A Marseille, l’association pour la recherche et l’archivage de la mémoire arménienne (ARAM) collecte tous documents sur les Arméniens d’Anatolie, avant, pendant et après les massacres ottomans de 1894-96 et 1909 et le génocide de 1915. Un travail de mémoire unique en France.
A Marseille, l’association ARAM (Association pour la recherche et l’archivage du génocide de la mémoire arménienne) collecte des livres, manuscrits, témoignages, photographies ou tout document sur les Arméniens d’Anatolie avant, pendant et après les massacres ottomans de 1894-96 et 1909 et le génocide de 1915.
Chaque année, les Arméniens du monde entier rendent hommage aux victimes du 24 avril 1915. Pour la première fois, la France commémore officiellement, mercredi, le génocide arménien.
Les Arméniens estiment qu'un million et demi des leurs ont été tués de manière systématique par les troupes de l'Empire ottoman pendant la Première Guerre mondiale.
Ce 10 avril, au siège de l'association ARAM, des bénévoles analysent un lot d’une soixantaine de passeports issus d’une donation. Ils sont recoupés avec les registres du camp Oddo, afin de retracer le parcours des familles arméniennes rescapées du génocide de 1915.
"Ces deux registres, qui comptent 5000 personnes entre 1922 et 1927, nous les avons mis sur une base Excel, explique Astrid Artin-Loussikian", vice-présidente de l'ARAM.
Situé dans les quartiers Nord de Marseille, ce camp était un ancien site militaire de la première guerre mondiale. De novembre 1922 à avril 1927, il a été l'un des lieux d'accueil des réfugiés arméniens à la suite de leur arrivée massive à Marseille.
Conçu pour accueillir quelques centaines de familles, au final 5441 réfugiés arméniens y passeront.
De New-York à Lyon à la recherche d'un proche
"Toute personne, qu’elle soit à Lyon, New York ou Marseille peut, en passant par notre site, peut retrouver ses ancêtres : un grand-père ou un père passé par le camp"."Par exemple nous avons une personne aux États-Unis qui vient de nous laisser un message il y a deux jours en disant qu’elle était très heureuse d’apprendre que ses deux grands-parents étaient passés par le camp Oddo; au cours d’un prochain voyage en France, elle viendra chez Aram pour voir le registre de visu. Car c’est tellement plus émouvant de voir un nom à l’encre que d’avoir un fichier numérique !"
Des vinyles aux Bibles
L'association pour la recherche et l'archivage de la mémoire arménienne a été créée en 1998, à l’initiative de Jean Garbis Artin-Loussikian, père d’Astrid Artin-Loussikian, aujourd'hui disparu. Il était très attaché à ce devoir de transmission. La collecte d'archives en lien avec l’histoire de la diaspora arménienne passe aussi par la numérisation d'archives, dont des anciens vinyles.
"On découvre ce qu'a été la poésie, la musique, la liturgie, on découvre ce qu'ont été les chants religieux qui sont d'une beauté magnifique", explique Patrick Tcharbatchian
Autre travail de mémoire, un peu plus loin. Dans un petit atelier, Maryse Keusseyan restaure chaque année une cinquantaine de livres. Ecrits en arménien, ils arrivent souvent en piteux état. Patiemment après les avoir débrochés, elle les recoud page après page.
"Quand une langue d’un peuple est parlée, lue, et écrite, ce peuple ne meurt jamais", explique-t-elle.
Un fonds unique en France, accessible à tous
"Comme c’était un peuple chrétien, la première chose qu’ils emportaient avec eux , c’était la Bible. Donc les très vieux livres c’est ça en général", détaille-t-elle.Au fil des ans, l’association a numérisé des milliers de documents. Aujourd’hui, ce fonds unique en France, est gratuitement accessible à tous.
En janvier 2001, la France a été le premier grand pays européen à reconnaître officiellement le génocide des Arméniens de l’Empire ottoman. Pour la première fois cette année, ces commémorations font l'objet d'une journée nationale, inscrite au calendrier.
Encore aujourd'hui, des cérémonies commémoratives du camp Oddo et du génocide arménien ont lieu à Marseille les 24 avrils.