Samia Ghali, blonde, avec des lunettes. Elle interprète une mère divorcée qui cherche un logement. Le député Thierry Mariani dans un fauteuil roulant. C'est la nouvelle émission de téléréalité de la chaîne D8. Elle sera diffusée ce lundi soir mais est vivement critiquée.
Des hommes et des femmes politiques dans la peau de "Monsieur et Madame Tout-le-Monde" : une nouvelle émission projetée par la chaîne D8 suscite déjà la controverse chez les élus. Sept élus de gauche ou de droite ont participé à l'émission qui est diffusée ce lundi soir :
- Bernard Accoyer
- Samia Ghali
- Julien Dray
- Jean-Luc Romero
- Geoffroy Didier
- Thierry Mariani
- Dominique Bussereau
Perruque, faux nez
Pendant une journée, affublés de perruque, faux nez et menton postiche, ils ont vécu incognito la vie de "Monsieur et Madame Tout-le-Monde" (titre provisoire de l'émission) : celle d'un urgentiste, d'un professeur mais aussi d'un handicapé en fauteuil roulant.Pour le producteur, Olivier Hallé, l'émission relève du "documentaire" et n'est "en rien de la téléréalité" à la sauce politique.
C'est peut-être spectaculaire mais c'est comme ça qu'on peut faire réagir. Quand ils sont en fonction, les hommes politiques ne se rendent compte de rien"
s'est-il défendu.
Thierry Mariani dans un fauteuil roulant
Le producteur nie avoir voulu faire une émission racoleuse, alors que Thierry Mariani et Jean-Luc Romero s'étaient d'abord vu proposer des rôles de SDF et de militant du Front national. Le député UMP Thierry Mariani, a passé une journée dans un fauteuil roulant.J'avais lu des dizaines de notes sur le sujet quand j'étais ministre, mais ce n'est pas la même chose quand vous êtes dans un fauteuil pendant une journée"
a déclaré l'ancien ministre des Transports . "On nous reproche de ne jamais être dans la vraie vie mais, quand on fait une expérience in vivo, on nous traite de comédiens", a-t-il regretté.
"Une perversion du débat politique"
Mardi matin, l'ex-ministre et députée européenne Michèle Alliot-Marie, qui avait passé des tests, a annoncé sur linternaute.com/Ouest-France/20 Minutes qu'elle ne participerait pas à l'émission. "Je suis contre la téléréalité pour les politiques" a-t-elle affirmé. Alors que la classe politique est régulièrement accusée d'être déconnectée du réel, les premières réactions de politiques étaient franchement critiques. L'ex-Premier ministre François Fillon a dénoncé un mélange des genres entre "politique et amusement".S'ils ont besoin de se déguiser pour aller voir la vraie vie, ils ont un vrai problème. C'est plus grave que ça : c'est une perversion du débat politique"
a-t-il accusé sur Europe 1.
Piques entre Samia Ghali et Cécile Duflot
Cécile Duflot, l'ex-ministre et députée EELV a elle déclaré sur France Info :Je ne dois pas être une vraie responsable politique, car je n'ai pas besoin de me déguiser pour aller au Super U, amener mes enfants à l'école et vivre normalement".
"Si Cécile Duflot avait été une bonne ministre du Logement, je n'aurais peut-être pas eu besoin de faire cette émission", lui a répondu sur Canal+ la sénatrice PS Samia Ghali, qui jouera le rôle d'une mère divorcée à la recherche d'un logement. Pour Luc Chatel, secrétaire général intérimaire de l'UMP, interrogé sur i- Télé, entre la classe politique et les Français, "on a besoin de réalité, pas de téléréalité".
Des expériences instructives selon les participants
En 2003, TF1 avait projeté une émission de téléréalité avec des politiques, dont Jean-François Copé, porte-parole du Premier ministre Jean-Pierre Raffarin. Mais ce dernier avait mis le holà et le projet avait avorté. Conseiller régional d'Ile-de-France (PS apparenté), Jean-Luc Romero a passé une demi-journée dans la peau d'un militant contre l'abstention aux européennes.Je suis un homme de terrain, mais il y a des choses qu'on ne vous dit pas quand on sait qui vous êtes"
s'est-il justifié, "choqué" par des propos racistes et homophobes entendus sous sa nouvelle identité. Bernard Accoyer, député UMP et médecin ORL, a passé une journée incognito dans un service d'urgences francilien.
Il avait visité des dizaines d'hôpitaux dans le cadre des ses fonctions mais, là, il a pu discuter sans filtre avec le personnel médical et en tirer quelques conclusions"
souligne son entourage. En choisissant des hommes politiques "formés aux caméras et qui assureront le spectacle", D8 devrait séduire les téléspectateurs, selon Valérie Patrin-Leclère, directrice du département médias du Celsa-Paris Sorbonne. "Le concept aurait pu être intéressant si on en faisait un vrai documentaire".