Décédée il y a 6 ans, dans le crash d'hélicoptère de l'émission Dropped, la navigatrice Florence Arthaud "renaît" au travers d'un livre. "Océane", c'est le titre de son manuscrit, retrouvé par hasard en Bretagne. Hubert Arthaud, son frère, revient avec émotion sur cet ouvrage publié ce 17 mars.
Un destin hors normes voilà ce qui caractérise la navigatrice, Florence Arthaud.
C'est la première femme à avoir remporté la Route du Rhum en 1990. "La petite fiancée de l’Atlantique", telle qu'elle était surnommée, décède en 2015 dans un accident d’hélicoptère en Argentine. Une fin tragique aux côtés des sportifs Camille Muffat et Alexis Vastine, lors du tournage de l'émission Dropped.
Aujourd'hui, elle repose sur l'île Sainte-Marguerite au large de Cannes :
Six ans plus tard, un livre posthume écrit par la navigatrice vient d'être publié aux Editions Arthaud :
« Au fil des pages se dévoile une jeune femme en quête de sens, toujours prête à laver ses doutes dans les tempêtes. » « Océane », les mémoires de Florence Arthaud, sont dans le @leJDD et en librairie mercredi ➡ https://t.co/RYxnBLE2zL pic.twitter.com/xWug5KL4Ey
— Éditions Arthaud (@EditionsArthaud) March 15, 2021
Il y a 32 ans, elle écrivait ce livre : "Océane", il est retrouvé par hasard en 2018 dans un carton en Bretagne.
La force de la mer m’a souvent impressionnée, mais elle ne m’a jamais fait peur. Sa tendresse m’émeut encore tous les jours. J’ai l’impression qu’elle fait tout pour me rendre heureuse,
Son frère, Hubert Arthaud qui réside à Antibes, nous livre au lendemain de la publication de l'ouvrage, son témoignage.
Le livre coécrit en 1989, par votre soeur et le journaliste Patrick Le Roux, est retrouvé par Patrick Maé. Vous connaissiez l'existence de cet ouvrage ?
A l’époque, je savais que Florence avait écrit ce livre en collaboration avec Patrick Le Roux. Il devait être publié par les éditions Filipacchi, mais ma soeur s’est ravisée pour ne pas froisser la mémoire de notre famille, éditeur pour la maison Arthaud. Le manuscrit est finalement tombé dans l’oubli. Sincèrement, la mémoire c’est fascinant, je ne m’en souvenais pas jusqu’à qu’on m’en reparle. La mort de ma soeur a été très dure, certains souvenirs ont donc pris la place sur d’autres.
En 2018, Patrick Maé (nldr : ancien directeur de Paris Match qui avait hérité du livre) m’a appelé. Il m’a dit : « écoute Hubert, cette année, à Vannes, nous inaugurons un giratoire Florence Arthaud et j’ai aussi retrouvé son livre, il est totalement prêt à être édité.» Ma première réaction, ça a été de me dire quelle drôle d’idée de renommer un giratoire par le nom de ma soeur, elle était douée en navigation mais en voiture qu'est-ce qu'elle était nulle (rire). Ensuite, le manuscrit est arrivé entre mes mains et tout s'est enchaîné jusqu'à sa publication.
De quoi parle ce livre ?
Il parle de cet amour de la mer mais aussi de son lien intime avec sa mère. Elles se disaient tout. On sent qu'avec le père il y avait une quête de reconnaissance. Lorsqu'on était jeune et qu'on allait sur la plage sur la côte, notre mère disait : "je n'ai jamais voulu avoir des enfants qui arrivent à la plage les bras ballants a 11h."
Chez nous, dès 7h du matin on faisait du ski nautique et on avait des dériveurs, on faisait des petites régates aux Issandres. A l'époque, mon frère Jean-Marie et ma soeur Florence étaient les seuls à sortir quand il y avait du vent force 8 ou 9. On voyait leurs bateaux qui défilaient à toute a allure, la passion est née grâce à nos parents. C'est une aventure avant tout familiale, une éducation tournée vers la nature, le sport et l'authenticité.
On retrouve aussi la sensibilité de Florence dans son livre. En parallèle, c'est son vécu en mer qui guide la narration. Tous ces marins, quittent le monde des Terriens avec tout ce qu’on vous a appris, la notion du bonheur, la société de consommation, le superflu. Etre en mer c'est se confronter à un élément pur et vrai. Pour ma soeur, c'est le moyen d'atteindre notre "moi profond."
Retrouver l'essentiel, ce n'est pas un peu ce qu'on a tous essayé de rechercher pour surmonter la crise sanitaire que nous traversons ?
Oui dans un sens, ce livre envoie un vrai message. La mer, elle est dure mais c'est aussi une école de la vie et une quête de simplicité. En ce moment, on parle beaucoup de la dépression, de la dureté du quotidien, il y a deux poids deux mesures. Pour moi, on est dans un monde assisté, en mer votre seule assurance c’est vous et de comprendre les éléments.
En mer, il n'y a pas de faux héros, les règles ne sont pas faussées.
A titre personnel, quel sentiment avez-vous ressenti lorsque vous avez lu ce livre ?
Ce n'était pas facile pour moi, j’ai dû m'y reprendre à plusieurs reprises, c'est le seul livre sur sa vie avec toute sa sensibilité. Jai été replongé dans les souvenirs, le caractère de ma soeur, c'était touchant. J'y ai retrouvé son idéalisme sur beaucoup de choses, j'ai vraiment compris que la mer c'était son exutoire face à la dureté de ce qu'elle pouvait ressentir.
Ce que Florence aimait le plus, dans le fond, c’était d'être "seule" pour aller au fond d’elle-même. On a passé de bons moments avec elle en mer et ce besoin de solitude c’est un coté que j’avais sous-évalué, je ne voyais pas que c'était déterminent pour elle. Même si nous avons vécu des choses extraordinaire tous ensemble sur l'Atlantique.
Pourquoi avoir voulu le publier ? Pour rendre hommage à votre soeur ?
Moi, c’est la mémoire de ma soeur qui m'importe, je ne vais pas toucher un seul centime sur ce livre, tout sera donné à sa fille Marie. C'est une façon de lui rendre hommage et pour le grand public de comprendre ce que peut ressentir un marin. Une femme, de 55 kilos, née à Paris, Comment se retrouve-t-elle au milieu de l’Atlantique dans des conditions énormes ?
Je voulais rendre hommage à cette force qu'elle avait en elle. Comment peut-on arriver à un tel dépassement de soi ? Ce livre peut-être une réponse.
Même si vous ne qualifiez pas votre soeur de militante, elle était pionnière dans beaucoup de domaines, est-ce-que ce livre a une vocation inspirante, notamment pour les femmes ?
Elle a fait rêver les femmes, mais Florence ne se revendiquait pas comme féministe, Florence faisait partie des gens qui agissaient par passion et non pas pour avoir un écho médiatique ou social sur ses exploits. Elle est passée par des phases très difficiles, elle ne mangeait pas tous les jours à sa faim mais elle a refusé le confort pour sa destinée et sa passion, dans un sens oui ça peut inspirer, mais les femmes comme les hommes.
Peut-on s'attendre à d'autres surprises ?
A ma connaissance, ça sera la dernière, Florence parle suffisamment bien d’elle-même dans son livre. C'est un roman vraiment authentique. Il mêle la passion et l'acharnement. Je remercie Patrick Maé qui est a la base de la récupération de ce livre, et Patrick Le Roux pour avoir si bien compris Florence.
Je suis très touché et très content d'avoir pu publier ce livre.