"Son sexe est moitié garçon, moitié fille" : leur bébé a besoin d'être opéré, un texte sur le genre bloque tout

Andrea, un bébé de trois mois, souffre d'hypospadias, une malformation du sexe. Ses parents ne peuvent pas le faire opérer à cause de l'arrêté du 15 novembre 2022 : l'enfant doit être consentant.

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Andrea est un bébé de trois mois qui souffre d'une malformation. Son urètre se trouve en dessous de ses testicules et il a un micropénis. Il souffre d'hypospadias. Ses parents aimeraient le faire opérer mais ils font face à un arrêté du 15 novembre 2022. Impossible de pratiquer une chirurgie sans le consentement de l'enfant. Or, c'est un bébé. Et attendre engendrerait plus de souffrances d'après Jérémy, le père d'Andrea.

Un enfant sur 300 touchés

L'histoire d'Andrea a commencé dans le ventre de sa mère, Mélanie. Les médecins lui annoncent qu'elle attend une fille. Puis Mélanie tombe malade et doit procéder à une amniocentèse pour vérifier que tout va bien. Les médecins constatent alors une discordance entre l'échographie et le caryotype du fœtus. Il a le chromosome XY, c'est donc un garçon mais sa croissance est faible.

On a été redirigés vers cinq hôpitaux différents et une douzaine de médecins pendant la grossesse jusqu'à ce qu'un échographe pose le diagnostic de l'hypospadias.

Jérémy, association "hypospadias, mon fils ma bataille"

France 3 Provence-Alpes

Le père d'Andrea, Jérémy, précise qu'ils ont dû attendre que le bébé urine dans le ventre de sa mère pour voir d'où l'urine provenait et pouvoir déceler cette malformation. L'hypospadias touche un enfant sur 300 mais elle peut prendre des formes totalement différentes d'un bébé à l'autre, avec des niveaux de gravité variables.

Andrea souffre de l'une des formes les plus graves. "Son sexe ressemble à moitié à celui d'un garçon, à moitié à celui d'une fille, mais il est garçon à 100%", développe Jérémy. À la naissance, Andrea a été soumis à différents tests. Ses taux de testostérone et d'AMH sont ceux d'un garçon de son âge. "Ses hormones, ses chromosomes et son physique sont masculins" souligne Jérémy. Après analyses, les professionnels de la santé ont expliqué aux parents que la cause n'était pas génétique. "On nous a dit que c'était souvent lié à l'environnement : les perturbateurs endocriniens, les usines, les pesticides...", rapporte Jérémy. Originaire de la Haute-Marne, le couple s'est installé dans le Vaucluse juste avant la naissance de leur fils.

Que dit la loi ?

Concrètement, ces parents aimeraient faire opérer leur bébé. Il s'agirait de "prendre la peau du prépuce et reconstruire l'urètre qui n'est pas placé au bon endroit en plus d'obtenir des hormones de croissance pour faire croître son organe génital", détaille Jérémy. Une opération qui était possible avant 2022.

Mais l'arrêté du 15 novembre 2022 fixant les règles de bonnes pratiques de prise en charge des enfants présentant des variations du développement génital, empêche cette chirurgie. Il précise : "l'enfant participe à la prise de décision selon son degré de maturité. Son consentement à l'acte médical et au traitement doit être systématiquement recherché s'il est apte à exprimer sa volonté et à participer à la décision". Jérémy et Mélanie doivent donc attendre que leur enfant soit en âge d'exprimer sa volonté afin qu'il participe à cette décision.

Une étude explique que 40% des personnes qui souffrent de cette malformation et se font opérer à l'âge adulte développent des problèmes psychologiques par la suite. J'ai moi-même discuté avec un homme de 30 ans opéré adulte et qui a developpé une dépression.

Jérémy, co-fondateur de l'association "hypospadias, mon fils ma bataille"

France 3 Provence-Alpes

Or, pour Jérémy, attendre présente des risques : "psychologiques, sociaux, identitaires, de harcèlement à l'école". "Mon médecin m'a dit qu'il y avait un risque que les tissus ne se réparent pas et qu'il connaisse des infections récidivantes si on opère après 18 mois", assure le père d'Andrea. Juridiquement, un arrêté n'est pas une loi. Il n'y a donc aucune interdiction. Mais la recommandation de ne pas intervenir sans l'accord de l'enfant est largement respectée par les experts lors des RCP (les réunions de concertation pluridisciplinaires), à qui revient le pouvoir de décision, d'après Jérémy.

Un combat apolitique

Pour tenter de se faire entendre, Jérémy a co-fondé l'association "hypospadias, mon fils ma bataille". Il récolte des témoignages, aide des familles dans son cas et demande un soutien financier. Il a publié une cagnotte en ligne dans le but de récolter des fonds pour porter son combat en justice. "L'avocat me demande 1 500 euros juste pour étudier le dossier", précise Jérémy. Il recherche également des cas de bébés opérés avant cet arrêté de novembre 2022 afin de tenter de faire jurisprudence.

Le but est de pouvoir faire avancer les choses tout en gardant cet arrêté, on laisse le droit aux personnes de choisir mais pour nos enfants qui sont nés avec un genre déterminé, c'est notre rôle de les aider.

Jérémy, association "hypospadias, mon fils ma bataille"

France 3 Provence-Alpes

Toutefois, il tient à préciser que son combat est apolitique. "On ne veut absolument pas annuler cet arrêté parce qu'on comprend le combat des personnes qui se sentent enfermées dans leur corps mais je ne comprends pas pourquoi ils ont englobé nos enfants", tient à détailler Jérémy. Il demande un ajout à cet arrêté, intégrant la situation de ces bébés. Il souhaite inclure cet alinéa : "les enfants atteints d’hypospadias ne relèvent pas des dispositions relatives au changement de sexe ou à la reconnaissance des personnes non genrées."L'hypospadias n’est pas une question d’identité. C’est une malformation congénitale", argumente Jérémy.

Jérémy a contacté la députée de son département de Vaucluse, Marie-France Lorho (RN). Il espère obtenir gain de cause.

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