Environ 250 supporters du LOSC devaient se déplacer ce samedi 4 novembre au Vélodrome pour le compte de la 11e journée de championnat de Ligue 1 de football. Après les incidents d'OM-OL du 29 octobre, le ministère de l'Intérieur a finalement interdit le déplacement des Lillois ce vendredi 3 novembre.
Il n'y aura finalement pas de supporters lillois à Marseille samedi 4 novembre. C'est du moins l'intention du ministère de l'Intérieur. Presque une semaine après les incidents ayant précédé la rencontre OM-OL du dimanche 29 octobre, un arrêté est venu interdire le déplacement des supporters du LOSC. Pourtant, quelques heures avant, les dirigeants du club nordique avaient reçu l'assurance d'un dispositif de sécurité renforcé permettant l'accueil des bus en toute sécurité.
France 3 Provence-Alpes décortique ce revirement soudain.
Pourquoi le déplacement est-il finalement interdit ?
En début de semaine, le président du club lillois écrit à la préfète de police des Bouches-du-Rhône pour exprimer ses inquiétudes concernant la sécurité de la délégation lilloise pour cette rencontre après les évènements du week-end précédent. À ce moment-là, il n'est pas question pour la préfecture d'interdire la venue des 250 supporters du LOSC. Olivier Létang envisage alors de repousser le déplacement de ses joueurs dans la cité phocéenne. "J'attends les mesures qui seront prises et l'assurance de la protection de notre délégation et de nos supporters avant de confirmer notre déplacement", expliquait-il.
Jeudi 2 novembre, à 20h39, le club lillois publie un communiqué sur son site officiel qui confirme le déplacement des supporters et de l'équipe et précise le contenu des mesures renforcées par la préfecture des Bouches-du-Rhône pour cette rencontre.
Mais voilà, dans la matinée de vendredi, bruisse la rumeur d'un arrêté ministériel interdisant le déplacement, apprend-on notamment dans La Voix du Nord. Impossible de mettre la main sur cet arrêté même si une source préfectorale nous confirme sa publication.
Seule source officielle, un arrêté préféctoral et non ministériel, actant bien l'interdiction de la venue des Lillois, est publié ce vendredi mais daté du jeudi.
Quelles seront les conditions de sécurité pour OM-Lille ?
Difficile de se faire confirmer le dispositif de sécurité de la préfecture que ce soit avant l'interdiction de déplacement sur l'encadrement des supporters tout comme après l'arrêté préfectoral. Ce nouveau rebondissement, inclut-il un changement radical du dispositif ? Dans quelle mesure la préfecture de police va pouvoir identifier les supporters lillois qui auraient acheté des billets en tribune et qui viendraient incognito dans le stade ? Qu'est-ce qui a pu faire changer d'avis les autorités seulement 24h avant le match, entrainant des difficultés d'organisations pour les Dogues et les forces de l'ordre ?
Autant de questions qui restent sans réponses. La seule que nous avons obtenue est que "le dispositif est dimensionné à la hauteur de l'évènement", selon la préfecture.
Une décision qui surprend également le club lillois par rapport aux nouvelles de la veille. "Il avait justement été signifié au LOSC la confirmation que le dispositif d’acheminement et de sécurité avait été renforcé afin de garantir le meilleur accueil de ses supporters", explique le club dans son communiqué de vendredi.
Pourquoi l'arrêté préfectoral pose-t-il problème ?
Selon Me Pierre Barthélémy, avocat, spécialiste du supportérisme "cet arrêté arrive trop tard".
"C'est une décision qui (...) n'a aucun sens, estime-t-il. Ni d'un point de vue organisationnel, ni d'un point de vue sécuritaire, ni d'un point de vue 'libertés fondamentales'."
On est sur un chef d'oeuvre ("masterclass") de Gérald Darmanin. Du très haut niveau d'atteinte aux libertés fondamentales et de création artificielle de risques de troubles à l'ordre public.
— Pierre B. (@Pierre_B_y) November 3, 2023
Match Marseille - Lille. 1/n pic.twitter.com/4xVu1ghesB
Le club appuie lui aussi sur le délai tardif de cette décision. " Le LOSC regrette néanmoins que [les supporters] soient, la veille de la rencontre et alors même que certains sont déjà à Marseille ou sur leur route, les victimes collatérales de ces atermoiements".
