Total La Mède : démarrage de la bioraffinerie malgré l'opposition écologiste

Malgré l'opposition des associations de défense de l'environnement, la raffinerie de Total La Mède a démarré la production de biocarburant à base d'huile de palme, dans la nuit de lundi à mardi.

La raffinerie de Total, située à La Mède (Bouches-du-Rhône) était prête a démarrer la production de biocarburant depuis fin mai. Les premiers litres de cet agrocarburant sont sortis de l'usine, dans la nuit de lundi à mardi. La production a démarré avec de l'huile de colza et se poursuivra prochainement avec 50% d'huile de palme.

L'usine dispose d'une capacité de production annuelle d'environ 500 000 tonnes par an, du "biodiesel" et du "biojet" pour l'aviation, a expliqué le groupe pétrolier, dans un communiqué publié sur son site internet. Le site de La Mède devient l'une des plus importantes bioraffinerie d'Europe, avec celles d'ENI en Italie et de NESTE en Finlande.

Le projet avait débuté en 2015, en liaison avec le gouvernement. Pour convertir la raffinerie de pétrole brut (430 emplois), le groupe a investi 275 millions d'euros.  L'ensemble des nouvelles activités de bioraffinerie, mais aussi une ferme solaire, une plate-forme de logistique ou encore un centre de formation, permet de maintenir 250 emplois directs.

Dans le cadre des travaux, 65% des commandes ont été passées à des entreprises locales (soit 800 emplois), précise le communiqué de Total.

Vive contestation des défenseurs de l'environnement

La bioraffinerie de Total La Mède fonctionnera pour moitié sur la transformation d'huile de palme importée. Cette importation fait l'objet d'une vive contestation des associations de défense de l'environnement et des agriculteurs, pour une fois unis sur un même front.

"France Nature Environnement (FNE) s'inquiète des conséquences sanitaires potentielles sur les citoyens", a réagi mercredi la section provençale de l'association, qui constate "depuis plusieurs jours la présence de fumées noires émanant" du site.

"FNE en appelle à la responsabilité de Total: ses investissements doivent à tout prix être orientés vers des systèmes de production d'énergie de long terme, plus respectueux de l'environnement et de la santé des populations", ajoute l'ONG.

Les associations environnementales contestent devant la justice administrative l'autorisation d'exploitation accordée par le préfet. L'audience est attendue début 2020. Elles accusent aussi et surtout ce projet de contribuer à la déforestation en Asie du Sud-est.

65% huile végétale, 35% retraitement des déchets

Total indique s'être "engagé à traiter chaque année au maximum 300.000 tonnes d'huile de palme, soit moins de 50% du volume des matières premières nécessaires".

Les carburants seront produits "pour 60-70% à partir d'huiles végétales durables (colza, palme, tournesol, etc.)" et "pour 30-40% à partir de retraitement de déchets (graisses animales, huiles de cuisson, etc.)".
    
"Lorsqu'ils sont produits à partir de matières premières durables, comme c'est le cas à La Mède, les biocarburants émettent plus de 50% de CO2 en moins que les carburants fossiles", a expliqué Bernard Pinatel, directeur général Raffinage-Chimie de Total, cité dans le communiqué.
    
Total a assuré compléter la certification de son huile de palme par un dispositif spécial de contrôle de la durabilité et du respect des droits de l'Homme (limitation du nombre de fournisseurs, acceptant d'être audités par un expert tiers...)
    
Mais les ONG demandent plus de transparence sur l'origine de la palme, et dénoncent l'inefficacité de certifications comme les labels RSPO ou ISCC.
    
Pour le climat, "les agrocarburants, c'est pire qu'une énergie fossile, parce qu'on déboise, on utilise des terres destinées à l'alimentation, et l'entreprise ne peut pas s'assurer qu'il n'y a pas de déforestation indirecte (bien indirecte)", surtout dans des pays où l'opacité règne, a indiqué à l'AFP Laura Monnier, juriste de Greenpeace, qui a fait une demande de communication d'informations au ministère de la Transition écologique.

"Les Amis de la Terre" se tournent aussi vers le gouvernement, qui "avait annoncé vouloir mettre fin à l'utilisation d'huile de palme dans les carburants lors de la présentation du Plan Climat en 2017 et a ensuite fait marche arrière et multiplié les manœuvres pour protéger les intérêts de Total".
    

Les agriculteurs dénoncent l'importation d'huile asiatique

Les agriculteurs étaient eux venus bloquer le site de La Mède en juin 2018, protestant contre l'importation des matières premières et notamment de l'oléagineux asiatique "dont la part croît" dans l'essence en France au détriment du colza.
    
Total s'est engagé à employer "au minimum 50.000 tonnes de colza français pour assurer un débouché supplémentaire à l'agriculture française".
    
L'essentiel de sa production ira au marché national. La France consomme environ trois millions de T par an de biodiesels, incorporés à 7,7% dans les hydrocarbures.

La CGT de Total La Mède veut se séparer de l'huile de palme

Après trois d'arrêt des machines, la CGT de Total La Mède se félicite de la reprise de l'activité, même s'il ne reste que 250 emplois direct. "2000 emplois directs et indirects ont disparu" indique Fabien Cros, secrétaire CGT au CSE central de Total.

Le syndicat travaille depuis longtemps avec les associations écologistes. Le 24 avril dernier, la CGT a fait voté une expertise pour analyser le potentiel du site de La Mède, pour savoir s'il peut fonctionner avec des huiles alternatives à l'huile de palme.

"On veut montrer que notre site peut fonctionner avec d'autres huiles : colza, soja, graisses animales et toutes les huiles récupérées" indique Fabien Cros. Il précise que "l'huile de palme est la plus rentable et facile à mettre en œuvre, mais on demande qu'ils utilisent des huiles différentes".

Le syndicaliste ajoute que la CGT a demandé à Total, la création d'une unité de production d'hydrogène vert, fabriqué potentiellement avec la ferme solaire mis en place et conclut : "il faut que Total développe les outils du carburant du futur".
 
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