L'ancien baron de la drogue marseillais, recherché depuis plus de vingt ans, François Scapula est décédé à l'âge de 78 ans à Marseille.
Son nom évoque la French Connection, une époque qu'à Marseille, les moins de 20 ans ne peuvent pas connaître. Quand la cité phocéenne était la "capitale mondiale de l'héroïne". Le plus célèbre des repentis français, François Scapula est mort le 7 juillet à l'âge de 78 ans, il a été incinéré en toute discrétion, le 13 juillet à Marseille, indique une source policière à France 3 Paca, confirmant une information de BFMTV. L'ancien caïd de drogue était en cavale depuis son évasion en Suisse en 2000. France 3 Provence-Alpes vous détaille trois choses à savoir sur "Scapu la balance", qui vient de mourir.
Sa tête mise à prix à un million de dollars
Jusque-là surnommé "François le Brun", Scapula gagne son surnom "Scapu la balance" quand il livre les assassins du juge Pierre Michel, abattu à moto en 1981 à Marseille. Au procès de Charles Altiéri, le pilote, devant la cour d'Assises d'Aix-en-Provence en 1991, Scapula coule des jours tranquilles dans une prison suisse. C'est lui qui a tout balancé aux policiers marseillais. Convoqué pour témoigner devant les jurés aixois, il refusera de quitter sa cellule. Trop risqué. Sa tête est mise à prix.
Il faut dire que l'enquête sur la mort du juge est restée au point mort pendant cinq longues années. Jusqu'à l'interpellation de François Scapula en Suisse. Le trafiquant marseillais repenti balance les commanditaires, son ami d'enfance Francis Girard dit "Le Blond", et les petites mains exécutrices.
Il donne bien d'autres filons sur les filières internationales de l'héroïne, qui contribuent au démantèlement de puissants réseaux. "Scapu la balance" est l'homme à abattre pour les trafiquants marseillais, la mafia sicilienne, mais aussi la pègre américaine. Un contrat d'un million de dollars est mis sur sa tête. Que visiblement personne n'a jamais touché.
Le pionnier du trafic moderne de stupéfiants
Né en 1945 dans le quartier d'Endoume, dont sont issus bon nombre de trafiquants de l'époque à Marseille, Scapula a fait ses armes dans les cambriolages, les vols de voiture, les braquages, avant de prendre du galon dans le trafic de drogue au début des années 1970.
Avec son ami "Francis Le Blond", il monte sa petite entreprise de transformation de la morphine base en héroïne, avec des ambitions internationales, approvisionnant aussi bien la Cosa Nostra en Sicile que le clan Benevento de New York. "Dans une autre vie, il aurait fait un super chef d'entreprise", dit de lui un ancien patron des stups à Marseille, Paul Grossrieder, le policier qui le connaît sans doute le mieux.
L'affaire est florissante jusqu'à la chute du "Blond", en 1981, envoyé aux Baumettes par le juge Michel, lequel est assassiné trois mois plus tard. Scapula, lui, disparaît des radars pendant quelques années.
Protégé par la justice suisse après son évasion
Interpellé dans un chalet-labo suisse en 1985, avec deux complices, dont Charles Altiéri, le chimiste du "gang des Paccots" a été condamné en juin 1987 à 20 ans de réclusion par le tribunal de Fribourg. Il s'évade de son pénitencier semi-ouvert en Suisse alémanique, en novembre 2000. Le Marseillais ne rentre pas d'un week-end de congé qui lui a été accordé. Une évasion gardée secrète par la justice fribourgeoise jusqu'en octobre 2001, pour protéger le repenti en cavale.
"Scapula ne présentait pas de danger pour la population. Il ne s'agissait pas d'un fou furieux", explique alors le chef du service pénitentiaire du canton de Fribourg, Joseph Jutzet. Sa peine purgée aux trois-quarts dans des quartiers de haute sécurité, le plus souvent à l'isolement, Scapula allait obtenir de façon imminente une liberté conditionnelle.
Mais la France avait demandé son extradition, il n'a pas voulu courir le risque d'être une cible facile dans une prison française, où il devrait purger une double condamnation par contumace à 22 ans et 15 ans de réclusion pour trafic d'héroïne.