Le procureur a requis lundi, devant le tribunal correctionnel de Marseille, deux mois de prison avec sursis contre un ancien haut fonctionnaire de la zone de défense Sud, jugé pour harcèlement moral sur l'un de ses collaborateurs. Le tribunal a mis sa décision en délibéré au 14 octobre.
En avril 2010, une plainte avait été déposée contre Patrick Marseille, 65 ans, qui dirigeait alors le Service zonal des systèmes d'information et de communication (SZSIC) du ministère de l'intérieur pour la zone de défense Sud à Marseille, par le chef du département des affaires générales qui dénonçait une "placardisation", un chantage et des insultes.
Reportage GIORGETTI Jean-François, POITEVIN Alban et PROUTEAU Sylvain :
M. Marseille est aujourd'hui à la retraite, parti avec le statut de préfet hors cadre, selon son avocat. Le plaignant, décrit comme un juriste pointilliste, affirme avoir été harcelé après avoir dénoncé des irrégularités dans la passation de marchés publics au sein de ce service chargé des réseaux informatiques, téléphoniques et de radio pour la police, les préfectures et la Sécurité civile.
Ces anomalies ont valu à Patrick Marseille et à deux cadres du SZSIC d'être mis en examen pour favoritisme, détournement de fonds publics,
faux et complicité.
Le plaignant a expliqué à la barre avoir été "mis au placard" dans un bureau plus petit. "Je n'avais plus accès à quoi que ce soit, j'ai passé neuf mois à ne rien faire. C'était l'isolement total. Mes collègues avaient pour consigne de ne pas me parler ni de déjeuner avec moi".
Plusieurs témoins ont dénoncé la rudesse des méthodes de Patrick Marseille : "C'est un potentat, dit un fonctionnaire. Il se prenait pour un seigneur avec deux devises : mes troupes fonctionnent avec des coups de pied au cul et une journée sans pourrir quelqu'un est une journée perdue".
Des "méthodes de barbouze", dénonce Me Baptiste Scherrer, avocat de la partie civile. Patrick Marseille a fustigé, lui, "la déloyauté" de son chef de bureau. "Je n'ai donné aucune consigne pour le priver de moyens, quels qu'ils soient. Il s'est rapidement enfermé à double tour dans son bureau. Il en
sortait pour aller à la cabine téléphonique du coin. Je ne savais pas quoi faire".
Selon lui, son collaborateur réclamait la présence d'un délégué syndical pour chaque entretien avec son supérieur.
Dans ce procès parole contre parole, le procureur Dominique Mirkovic a considéré que "de nombreux témoignages sont évocateurs de harcèlement moral". Selon le magistrat, le chef de bureau "gênait car il avait mis au jour des agissements frauduleux et ne souhaitait pas se soumettre".
Plaidant la relaxe, Me Virgile Reynaud, avocat de Patrick Marseille, a évoqué la difficulté de placer le curseur entre management strict et harcèlement
moral". Les malversations reprochées ne visaient qu'à utiliser des "queues de crédit" non consommées pour l'amélioration des locaux du SZSIC, a-t-il expliqué. "Ce dossier oppose la rigueur de la comptabilité publique de l'un, à l'exigence du service public de l'autre".
- avec AFP -