Les protections hygiéniques seront gratuites dans les universités dès la prochaine rentrée. La ministre de l'Enseignement supérieur, Frédérique Vidal, l'a annoncé ce mardi 23 février. Le vice-président à la vie des campus à Aix-Marseille Université, Jean-Louis Moro livre un avis nuancé.
Comment lutter contre la précarité menstruelle ? Emmanuel Macron a évoqué cette épineuse question en décembre 2020. C'est désormais officiel : les protections périodiques seront gratuites pour toutes les étudiantes à la rentrée prochaine.
La ministre de l'Enseignement supérieur, Frédérique Vidal, l'a annoncé ce mardi 23 février. 1.500 distributeurs doivent être installés "dans les prochaines semaines", dans "les résidences universitaires des Crous". Cette décision s'inscrit dans le cadre de la lutte contre la précarité des jeunes.
Pour Jean-Louis Moro, vice-président à la vie des campus à Aix-Marseille Université, cette mesure est "une très bonne nouvelle" même si aucune ligne budgétaire n'a été prévue par le gouvernement. Il déplore que le financement des distributeurs reste à la charge des universités.
- Comment la direction de l'Université Aix-Marseille envisage l'installation de distributeurs de protections hygiéniques dans les facultés ?
"Ces distributeurs doivent être facilement accessibles, mais ils doivent aussi être installés dans des endroits discrets de façon à respecter l'intimité de chaque étudiante. Pour cela, nous allons nous concerter avec les associations étudiantes et les services du patrimoine pour déterminer ensemble les endroits opportuns où les installer.
Cette nouvelle mesure va dans le bon sens en matière de lutte contre la précarité étudiante mais pas seulement. Elle permet aussi de réduire cette inégalité entre les garçons et les filles qui "doivent payer" pour leur hygiène intime.
Une quarantaine de distributeurs devraient être installés sur les 56 sites que compte l'Université Aix-Marseille. Quoiqu'il en soit, nous adapterons le nombre de distributeurs aux besoins des étudiantes. Le bon chiffre sera celui qui répondra à leur demande".
- Avec la gratuité des protections périodiques, ne craignez-vous pas que les distributeurs soient rapidement dévalisés ?
"Actuellement, l'expérience de l'aide alimentaire auprès des étudiants en très grande difficultés démontre qu'il n'y a pas d'abus phénoménaux.
Il n'y a donc pas de raison qu'il y ait des excès sur les protections périodiques. Le maître mot doit rester "la bienveillance" donc faisons confiance plutôt que de mettre des gardes-fous en permanence".
- Les travaux de concertations auprès d’associations vous ont-ils amené à constater que les achats des protections "pesaient lourd" dans le budget d’une étudiante boursière ?
"Au regard du nombre d'étudiants qui viennent chercher un colis alimentaire, je peux vous dire qu'il y aurait environ 2.000 étudiantes en grande précarité sur l'Université Aix-Marseille. Quant à savoir combien représentent les achats des protections hygiéniques dans le budget d'une étudiante boursière, je n'ai pas ces données-là.
Aujourd'hui, nous sommes très inquiets qu'un certain nombre de nos étudiants se retrouvent à la rue. Nos étudiants n'ont pas d'argent, nous avons peur de les perdre. Pas une semaine ne passe sans que l'on nous prévienne qu'un étudiant risque de se retrouver à la rue parce qu'il n'a plus de quoi payer son loyer".
- La gratuité des protections périodiques s'ajoute aux mesures prises en janvier en faveur des étudiants durement touchés par la crise sanitaire, est-ce suffisant pour lutter contre la précarité des jeunes ?
"D'un point de vue déontologique, ces actions sont éminemment respectables même si l'on déplore quelques maladresses dans le domaine d'application. Le gouvernement doit faire des ajustements et établir une ligne budgétaire pour que les choses se fassent en bonne et due forme.
Bien sûr, il reste encore fort à faire pour lutter contre la précarité étudiante. Notre préoccupation actuelle à l'Université Aix-Marseille reste le logement. Nous travaillons d'arrache-pied, main dans la main, avec le Crous, les municipalités et le rectorat pour qu'aucun étudiant ne se retrouve à la rue".