Publié le Mis à jour le Écrit par Marianne Leroux et Anne Le Hars

L'Assemblée s'apprête à nouveau ce mercredi 24 janvier à débattre de l'inscription de l'IVG dans la Constitution en vue d'un Congrès du Parlement début mars. Une demande de longue date des associations féministes.

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Le projet de loi visant à inscrire l'interruption volontaire de grossesse (IVG) dans la Constitution sera présenté à l'Assemblée ce mercredi 24 janvier. Un chemin qui pourrait être entravé au Sénat par les réticences de la droite et du président Gérard Larcher.

C'est au troisième étage du 22 avenue Malausséna à Nice que se trouve le Planning familial des Alpes-Maritimes. Camille, animatrice de prévention au sein de l'association, nous accueille le sourire aux lèvres dans les locaux.

Un endroit chaleureux où les affiches et les prospectus sur le droit à l'IVG, les IST ou encore l'endométriose sont nombreux. Les six salariées, qui composent l'équipe niçoise, sont en pleine réunion pour organiser leur emploi du temps et les permanences proposées au fil de la semaine.

"C'est une très bonne chose"

Claire Moracchini, conseillère conjugale et familiale, revient sur ce choix du président de la République.

"On s’est beaucoup battu pour que ça se fasse. Il y a quelque chose qui pérennise et qui inscrit de manière imprescriptible ce droit, c'est une très bonne chose". Avant d'ajouter que "dans les pays très voisins, sans aller jusqu’aux États-Unis, il y a eu ces derniers temps des remises en cause. L’inscrire dans la Constitution, ça permettrait d’éviter des basculements, dans le cas où on passerait à l’extrême droite, ce qui reste du domaine du possible. On a très bien vu que ça s’est produit ailleurs".

Cependant, un détail fait tache selon Claire qui travaille au Planning familial depuis 15 ans :

On n'a pas été tout à fait d’accord sur le détournement qui a été fait dans la formulation : remplacer le mot droit par le mot liberté. On voulait symboliquement qu'il y ait quelque chose de fort. On tient quand même à ce que ça se fasse. On espère que ça va aboutir,

Claire Moracchini, animatrice au Mouvement français du planning familial à Nice.

France 3 Côte d'Azur, décembre 2023.

À l’inverse, l'association pro vie Alliance Vita voit dans l'inscription de l'IVG dans la Constitution un "non-sens" et juge la mise en place d'une vraie "politique de prévention de l'avortement plus que jamais nécessaire".

Plusieurs dysfonctionnements dénoncés

Historiquement, le Planning familial a fait partie des organisations qui ont lutté pour le droit à l’IVG, obtenu en 1975 avec la loi Veil.

L'association a ensuite continué à informer et à veiller à la bonne application des lois pour que le droit des personnes qui veulent avorter soit respecté. Lors des permanences, les femmes qui souhaitent avorter sont accueillies par des conseillères qui vont prendre le temps d'examiner la situation (âge, avancement de la grossesse, situation professionnelle...) et les diriger vers ce qui est le plus adapté : la meilleure méthode de médicaments, l'endroit de l'avortement et les différentes conditions.

Le 28 septembre dernier, lors de la journée internationale du droit à l’avortement, le Planning familial a interpellé plusieurs partenaires institutionnels comme l'ARS, la CPAM, le département et l'hôpital de Nice pour signaler des dysfonctionnements. "Lorsqu'on fait des signalements, on part de ce qu'on a relevé sur le terrain, en permanence. On a vu des phénomènes récurrents se produire et on a tenu à alerter tous les pouvoirs publics qui sont responsables du bon fonctionnement", raconte la conseillère.

Parmi ces dysfonctionnements, elle note surtout les dépassements d’honoraires pratiqués dans le privé, principalement par des gynécologues.

"L'IVG est un acte remboursé, pris en charge à 100% donc il ne doit pas faire l’objet de dépassements d’honoraires. Or dans notre département, on a des professionnels de santé qui demandent jusqu’à 600 euros alors que le tarif pour une médicamenteuse c’est un peu moins de 200 euros. C’est totalement illégal, mais c’est largement pratiqué".

Le délai moyen pour accéder à l'IVG par département :

Une offre "suffisante" 

Les échographies de datation sont faites dans le service gynécologie, "ce qui fait que les femmes ayant fait le choix d’avorter sont dans la même salle d’attente que les femmes qui gardent leur grossesse, ce qui est problématique". Des problèmes de facturations non prises en charge, des protocoles d'anonymat non respectés lors des prises de sang dans les laboratoires, ou encore le manque de formation des personnels de santé : "Il est important qu'ils soient plus sensibilisés à l’écoute des femmes qui viennent pour avorter parce qu’on a régulièrement des témoignages de jugement, de malveillance, de moralisation, de culpabilisation. Ce n'est pas normal".

Les médecins qui pratiquent les IVG médicamenteuses en ville doivent respecter un protocole mais ce n'est pas toujours le cas, selon elle. "Par exemple, p our les mineurs, il est prévu qu’ils nous les envoient pour qu'ils puissent bénéficier d’un entretien avec une conseillère et avoir de l’information sur la contraception, qu’on s’assure qu'ils ne font pas l’objet de pression. On a constaté ces derniers temps que cette procédure n’avait pas été respectée".

Dans la plupart des départements français, les centres de planification ont mis en place des IVG médicamenteuses, mais pas dans les Alpes-Maritimes. "On entend des rumeurs depuis quelques années, mais on ne voit rien venir. Pourtant, ça multiplierait l’offre d’IVG en ville et  on serait sûr qu’il n’y aurait pas de dépassements pratiqués puisque ça serait en centre de planification. On attend que ça se débloque et que des choses soient mises en place"

Mais dans les Alpes-Maritimes, l'offre reste "suffisante". Elle est "très large en ville, ce qui n'est pas le cas partout en France".

Le projet de loi constitutionnelle pour inscrire l'IVG dans la Constitution est attendu le mercredi 24 janvier dans l'hémicycle de l'Assemblée nationale. Selon les derniers chiffres officiels, 234 300 IVG ont été enregistrées en France en 2022. 

> Il existe un numéro vert national d'information (0 800 08 11 11, appel anonyme et gratuit) piloté par le Mouvement français du planning familial (MFPF) et un site d'information : ivg.gouv.fr

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