussi professeur de mathématiques. Lorsqu’il parle de milliards et de millions, il reste très posé. 

"C’est quelque chose qui est devant nous et qu’il faut rembourser. On compte sur tout. Sur les recettes, sur les économies dans les dépenses, mais on n’a pas vocation à devenir des gestionnaires rigoureux uniquement. On va l’être mais on n’a pas été élus pour ça. On a été élus pour changer cette ville."

Quand la mairie a besoin d’argent, elle fait à peu près la même chose qu’une personne ou un foyer : elle demande de l'argent à la banque. Marseille emprunte ainsi à une dizaine d’organismes : huit banques, la Caisse des dépots et consignations et la SFIL, une banque publique.

Le mur de la dette

Un nom qui fait trembler. Cette année, la ville se retrouve devant "le mur de la dette". C’est le pic de remboursement d’un emprunt.

En langage chiffré, la ville remboursait 175 millions par an entre 2014 et 2020. Elle passe à 200 millions d’euros par an entre 2021 et 2024.

En 2017, la Chambre régionale et territoriale des comptes avait alerté la municipalité à ce sujet.

"Ça m’impressionne quand même un peu parce que ce sont des chiffres avec lesquels on n’a pas forcément l’habitude de jongler tous les jours, mais on le savait" reconnaît Joël Canicave "Ce qu’on a découvert, c’est l’amplitude des choses (…) Pour le début du mandat, ça nous limite dans notre volonté de changer rapidement les choses."

Marseille, 2e ville de France, 863.000 habitants dispose de la même capacité d’investissement que la ville d’Allauch, 21.500 habitants.

Une personne surendettée ne peut pas faire un grand-chose. Une ville non plus. La mission est ardue pour l'élu chargé des finances. Pourtant, aucun super-financier, aucun économiste de génie ne sera embauché.

Il travaille déjà avec 150 collaborateurs. Un tout petit service, d’environ cinq personnes, est entièrement consacré à la dette.

Adjoint aux finances sous Jean-Claude Gaudin

Il s’appelle Roland Blum. Nous avons à faire à un littéraire cette fois, avocat spécialisé dans la construction.

Conseiller municipal à Marseille depuis 1983, il est nommé aux finances en 2014. Aujourd’hui retiré de la politique, il estime que "l’on parle beaucoup de la dette" depuis quelques mois. Le travail de l’équipe de Jean-Claude Gaudin pendant 25 ans est vivement critiqué. Il se défend.

"La dette à Marseille est historique. Quand Monsieur Gaudin est arrivé aux responsabilités en 1995, elle était de deux milliards d’euros." démontre Roland Blum "Aujourd’hui, elle est d’1,5 milliard, c’est dire que nous l’avons diminuée de 500 millions. Ces derniers temps, nous avons même fait un effort particulier. En deux exercices, nous avons pu la diminuer de 270 millions d’euros."

Avant de rencontrer ces deux adjoints, nous avions précisé notre volonté de réaliser un article pédagogique et non polémique. Mais Roland Blum n’a pas pu s’en empêcher.

"A propos de cette dette, il y a une polémique qui me paraît totalement injustifiée, qui en réalité masque la volonté du nouveau pouvoir municipal d’augmenter massivement les impôts pour les Marseillais", lâche l'homme politique.  

Les impôts ! Le mot est lâché. On se souviendra du tweet du maire Benoît Payan le 27 mars assurant que les impôts n'augmenteraient pas.

"La réponse sera donnée lors des prochains conseils municipaux", répond Joël Canicave, toujours aussi stoïque. Premiers éléments de réponse le 2 avril, pour le vote du budget primitif.

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