Le bac de Barcarin est actuellement le seul moyen de franchir le Rhône pour relier Salin-de-Giraud à Port-Saint-Louis. Le conseil départemental a le projet de le remplacer par un pont, un choix contesté par les écologistes.
La construction d'un pont routier sur le Rhône, entre Salin-de-Giraud et Port-Saint-Louis est dans les cartons du Conseil départemental depuis 2007. Relancé par Martine Vassal en 2017, le pont doit remplacer le bac de Barcarin, mis en service la première fois en 1933. Quelque 2 600 véhicules l'utilisent chaque jour pour entrer ou sortir du parc naturel régional de Camargue. Un service public de traversée, ouvert 22 heures par jour, 365 jours par an, mais peu rentable. Le projet de pont très attendu par les 2400 Saliniers est sur les rails. La concertation publique sur l'avant-projet s'est déroulée du mardi 11 juin à ce jeudi 11 juillet, première phase avant la déclaration d'utilité publique attendue pour 2026. France 3 Provence-Alpes répond à trois questions sur ce dossier, qui ne fait pas l'unanimité.
En quoi consiste le projet ?
Le pont de 536 m de long sur 15 m de large, enjambera le Rhône, à l'endroit même où le bac de Barcarin fait la traversée, reliant la D36 sur la rive de Salin-de-Giraud à la D35b côté Port-Saint-Louis. Un choix qui limite à la fois les coûts et l'impact écologique, selon le cabinet Artelia, maître d'œuvre.
L'ouvrage s'élèvera à 12 mètres au-dessus de l'eau, afin que les bateaux puissent circuler dessous. Un trottoir de 1,50 m bordera la chaussée d'un côté et une voie verte sera aménagée de l'autre, avec des pistes pour les vélos et les chevaux. Pour l'heure, la gratuité ou non de l’accès et la limitation de vitesse sur l’ouvrage ne sont pas tranchées, la question sera abordée en concertation avec les riverains, selon la mairie.
Ce projet est estimé à 53 M €, financés à 94% par le Département. Le chantier devrait démarrer en 2030 pour une livraison trois ans plus tard. Le bac continuera d'assurer les liaisons d'ici là.
Pourquoi construire un pont ?
Ouvert 365 jours par an, le bac de Barcarin fait l'aller-retour entre Salin-de-Giraud et Port-Saint-Louis en dix minutes, avec un arrêt de 2h00 à 4h20. Le passage coûte 6 euros par voiture. Le fonctionnement du bac est régulièrement interrompu, lors de crues importantes du Rhône, de mauvaises conditions météorologiques, transport fluviomaritime, avarie ou grève... La liaison est pourtant essentielle pour les 2 400 habitants du hameau de Salin qui travaillent pour la plupart sur l'autre rive du Rhône.
La mairie d'Arles soutient le projet de pont, estimant que "le pont offrira une traversée sécurisée, permanente et viable" en lieu et place du bac de Barcarin, seul moyen actuel pour les Saliniers de pouvoir traverser le Rhône sans avoir à passer par Arles". Le conseil municipal a émis un avis favorable le 11 juillet. "Ce pont est indispensable pour pouvoir évacuer le village rapidement, notamment en cas de crue", a souligné le maire Patrick de Carolis. Sur son site, la Ville rappelle que les habitants du hameau de Salin réclament la construction d'un pont depuis... 1904 !
Lors de deux référendums, en 2003 et 2017, les Saliniers se sont très largement déclarés en faveur du projet. Le premier pont sur le Grand Rhône se situe à Trinquetaille, à 37 km de Salin-de-Giraud, note le dossier de présentation de la concertation publique. Le Département rappelle par ailleurs que "le déficit d’exploitation du bac est de 4,4 M € par an", financé à 94% par la collectivité, qui estime que "le pont sera rentabilisé en quinze ans".
Qui est opposé au projet de pont ?
Le projet ne fait pas l'unanimité parmi les populations locales, qui veulent préserver la tranquillité et la biodiversité en Camargue. En janvier 2022, le collectif camarguais pour le maintien du bac à Salin-de-Giraud s'est constitué pour regrouper les opposants : associations de riverains, agriculteurs, manadiers, éleveurs, chasseurs, associationsde dfense de l'environnement Agir pour la Crau, FNE13 ou encore Nature et Citoyenneté Crau Camargue Alpilles (Nacicca). Ils estiment que "le maintien du bac est vital pour la sauvegarde de la Camargue". La principale inquiétude porte sur l'augmentation du trafic générée par le pont. "La Camargue n'a pas vocation à devenir une zone d'accueil pour le tourisme de masse", plaident-ils.
Selon le collectif, les flux de circulation auront des conséquences sur les écosystèmes et sur cette zone de pause migratoire de 400 espèces d’oiseaux.
"Pour la sauvegarde de la Camargue, disons non à ce grand projet inutile et dangereux de pont aspirateur à poids lourds et voitures", écrit ce vendredi 12 juillet, dans un tweet, l'écologiste Sébastien Barles, adjoint au maire de Marseille, opposant de la première heure. Un projet qualifié d'"aberrant" et "écocide".
Le @departement13 poursuit l’aberrant projet de pont entre Salin & Port Saint Louis.
— Sébastien Barles (@sebbarles) July 12, 2024
Ce projet écocide à 40M€ ouvre une brèche pour la traversée massive en poids lourds et en voitures de la #Camargue, dernier grand espace naturel d’exception non bétonné du littoral méditerranéen pic.twitter.com/Ww1J5lTUqG
Pour les écologistes de la région, un pont à la place du bac "est une fausse bonne idée". Sébastien Barles, qui participe à la mobilisation contre le pont ces dernières années, prône le maintien du bac avec une propulsion électrique.