Témoignages. "La parole, on nous la donne pas, on la prend" : des femmes se réapproprient la rue pour dénoncer les violences et inégalités

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Prendre les murs, les rues, pour dire, pour dénoncer, pour crier.
Extrait du film "J’irai crier sur vos murs" de Elodie Sylvain et Charlotte Ricco ©13 Prods / FTV
Publié le Écrit par Florence Brun

Sur les murs de Marseille, les messages féministes se multiplient. A coup de collages, de peintures ou de tags, des femmes occupent l’espace public pour briser le silence, dénoncer les féminicides, le harcèlement de rue, les inégalités, les tabous… Le film "J’irai crier sur vos murs" part à la rencontre de ces messagères d’un nouveau genre.

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"Ici, il y a eu un viol". Cette phrase choc, peinte sur un mur du quartier des Réformés, a été l’élément déclencheur du documentaire. Des mots tracés par une femme, Maia Izzo, pour rappeler à tous un crime survenu ici, en plein centre-ville, un dimanche d’été de 2017 : non loin des terrasses de café bondées, une femme sans domicile fixe était violée sans que personne n’y prête attention.

"Ces mots nous avaient glacé le sang et donné envie d’agir. Nous les avons lus comme un cri, un appel, une volonté de transformer la société" racontent les réalisatrices Elodie Sylvain et Charlotte Ricco.  Un cri qui résonne partout dans les rues de la ville. 

Car depuis quelques années, une vague de messages féministes s’est répandue sur les murs et les trottoirs de la cité phocéenne. De la dénonciation des violences au tabou de la ménopause, des femmes de tous âges et de tous horizons utilisent le street art comme une arme de communication massive, redonnant une dimension politique aux inscriptions urbaines.

Qu’est-ce qui les pousse à prendre ainsi possession de l’espace public, souvent dans l'illégalité ?  Leurs actions, à la croisée de la pratique artistique et de l’acte militant, peuvent-elles vraiment changer l’ordre des choses, faire évoluer les mentalités ? Et que pensent celles et ceux qui lisent ces messages ?

Véritable immersion auprès de femmes militantes, le film dévoile plusieurs visages du féminisme. Les approches, les motivations, les sensibilités varient. Certaines agissent seules, d’autres privilégient le collectif, mais toutes apportent leur pierre à un même édifice : la lutte pour l’égalité des droits. Car les sujets de dénonciation sont hélas nombreux.

En faire 2 ou 3 ça ne suffit pas, il faut que les rues soient inondées, que les gens soient obligés de voir ces messages.

Marguerite Stern

Au cœur du combat de Marguerite Stern : les féminicides. La jeune femme a initié un mouvement de collages qui a pris de l’ampleur et essaimé dans d’autres villes. Dans un autre registre, Zola a choisi de s’en prendre au harcèlement de rue quotidien, en créant des tee-shirts aux slogans cash.

De son côté, Amalia affiche des photos tandis qu’Anne-Laure Maison prône l’émancipation de la femme hors de la sphère domestique, par le biais de collages originaux. Enfin l’artiste italienne ‘Ndrame dénonce la précarité menstruelle et le tabou des règles, en utilisant son propre sang dans des créations détonantes.

Le documentaire questionne aussi le tabou de la ménopause, la place des femmes dans le graffiti ou encore la représentation féminine dans l’espace public.

En contrepoint des différents témoignages, les réalisatrices cueillent à chaud les réactions de passantes et de passants. Quel est leur ressenti face à ces messages qui veulent bousculer, voire provoquer ? Et que pensent-ils de la légitimité de ces moyens d’expression ?

Les avis divergent, parfois la discussion s’engage. "On donne de plus en plus la parole à la femme, je trouve" glisse un jeune homme. Et ‘Ndrame de rétorquer : "On nous la donne pas, on la prend !"

>>  "J’irai crier sur vos murs", un film à voir sur france.tv et une web série de 6 épisodes.

Réalisation Elodie Sylvain et Charlotte Ricco. Coproduction 13 Prods / France Télévisions. Diffusion jeudi 7 mars 2024 à 23h sur France 3 Provence-Alpes-Côte d’Azur (première diffusion en mars 2022).

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