Les procédures et les recours sont leur quotidien depuis 30 ans. Avec leur association "En toute franchise", Martine Donnette et Claude Diot se battent sans relâche contre les actions illégales de la grande distribution, qui nuisent aux petits commerces.
À Marignane, leur garage déborde de dossiers juridique. Depuis 1994, avec leur association baptisée "En toute franchise", Martine Donnette, 75 ans, et Claude Diot, 80 ans, inventorient les abus de la grande distribution. Selon eux, si l'État "avait la volonté de faire respecter la loi", 418 milliards d'euros d'amendes pénales auraient pu être récupérés face à des irrégularités répétées.
Mépris de la concurrence, absence d'autorisation d'exploiter, dépassement des surfaces autorisées… Sans relâche, le couple traque les abus fréquents des grands enseignes. Ils dénoncent la concurrence déloyale et les abus de position dominante, au détriment des commerces de proximité.
Du commerce à la lutte
Rien ne destinait Martine Donnette à s'engager dans la lutte. Fille d’un chauffeur et d’une femme de ménage, elle est titulaire d'un CAP comptabilité. Sa passion, à l’origine, c’est le tricot.
Je ne savais pas que j'allais lire le code du commerce, le code de l'urbanisme, le code de procédure pénale,le code pénal. Mon rêve, c'était d'avoir une boutique de laine et de vivre comme tout citoyen, de son travail, tranquille.
Martine Donnette, présidente de l'association "En toute franchise"
En 1985, son souhait se réalise. Martine Donnette s’installe dans la galerie marchande d’un hypermarché de Vitrolles. Pleine d'ambition, elle bat même le record de la plus longue écharpe tricotée du monde : 247 mètres ! Les clients abondent.
Mais l'euphorie ne dure pas. Lors des travaux d’extension de la galerie marchande en 1988, Carrefour lui impose de changer d’emplacement et double son loyer. L’enseigne Phildar perd en chiffre d'affaires. Les dettes s’accumulent.Carrefour refuse que les boutiques changent d’activité.
Liquidation judiciaire et expulsion
La boutique de Martine Donnette est placée en liquidation judiciaire. En 1991, endettée, elle est expulsée du centre commercial.
La commerçante trouve du réconfort auprès de Claude Diot. À l'époque, il tient un magasin de puériculture à côté du sien et traverse la même galère. Ensemble, ils vivent douze ans en caravane, le temps de se reconstruire.
"S'il n'y avait pas eu une part de bon, on se serait certainement suicidés, relate aujourd'hui l'ancienne commerçante. Tous les deux, on avait des idées suicidaires."
Un engagement à temps plein
En 1994, le couple crée son association "En toute franchise", contre les abus de la grande distribution. Pour ces retraités, c'est un travail à temps plein.
"À peine réveillés, avant de lever nos draps, on se dit 'j'ai une lettre à faire !'", raconte Claude Diot. "Je fais 40000 km par an, à l'âge de 80 ans, pour aller voir les commerçants, suivre les procédures, me rendre dans les ministères..."
L’association "En toute franchise", qui compte aujourd’hui près de 1500 adhérents, se revendique apolitique. Sur 250 procédures engagées depuis trente ans dans toute la France, elle en a gagné cinquante : une sur cinq.
Le seul moyen aujourd'hui c'est d'aller en justice, il y a une chance sur deux de gagner. Mais si vous n'avez pas été en justice, vous avez tout perdu.
Claude Diot, vice-président de l'association "En toute franchise"
Le couple demande de l'aide à tous ceux qui le peuvent; pour pouvoir continuer son combat, notamment financièrement.
Avec 585 euros mensuels de retraite, Martine Donnette dépense sans compter son temps et son énergie, pour tricoter avec son mari des dossiers aux points serrés. Avoir maille à partir avec les puissants ne leur fait pas peur.