A l’occasion du 17 mai, journée internationale de lutte contre l’homophobie et la transphobie, Rémy Rego, délégué pour la Région Sud de l’association Le Refuge, dresse un bilan contrasté de la situation. Entretien.
Selon le ministère de l’intérieur, le nombre de plaintes enregistrées pour injures et agressions homophobes ou transphobes a baissé de 15% en 2020 par rapport à l’année précédente.
Mais pour Rémy Rego, délégué pour la Région Sud de l’association Le Refuge, les violences sont toujours là et les lignes ne bougent pas assez vite du côté en matière de défense des droits des personnes LGBT.
- En quoi consiste Le Refuge ?
Le Refuge a été créé il y a 18 ans à Montpellier. Nous venons en aide à des jeunes de 14 à 25 ans rejetés par leur famille homophobes, transphobes ou biphobes.
Nous les accompagnons sur le plan socio-éducatif et juridique. Notre objectif : les aider à se reconstruire, retrouver confiance en eux, s’insérer dans la vie active et à terme, acquérir un hébergement autonome.
Le Refuge compte à ce jour 21 dispositifs d’accueil dans toute la France dont Marseille, Avignon et Nice.
Un tiers des jeunes accueillis dans nos structures sont demandeurs d’asile car persécutés de mort dans leur pays.
- Le confinement a-t-il pesé sur les dépôts de plaintes ?
Selon le ministère de l’intérieur, les plaintes pour violences anti-LGBT ont diminué de 15% en 2020 par rapport à l’année précédente.
Il faut contraster ces résultats. Cette diminution découle directement du contexte exceptionnel de la crise sanitaire et la fermeture prolongée de nombreux lieux sociaux. Même si les agressions anti-LGBT ont lieu partout, que ce soit au travail ou en famille, beaucoup d’entre elles sont perpétrées dans les espaces publics.
Avec les trois confinements successifs, les potentielles victimes de ce type de violences ont moins investi l'espace public et étaient donc moins exposées au risque. Donc bien évidemment, le confinement a pesé lourdement sur les dépôts de plaintes.
- Du fait du confinement, la fondation Le Refuge a-t-elle enregistré une hausse des violences intra-familiales ?
Oui, absolument. Au cours de l’année 2020, nous avons recueilli plus d’une soixantaine de jeunes en plus sur toute la France. Le Refuge a également enregistré un surcroît d’appels sur notre ligne d’urgence.
Le fait d’être confinés 24h/24h avec leur famille a attisé les tensions. Conséquence : beaucoup de jeunes ont été mis à la porte ou sont partis d’eux-mêmes parce qu’ils n’en pouvaient plus.
Les violences dont ils sont victimes le plus souvent au sein de leur famille, ce sont des insultes à répétitions, des menaces de mort proférées par l’un ou les deux parents ; certains sont aussi roués de coups, sans parler des thérapies de conversion.
Ces jeunes nous relatent des faits d’une gravité et d’une violence inouïe. Un tiers des ceux que nous accueillons sont demandeurs d’asile car persécutés de mort dans leur pays.
A ce jour, il faut savoir que 69 pays continuent de considérer l’homosexualité comme un crime.
- « PMA, pour toutes et pour tous », vous attendez encore beaucoup des avancées législatives ?
Le 7 Juin, la loi bioéthique sera examinée en séance à l’Assemblée nationale. L’ouverture de la PMA à toutes et tous et sa prise charge intégrale, c’est une vraie attente pour nous.
Après le PACS, le mariage pour tous, les lois avancent, les prises de conscience aussi, mais ce n’est pas suffisant.
Malgré une libéralisation de la parole, et de plus en plus de personnes qui osent affirmer leur orientation sexuelle, nous ne voyons pas de diminution réelle d’actes homophobes ou transphobes.
- Comment lutter de façon efficace et pérenne contre toutes formes de discriminations ?
Pour lutter contre l’homophobie et la transphobie, les associations LGBT ont plus que jamais besoin de plus de moyens humains et financiers pour poursuivre les campagnes d’affichages et les interventions en milieu scolaire.
Il est primordial de continuer à sensibiliser les jeunes générations, les amener à réfléchir aux conséquences que peuvent avoir des propos homophobes ou transphobes.
Aujourd’hui, un jeune homosexuel a 13 fois plus de risque de tenter de mettre fin à ses jours qu’un jeune hétérosexuel. Plus encore, un jeune transgenre sur deux fait une tentative de suicide. Un phénomène souvent lié au secret, "psychologiquement épuisant", qu'ils maintiennent sur leur vie privée.