Scandale de la vidéosurveillance à Marseille : retour en 4 actes sur les révélations qui ont conduit à la suspension de 8 policiers municipaux

Suite à la diffusion d'images de vidéosurveillance issues du centre de supervision urbain (CSU) de la police municipale de Marseille, la ville suspend huit agents. Retour sur cette histoire qui pointe les dysfonctionnements.

Au début du mois de mai 2024, BFM diffuse des images de vidéosurveillance du centre de supervision urbain de la police municipale de Marseille. La vidéo, datant de mai 2023, montre des policiers municipaux porter des coups à un homme, manifestement ivre. Découverte de la mairie, réaction de l'opposition, agents suspendus... Retour sur cette histoire 

Acte 1 : un agent du centre de supervision urbain (CSU) de la police municipale de Marseille dénonce

En mai dernier, Sébastien Florenti, un agent (en arrêt maladie) du CSU chargé d’analyser la vidéosurveillance de Marseille, accuse le centre de supervision urbain de couvrir des violences policières. BFM diffuse alors, en mai 2024, une vidéo datant de mai 2023, sur laquelle on voit des agents de la police municipale porter des coups à un individu qui semble être en état d’ivresse. Puis, d’un coup, la caméra de vidéosurveillance change d’angle à multiple reprise, comme pour ne plus filmer la scène.

durée de la vidéo : 00h01mn13s
Images de la vidéosurveillance du centre de supervision urbain de Marseille datant de mai 2023. ©Lanceur d'alerte du scandale

Suite à cela, la mairie de Marseille a indiqué qu’une enquête administrative "menée par un cabinet d’expertise externe, a été lancée permettant d’examiner précisément la situation". À ce jour, l’enquête n’a toujours pas abouti

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Acte 2 : les agents du CSU couvrent les policiers municipaux du terrain

Un mois plus tard, le 1ᵉʳ juin, nos confrères de La Provence dévoilent des enregistrements sonores des propos tenus dans le centre de vidéosurveillance au moment où se déroule la scène. "Tu le prends, tu le menottes, tu l’amènes au sol et tu lui mets son petit coup en traître", peut-on entendre dire un des agents sur ces captations sonores. "Le taquet, à la limite, tu le mets dans la voiture quand il n’y a personne qui te voit. Là, il fait ça sous les caméras", poursuit-il. Dans une volonté claire de protéger ses collègues de la police municipale, cette même personne appelle le chef d’équipe présent sur le terrain en lui demandant : "quand il met deux droites comme ça, qu’il se cache" et qu’il ne se mette pas sous les caméras.

Sébastien Florenti l’assure, il n’agit pas d’un acte isolé et le comportement de ses anciens collègues est loin d’être exemplaire. Ils détournent l’usage de la vidéosurveillance pour s’adonner à des commentaires sur la gent féminine. "C’est pas mal ça", "Elle a des bonnes cuisses". "Montre-nous la pacholette [sexe féminin, ndlr] un peu", entend-on sur les enregistrements diffusés sur RTL.

Selon RTL, deux enquêtes administratives et deux enquêtes judiciaires ont été ouvertes, a confirmé Yannick Ohanessian, l'adjoint au maire chargé de la police municipale.

Acte 3 : réactions de l'opposition politique

Sans surprise, ces révélations ne laissent pas l’opposition sans voix et la droite marseillaise attaque directement la gestion de la police par le maire, Benoit Payan. Dans un communiqué de presse, les élus d’opposition à droite demandent des "informations claires et précises sur la gestion du centre de supervision urbain", avant d’appeler à la démission de Yannick Ohanessian, adjoint à la sécurité."Un incident - si je peux le qualifier comme cela - dramatique comme celui qui s’est passé, il n’y en a jamais eu avant 2020, quoi qu’en dise la municipalité actuelle. On veut savoir pourquoi les choses se passent comme ça, comment on en est arrivé là ?", interroge Catherine Pila, présidente du groupe Une volonté pour Marseille

Ce dernier n’est pas le seul à avoir réagi, et Une génération pour Marseille a également pris position. Fondé en début d’année par deux membres du bureau de Renaissance 13, Romain Simmarano, directeur de cabinet de Renaud Muselier, et Sandra Blanchard, ancienne directrice de campagne de Sabrina Agresti-Roubache, le collectif ne mâche pas ses mots. Dans un communiqué de presse, ils constatent "la double faute de Benoit Payan, avec une voie publique qui n’a jamais été aussi mal gérée et une gestion interne catastrophique". Sans attendre, ils réclament "la mise sous tutelle immédiate du CSU par l’État", le lancement d’une enquête indépendante, et "la protection de l’ensemble des policiers municipaux qui subissent cette gestion lamentable".

De son côté, Yannick Ohanessian réagit à ces propos tenus par l'opposition. "On nous reproche quoi ? De prendre nos responsabilités ? De considérer que les images que l’on a vues sont choquantes ?"

J’ai trop de respect pour la fonction du policier pour justement laisser passer ce type de comportements de quelques-uns.

Yannick Ohanessian, adjoint à la sécurité à la mairie de Marseille

"Je ne souhaite pas à ce que l’on vienne salir l’institution. On travaille d’arrache-pied avec la municipalité, depuis quatre ans maintenant, à remonter la police municipale, augmenter ses effectifs, à beaucoup miser sur la formation des nouveaux agents rentrants", détaille l'adjoint à la sécurité. 

Dans une interview donnée à France 3 Provence-Alpes, il explique qu'au lendemain de la diffusion de la vidéo, des mesures ont été prises immédiatement, avec le renforcement de l’encadrement au centre de supervision urbain, la modification du règlement intérieur du CSU et la réflexion autour d'une formation de ces opérateurs vidéo. "Donc pendant que nous nous prenions la mesure de la situation, d’autres font des commentaires. Je les laisse à leurs commentaires", fustige-t-il. 

Acte 4 : huit agents suspendus

Dans un communiqué de presse, la mairie de Marseille indique que "l’enquête administrative déclenchée par la Ville aux fins d’établir les faits et caractériser les fautes énoncées a permis d’identifier sept agents qui ont été immédiatement suspendus, dans l’attente de la tenue d’un Conseil disciplinaire". La Ville de Marseille ajoute avoir déposé plainte contre ces sept agents "afin que la Justice puisse donner à ces faits les suites qu’elle jugera appropriées".

La Ville a également saisi le Procureur de la République à l’encontre de "l’agent à l’origine de la diffusion de vidéo et d’enregistrements réalisés en dehors de tout cadre légal", soit Sébastien Florenti. Une plainte à son encontre a également été déposée pour diffusion d’images confidentielles et il est ainsi suspendu, le temps de l’enquête.

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