Et c'est une réalité, "certains supporters avaient fait coïncider la date du match avec les vacances scolaires et sont déjà à Marseille depuis plusieurs jours", indique Pierre Barthélémy à France 3 Provence-Alpes. Ce spécialiste du supportérisme ajoute que les autocars lillois ont probablement pris la route "compte tenu de la distance et des obligations légale de pause sur le trajet".
Me Pierre Barthélémy insiste, "des supporters vont acheter des places en tribunes ou même en virage le soir du match aux abords du stade, sans forcément se définir comme supporters du Losc", ce qui jusque-là pourrait ne pas poser problème "mais si leur équipe marque un but, spontanément ils pourraient alors se lever et réagir, ce qui les identifieraient de fait et pourrait poser problème en tribune".
Les Lillois vont-ils rester chez eux ?
Difficile pour les Lillois de rester chez eux, surtout quand ils se sont organisés depuis longtemps pour se rendre à Marseille. C'est le cas d'Estéban, un supporter lillois déjà présent à Marseille depuis ce matin et qui pour venir a réalisé le parcours du combattant pour réduire les coûts et au final il va dépenser bien plus que prévu.
J'ai pris l'avion Lille Bastia, bateau Bastia-Marseille (20h de trajet avec la tempête à dormir sur la moquette pour faire des économies), un trajet de 90e annulé et non remboursé, 2 nuits d'hôtels + le train en retour et la place.
— DarKa (@DarKaV1) November 3, 2023
Je peux vous dire que je MORFLE https://t.co/dyuR1cO47t
Estéban est parti de Lille en avion pour Bastia : "75 euros pour 3 heures de vol". Il avait réservé un ferry pour rallier Marseille, "90 Euros". Seulement voilà avec la tempête le départ a été reporté, "une fois puis deux fois et comme la deuxième fois l'arrivée à Marseille était prévue après le match, j'ai préféré acheter un autre billet avec une autre compagnie et donc perdre 90 euros et dépenser de nouveau 70 euros". Il a dormi plus de 20 heures à même le sol car prendre une cabine "revenait trop cher". Son retour en train est prévu dimanche pour 100 euros.
Il est finalement arrivé ce vendredi matin à Marseille et a appris l'interdiction de déplacement. Un coup dur pour Estéban après tout ce périple. D’autant plus qu'il avait réservé "une grande chambre d'hôtel avec un autre supporter pour partager les frais". Mais cet autre fan ne va pas venir et Estéban va devoir régler la note seul.
Mais ce qui l'inquiète c'est surtout le match, "j'avais espoir que la préfecture tiendrait compte des cas comme moi et que nous serions quand même acceptés dans le parcage visiteurs", d'autant que "nous n'avons pas les mêmes rivalités que les Lyonnais avec les Marseillais". Mais l'arrêté est formel, aucune présence de supporters aux abords du stade ni dans le stade n'est autorisée. Seule explication pour Esteban, "le président du LOSC a peut-être trop insisté sur la sécurité en amont".
Ira-t-il au match ? "On va peut-être essayer d'acheter des places, mais c'est encore une dépense supplémentaire".
Le ministère de l'Intérieur peut-il revenir sur sa décision ?
L'arrêté ministériel interdisant le déplacement, sera a priori publié samedi matin. L'association Nationale des Supporters a annoncé que leur avocat a saisi "le Conseil d'Etat pour demander la suspension de l'arrêté ministériel (...) qui interdira aux supporters du LOSC de se rendre à Marseille".
Notre avocat vient de saisir le Conseil d'Etat pour demander la suspension de l'arrêté ministériel qui sera publié demain matin et qui interdira aux supporters du LOSC de se rendre à Marseille....demain.
— Asso.Nat.Supporters (@A_N_Supporters) November 3, 2023
Nous avons honte, pour notre pays, d'avoir à défendre ainsi nos libertés.
"Chacun sachant très bien que le temps de trajet pour se rendre de Lille à Marseille est tel que les supporters du LOSC sont déjà sur place ou déjà en chemin. C'est une honte absolue pour l'Etat de droit. Et ce n'est pas un service rendu aux organisateurs de ce match", indique encore l'association, qui ne se fait malgré tout pas d'illusion.