Des parents d’élèves ont bloqué le collège Jean Giono à Marseille (13e) . Ils dénoncent le manque de personnels dans cet établissement classé en réseau d’éducation prioritaire. Et pour pousser l’académie à réagir : ils ont publié des offres d’emplois avec succès.
"Yl y a une gérante de salon de coiffure, elle candidate sur le poste d’assistante de direction et une jeune femme qui a fait des études sociales pour le poste de CPE", explique Laetitia Bacon qui consulte ses mails. Cette mère d’une collégienne de 11 ans, fait partie des parents exaspérés qui ont décidé de recruter le personnel manquant.
"Nous recrutons un conseiller principal d’éducation et trois assistants d’éducation à temps plein, ainsi qu’une aide au secrétariat de direction. Envoyez CV et lettre de motivation à mpegiono@gmail.com". Cette offre est placardée autour du collège Jean Giono et publiée sur les réseaux sociaux depuis quelques jours.
Une situation qui dure depuis 3 ans
"Cela fait trois ans que nous dénonçons cette situation. Ce n’est pas normal, on a été forcé de mener cette campagne de recrutement", déplore Laetitia Bacon. Un recrutement mais aussi un blocage ce matin de l’établissement.
Panneaux à la main, cette mère de famille empêche l’entrée aux élèves et aux enseignants. Comme elle, ils sont une vingtaine de parents rassemblés à 8h00, ce lundi 7 juin. Le motif de cette opération : convaincre.
Le collège ferme ses portes. Enseignants et personnels de la vie scolaire finissent d’ailleurs par rejoindre le mouvement. Au bout d’une heure, le collège ferme ses portes et les enfants rentrent chez eux.
Des adultes pour éviter les situations de harcèlement
Une action coup de poing qui ne fait pas sourire Séverine Gil, mère d’une élève de 5ème.
"Ce n’est pas normal d’en arriver là ! Un collège classé en zone d’éducation prioritaire doit avoir suffisamment de personnels. On demande la norme, rien d’autre, un taux d’encadrement suffisant ".
Cette mère de famille élue pour représenter les parents d’élèves siège dans les conseils de discipline et pour elle, pas de doute, le rôle des surveillants et du CPE sont fondamentaux.
"Il faut des adultes pour désamorcer les conflits, éviter les situations de harcèlement, et bien sûr être présents aux entrées chaque matin et dans les couloirs".
Ils ont oublié ce collège
Le collège jean Giono compte 640 élèves. En trois ans, les effectifs ont presque doublé. "L’académie nous avait promis des moyens, ils ont menti. Ils doivent admettre qu’ils ont oublié ce collège", ne décolère pas Séverine Gil.
Une situation qui inquiète d’autant plus, que deux nouvelles classes ouvriront l’année prochaine. L’établissement a été construit pour accueillir jusqu’à 750 enfants.
On ne veut pas d’un collège « ghetto »
Installé face au métro La Rose (13e), quartier populaire de Marseille, Jean Giono compte un nombre important de jeunes issus des cités voisines.
"Il est classé REP, Il y a une grande mixité sociale, beaucoup d’élèves sont boursiers. Si on ne veut pas qu’il se transforme en collège ghetto, il faut mettre des moyens", ajoute Laetitia Bacon.
Pour cette mère de famille, "il ne faut pas un, mais deux CPE et des surveillants supplémentaires. C’est ce que tous les autres établissements ont à taille égale ".
Des toilettes fermées en journée
Ce manque d’encadrants a des conséquences très concrètes au quotidien selon Laetitia : "Par exemple, les toilettes ne sont ouvertes qu’aux récréations. Et le collège c’est l’âge où les filles ont leurs premières règles, elles sont à chaque fois forcées d’expliquer leur situation. C’est compliqué".
Le personnel tente de pallier au manque d’effectifs.
Autre problème mis en avant : l’accueil des élèves en cas d’absence des enseignants, seule une classe de permanence est ouverte. Les autres adolescents restent dans la cour.
"Le personnel tente de pallier au manque d’effectifs mais pendant qu’un enseignant intervient dans un couloir, c’est un cours qui commence en retard", ajoute Laetitia Bacon. Enfin côté santé, il n’y a tout simplement aucune infirmière, c’est donc aux pompiers que l’établissement s’adresse pour gérer les problèmes.
On a eu l’impression qu’ils découvraient la situation
Ce blocage de l’entrée du collège et la publication d’offre d’emplois est une première pour ces parents qui ont tout essayé.
"Nous avons été reçus par la direction académique. On a eu l’impression qu’ils découvraient la situation. Ils nous ont dit qu’ils allaient y réfléchir. Mais nous, on ne veut plus qu’ils réfléchissent. On veut qu’ils agissent", s’agace Laetitia Bacon.
Une trentaine de candidats
En attendant, ce sont donc les parents qui recrutent : un CPE et trois surveillants. Et en quelques jours une trentaine de personnes a déjà candidaté aux postes proposés.
"Nous avons des profils intéressants, des personnes disponibles tout de suite. Nous allons les soumettre à l’Académie".
C’est d’ailleurs là-bas que les parents se sont rendus après avoir bloqué le Collège. Une opération qui va peut-être porter ses fruits. Contactée, l’inspection académique a annoncé qu’un arbitrage aura lieu le 18 juin prochain et aboutira peut-être à des recrutements.