Trois responsables d'une "école clandestine" comparaissaient devant le tribunal correctionnel de Marseille, mercredi 6 novembre. L'établissement jugé, un temps, "salafiste" et avait été fermé en décembre 2018 pour non-conformité et travail dissimulé.
A l'issue de l'audience, mercredi soir, Le tribunal correctionnel de Marseille a reconnu coupables la directrice de l'établissement et son compagnon, président de l'association "Bulle de récré" gérant l'école, et a prononcé une peine de 2.500 euros d'amende avec sursis.
Il a, en revanche, relaxé la soeur de la directrice, secrétaire de l'association, estimant qu'elle ne participait pas de "manière active" à la vie de la structure.
Le centre, située dans le quartier du Canet, dans le 14e arrondissement de Marseille, accueillait 43 enfants âgés de trois à neuf ans, dont un tiers avait plus de six ans, l'âge où la scolarisation est obligatoire.
L'établissement, soupçonné d'être "une école salafiste", avait été fermé en décembre 2018. Jean-Michel Blanquer, ministre de l'Education nationale, avait lui-même annoncé "la fermeture d'une école clandestine". Une action rendue possible, grâce à la loi Gatel, voté durant l'été 2018.
Trois responsables de l'association "Ma bulle récré", qui gère le lieu, comparaissaient mercredi devant la 5e Chambre de la famille du tribunal correctionnel de Marseille. Ils étaient jugés pour "ouverture illégale d'un établissement d'enseignement privé". Un délit passible de 15.000 euros d'amende.
"Il n'est pas question de religion. Vous êtes certainement des gens très gentils, ce n'est pas le problème", a insisté à l'audience la présidente du tribunal. "Mais vous avez ouvert une école sans autorisation" a-t-elle insisté auprès des prévenus, d'origine comorienne, qui soutenaient jusqu'ici qu'il s'agissait uniquement de cours de soutien scolaire et non d'une école.
Un alphabet romain surmonté d'un alphabet arabe, des règles vie mentionnant qu'il faut écouter "la maîtresse ou l'élève qui parle", des cahiers de texte avec des devoirs et un emploi du temps détaillant les matières enseignées chaque jour avaient été retrouvés sur place, a rappelé la présidente du tribunal.
"C'était une école clandestine de fait, mais cela ne veut pas dire que les enfants étaient maltraités ou que l'enseignement était très mauvais, ce n'est pas le cas", a aussi souligné le parquet, qui avait requis 2.000 euros d'amende à l'encontre des deux principaux prévenus.
"On a l'impression au cours de cette audience qu'on a des gens dépassés par ce qui s'est passé", a ajouté le représentant du ministère public, Marc Hellier.
"Je reconnais que c'est une école, on s'est trompé, on a commis d'énormes erreurs", a reconnu pour la première fois le président de l'association, qui exerce le métier d'électricien.
"Il n'y a pas de manipulation ou de plan machiavélique pour transformer une école", a de son côté plaidé l'avocate des trois prévenus Sarah Cuzin-Tourham, estimant qu'il n'y avait "aucune preuve que les enfants étaient du matin au soir" au sein de l'établissement.
"On peut leur reprocher un certain amateurisme", a concédé l'avocate mais la directrice "ne voulait faire que du bien", a-t-elle ajouté.
Non-conformité et travail dissimulé
Le 4 décembre 2018, les services de l'Etat avaient organisé une visite de contrôle des lieux. Selon la préfecture de police, "les locaux ont été fermés pour cause de non-conformité à la réglementation régissant les établissements recevant du public et travail dissimulé". Des problèmes d'hygiène avaient notamment été constatés.Le rectorat Aix-Marseille avait indiqué à l'époque des faits, que les enfants étaient déclarés "sous le régime de la scolarisation à domicile". "Il y a eu un mensonge" sur la situation des enfants, selon l'administration.
Des soupçons de prosélytisme
Le rectorat Aix-Marseille avait saisi le procureur de la République, pour des "soupçons de prosélytisme" dans l'établissement. Une enquête pénale avait été ouverte. Mais aucun "éléments sur le caractère salafiste de l'établissement" n'ont pu être confirmés, selon la préfecture de police.Certains membres des familles des enfants scolarisés ont toutefois été identifiés au cours de l'enquête "comme déjà suivis au titre de la lutte contre la radicalisation", a précisé Olivier de Maizières, préfet de police des Bouches-du-Rhône, à 20 minutes.