Il en rêvait... et ils les a trouvés. Corentin Esmieu, un jeune acompagnateur en montagne, a déniché des loups dans une vallée du Briançonnais. Il a suivi la meute durant 4 ans et en a ramené des milliers de clichés et d'heures de film...
Pour les partager, et parler à tous "de la réalité du loup".
Corentin Esmieu n'a que 25 ans, et il réalise déjà ses rêves.
Habitué depuis tout petit aux balades, en pleine nature avec sa famille, il a toujours été attiré par la faune sauvage. Et particulièrement par les loups.
"J'avais 17 ans lorsque j'ai vu mon premier loup", raconte-t-il. "Cela s'est déroulé pendant des vacances scolaires que je passais dans un alpage.
Ca a été une révélation pour moi. Cet instant m’a marqué à jamais. J’ai compris que c’étaient des rencontres comme celle-ci que je voulais provoquer dans ma vie ».Je l’avais guetté tous les jours, sans relâche. Ce n’est qu’une semaine avant la rentrée que je l’ai alors vu, mon premier loup.
Un loup "probablement identifié en Seine-Maritime", selon la préfecture, le premier depuis plus d'un sièclehttps://t.co/ONXPImDd08 pic.twitter.com/6y1IrXQZPu
— franceinfo (@franceinfo) April 17, 2020
Une idée qui ne le quittera plus. Quelques années plus tard, alors qu’il est devenu accompagnateur en moyenne montagne, il décide de partir à la recherche de loups. Il sait qu’ils sont là, pas si loin de lui…
Un "suivi inédit" de la meute
Ses pièges photo parlent en ce sens. Placés en plusieurs endroits, ils se déclenchent au moindre mouvement et lui permettent « d’avoir des yeux dans la forêt ».
Il découvre alors une meute constituée de quatre individus : deux adultes et un couple de jeunes adultes.
Durant des mois, Corentin se consacre alors à l'affût pour observer, photographier, filmer, se planquant dans des filets de camouflage, cherchant le bon vent pour éviter d'être repéré.
"La première année 2016 a été très dure. Je n'ai pu les observer qu'à deux reprises", raconte le photographe. "C'est désespérant sur le coup. Mais je me suis accroché".
Son obstination le récompense pleinement au bout de quatre ans avec une centaine d'observations faites sur la seule année 2019. Il obtient ainsi le "suivi inédit" d'une meute de loups.
"J'ai vu quasiment naître les louveteaux, ils avaient à peine un mois et demi lorsque je les ai découverts", poursuit le photographe.
Il a ainsi suivi l'évolution de leur meute. En 2016, l'un des jeunes s'est fait tuer par les lieutenants de louveterie (habilités à réaliser des prélèvements). Cela a provoqué leur dispersion.
Le couple dominant est resté uni et a fourni chaque année une portée de louveteaux. Il y en a eu deux, puis sept, puis quatre, souligne Corentin.
Sur quatre ans, j'ai vu disparaître la moitié des louveteaux. Quatre ont été écrasés par des voitures, d'autres ont été tués pour les prélévements. D'autres sont partis, peut-être vers l'Italie.
"Peur ? Non jamais"
Si le jeune homme a réussi à traquer son animal préféré, ce dernier l'a repéré également."Ils me connaissent par mon odeur c'est sûr. Mais ils m'ont vu aussi beaucoup de fois en montagne. Dès qu'ils me sentent, ils se sauvent. Ils n'ont jamais été menaçants. On ne voit cela que dans les mythes et les légendes. Je n'ai jamais eu peur. ".
S'approchent-ils des villages ?
On les a déjà vus à proximité des villages, toujours à la tombée de la nuit. L'hiver, ils suivent leurs proies qui se rapprochent aussi des habitations".
La meute repérée par Corentin occupe un territoire d'une quarantaine de kilomètres.
La "vérité d'une vie de loup"
A partir de ses milliers de photographies et ses dizaines d'heures de films, Corentin prévoit la sortie d'un ouvrage photographique, accompagné d'un documentaire.
Des images esthétiques, à la hauteur de son amour pour cet animal sauvage. La préface du livre sera signée par Jean-Michel Bertrand, l'auteur de "Marche avec les loups".
Le point de vue passionné du photographe n'est pas celui du berger qui voit en l'animal le prédateur de son troupeau.
S'il admet que les discussions avec ses amis éleveurs restent compliquées, le jeune photographe veut montrer une autre image du loup.
"Je souhaite montrer la vérité d'une vie de loup. Actuellement, sa réalité n'est pas de vivre, mais de survivre", rajoute-t-il avec émotion. "Un loup qui naît chez moi n'a même pas une espérance de vie d'un an...".
La meute, quant à elle, est encore forte de six individus, deux adultes et quatre jeunes.
Une famille à laquelle sans aucun doute, Corentin continuera à rendre visite... par affection.