À Marseille, les croisiéristes renforcent leurs engagements contre la pollution de l'air

Les armateurs de croisière et les pouvoirs publics ont signé jeudi 17 octobre la Charte bleue, afin d’améliorer la qualité de l’air autour des bassins du Port Marseille-Fos, anticipant des évolutions réglementaires plus ambitieuses.
 

En attendant que l’air soit plus propre, à Marseille, le monde de la croisière commence déjà par laver son image.

Objets de vives critiques quant à son impact environnemental et sanitaire - 15% de la pollution atmosphérique due au transport maritime-, les principaux armateurs de croisière se sont engagés ce jeudi 17 octobre à rendre leur activité plus vertueuse, en paraphant la Charte bleue, portée par le Club de la croisière Marseille Provence et le Port de Marseille Fos.


Outre ses deux initiateurs, cette charte associe Costa Cruises, MSC Croisières, Royal Caribean Cruises Limited, Ponant – soit 85% des escales annuelles-, le ministère de la transition écologique et solidaire, la Région Sud et la Métropole Aix-Marseille-Provence.

Le but affiché : "se mobiliser en faveur d’une diminution significative des polluants atmosphériques". Comment, concrètement ? Tout d’abord, en limitant la vitesse de navigation à 10 noeuds. Mais surtout, en développant des alternatives ambitieuses.

Objectif : 100% d'électrification

Première d'entre elles : l’électrification à quai, comme cela commence à se généraliser au niveau des ferries. Depuis 2017, les trois navires de la compagnie La Méridionale peuvent se brancher à quai, afin de ne pas utiliser de fioul marin et ainsi de limiter les émissions. Début 2019, Corsica Linea a commencé à emboîter le pas, avec un navire équipé d’un système de raccordement.

Pour ce qui est des paquebots de croisière, la perspective marseillaise vise une électrification "dès la saison 2024 de deux navires à quai en simultané".

Une annonce dans la lignée de celle de Renaud Muselier, le président de la Région Sud, qui en juin dans son plan "Escales zéro fumée", ciblait l’objectif de 100% d’électrification des bateaux de croisière dans les ports régionaux, à l’horizon 2025.  

D’ici 2024, le Port de Marseille-Fos a également engagé 20 millions d’euros, afin d’électrifier ses quais. S’il "se félicite de la bonne volonté des croisiéristes", Richard Hardouin, de France nature environnement 13, propose que d’autres pistes, plus rapidement réalisables, soient étudiées par le Port de Marseille-Fos.

"L’installation de la boucle d’alimentation électrique au sein du port nécessite des travaux très importants du point de vue du génie civil, explique-t-il. On pourrait réfléchir à des moyens d’électrification intermédiaires, avec des générateurs mobiles au gaz naturel liquéfié, comme la compagnie de La Méridionale l’a déjà fait à Ajaccio."

Un carburant moins polluant

Autre piste envisagée par les signataires de la Charte bleue : "s’obliger à manœuvrer, dès l’entrée dans la zone de régulation du port de Marseille Fos" avec du carburant dont la teneur en soufre ne dépasse pas 0,1%.
Une obligation qui dans les ports de la zone Manche- Mer du Nord-Baltique ne dépend pas du bon vouloir des armateurs. Classifiée en zone d’émissions contrôlées (dite zone ECA), contrairement à la Méditerranée, la réglementation interdit d’utiliser du fioul marin avec plus de 0,1% de soufre.

En Méditerranée, le seuil règlementaire est aujourd’hui de 0,5%. Ainsi, les engagements de la Charte bleue vont plus loin que la réglementation en vigueur. Jean-François Suhas, président du club de croisières Marseille Provence, insiste sur la volonté de "faire contrôler" les engagements "par un pouvoir de police". "

Des contrôles avec publication des résultats en ligne ont été annoncés par l'Etat", confie Richar Hardouin, de FNE 13. En réalité, des sanctions ne peuvent être prises qu’envers les bateaux circulant avec du fioul à plus de 0,5% de soufre.

Je ne doute pas que les croisiéristes respecteront leur engagement.

Mais Richard Hardouin, de FNE 13, "ne doute pas que les croisiéristes respecteront tout de même leur engagement de 0,1%, car si un contrôle prouvait le contraire, ce serait un désastre pour eux en terme d’image".

"Compétition au plus vertueux"

Le responsable de l’association environnementale se veut encourageant sur la posture des compagnies de croisières, "en compétition entre elles pour avoir les bateaux les plus vertueux".

Outre l’électrification, les signataires de la charte s’engagent aussi à développer leur approvisionnement en gaz naturel liquéfié.

"D’ici 2021, on estime qu’à peu près 150 escales de navires devraient être au gaz naturel, explique Hervé Martel, président du directoire du Port. Il n’y aura pas besoin de les brancher à quai car ils n’émettent pas du tout de particules, quasiment pas d'oxydes de soufre (SOx) ni d'oxydes d’azote (NOx)."

Présenté comme une filière d’avenir pour des carburants plus propres, une étude de l’ONG Transport & Environment publiée en septembre, mettait toutefois en évidence que le GNL restait émetteur de SOx et de NOx -  jusqu’à 5 fois plus que le diesel -, contrairement à ce qu’annonçait l’industrie du transport routier. Le fioul utilisé dans les navires est toutefois beaucoup plus polluant le diesel routier.

Pour le moment, la législation reste à quai

Quoi qu’il en soit, Richard Hardouin salue "le brainstorming des croisiéristes". Il espère que ce volontarisme entraînera les autres secteurs du trafic maritime à s’engager autant. "La simultanéité des engagements pris, il n’y a aucun autre port dans le monde qui n’a été en mesure de le proposer", assure Jean-François Suhas.

Une des priorités de FNE reste toutefois la création d’une zone d’émissions contrôlées en Méditerranée par l’Organisation maritime internationale (OMI), qui ferait des engagements des armateurs de croisière, la règle pour tous les navires.
 
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