Leur rentrée n'a duré qu'une journée. 24 élèves de moyenne section de l'école Amédée Autran (7e) à Marseille ont dû retourner chez eux ce mardi 27 avril. Leur maîtresse, absente, n'est pas remplacée. En raison du nouveau protocole sanitaire, ils n'ont pas pu être répartis dans les autres classes.
C'est une rentrée bien étrange qu'a vécu Colin, 4 ans, à Marseille. A la fin de sa journée de reprise, hier après-midi, après trois semaines de confinement, l'élève de moyenne section a appris qu'il ne pourrait plus retourner dans son école maternelle publique Amédée Autran (7e arrondissement).
"On l’a appris par la direction de l’école via un message envoyé à tous les parents vers 16h lundi", explique sa maman, Chloé, encore abasourdie. "On nous a dit qu'il n'y aurait plus d'école pour eux dès le lendemain", dit-elle.
En cause, le nouveau protocole sanitaire très strict, qui a été renforcé dans les écoles en cette nouvelle rentrée en pleine pandémie.
Comme leur maîtresse est malade depuis deux mois, Colin et ses camarades poursuivaient leur scolarité de façon répartie dans les autres classes "de façon très bien gérée par la direction de l'école", selon Chloé.
Interdiction de mélanger les classes
Or, depuis les nouvelles mesures, ces répartitions ne sont plus possibles. Pour éviter d'étendre les contaminations, il a été demandé aux enseignants de ne plus mélanger les classes.
"Dans les écoles, lorsqu'un enseignant absent ne peut, malgré le renforcement des moyens de remplacement, être immédiatement remplacé, les élèves ne peuvent en aucun cas être répartis dans les autres classes. L'accueil des élèves est alors suspendu dans l'attente de l'arrivée du professeur remplaçant", explique le ministère de l'Education nationale dans ses réponses aux questions sur les modalités de cette rentrée.
#COVID19 | Rentrée du 26 avril et du 3 mai, protocole sanitaire strict, dépistage renforcé : tout ce qu'il faut savoir ⤵️
— Ministère Éducation nationale, Jeunesse et Sports (@education_gouv) April 22, 2021
Les parents des 24 élèves n'en reviennent pas. "C’est du jour au lendemain, donc super compliqué de s’organiser", raconte Jeanne, maman d'Achille. "Hier soir jusqu'à 23 heures, on s'envoyait des messages avec les autres parents pour voir comment s'arranger", dit elle.
Les enfants sont eux aussi un peu perdus par cette reprise avortée. "Le simple fait de les avoir fait retourner à l’école une journée et repartir, c’est très dur. Les enfants ne comprennent rien... C'est tout le lien social, important en maternelle, qui est coupé à nouveau en cette année déjà bien particulière", ajoute Chloé.
Leur colère n'étonne pas Virginie Akliouat, secrétaire départementale du SNUipp 13, le syndicat des enseignants du premier degré.
"C'était prévisible que les parents soient en colère, car cette consigne n’a pas été annoncée par notre très courageux ministre de l’Education nationale lors de la conférence de presse jeudi dernier", explique-t-elle, amère.
Un manque d'anticipation
Virginie Akliouat regrette que "les directions d’écoles se retrouvent en porte à faux vis-à-vis des parents d’élèves maintenant, avec des consignes qui les mettent en difficulté et qu'ils n’ont pas pu anticiper…"
Le syndicat s'attend à de nombreuses fermetures de classes pour cette raison "tant le manque de personnels dans les écoles est criant", déplore-t-il.
Cela fait des mois et des mois qu’il n’y a plus de remplaçants disponibles, au point que certains sont enlevés de certaines écoles pour être mis ailleurs.
Jeudi dernier, le ministère de l'Education nationale a annoncé le recrutement de 5.000 personnels supplémentaires dans les écoles en France. Ce qui ne rassure pas pour autant la secrétaire du syndicat.
Des postes mais peu de candidats
Les campagnes de recrutement de personnel contractuel enseignant se multiplient, mais les candidats ne se pressent pas.
"Ce n’est pas étonnant, étant donné le niveau de rémunération, très faible, et la durée des contrats fixés jusqu’à fin mai. Cela correspond à la fin officielle de l’état d’urgence sanitaire, qui n'a pas été prolongé, donc encore une fois le ministère n'a rien anticipé", regrette l'enseignante.
De son côté, le rectorat d'Aix-Marseille dit suivre le protocole décidé au niveau national. Il pointe les problèmes "d'absentéisme liés au Covid" et dit mettre tout en oeuvre "pour recruter des contractuels pour pallier à cette situation "sur plusieurs écoles".
Un peu plus tard dans la journée, il indique qu'"une affectation est envisageable à partir de la semaine prochaine pour un complément les mardis et jeudis", dans le cadre de l'école Amédée Autran.
Système D en urgence
C'est déjà une petite bouffée d'air pour les parents de l'école maternelle marseillaise... Pour les jours à venir, ils se sont organisés comme ils ont pu en dernière minute. Certains ont posé des congés ou mis à contribution les grands parents. D'autres récupèrent plusieurs enfants et font des tours de garde entre adultes à la demi-journée.
Au programme : des sorties au parc, du football, des courses. "On les occupe tout en télétravaillant parfois !", sourit Chloé, qui s'interroge surtout pour les écoles dans les quartiers plus difficiles où certains n'ont peut-être pas les moyens de s’organiser.
Les parents des écoles impactées envisagent une action en famille ces prochains jours pour alerter l'opinion publique. Ils invitent d’autres parents concernés à s’associer à cette action. Pour sauver ce qu'il reste de cette année décidément inédite.