Onze démissions dans le District grand Vaucluse de football, y compris le vice-président, c'est tout un symbole. Ces départs sont motivés par une mauvaise gestion et des pratiques douteuses.
Fortes turbulences au sein du comité directeur du District Grand Vaucluse de football. Cette instance départementale du foot amateur tangue dangereusement depuis dix jours.
Deux membres de la Commission de Discipline dénoncent de graves dysfonctionnements. Le directeur administratif, par exemple, assiste et participe aux délibérés de la Commission disciplinaire.
"On a essayé avec le président de faire en sorte que cela s'arrête. Mais le directeur administratif, avec l'appui du président du District de grand Vaucluse, est resté au sein de notre commission, il a participé aux délibérés" relate Chaib Kinnous, ancien membre de la Commission de Discipline et juriste de formation "Le directeur administratif est un salarié et ne peut pas être membre de l'organe disciplinaire."
"Par ma formation de juriste et surtout d'arbitre, qui est respectée dans le district parce que j'attaque ma 17ème saison, je suis un peu connu et reconnu au sein des clubs. On m'a dit notamment "par ta formation de juriste, tu pourrais aider la Commission de Discipline à mieux fonctionner".
Le problème, c'est que j'ai mis le doigt là où ça fait mal. J'ai un peu remué le cocotier.
Chaib Kinnous
"A un moment donné, j'ai dû enregistrer le directeur administratif en train de nous faire changer une décision de la Commission de Discipline", explique Chaib Kinnous,"dans l'enregistrement, on voit le directeur administratif faire une plaidoirie importante et venir faire changer notre décision qui a été prise à l'unanimité de ne pas sanctionner un arbitre."
Ce membre a été exclu de la Commission de Discipline.
Philippe Pascal a été Président de la Commission de Discipline du District Grand Vaucluse. Pendant deux ans, il essaie en vain d'écarter le directeur administratif des commissions. En juillet 2022, il s'aperçoit que son nom est noté sur une réunion à laquelle il n'a pas assisté "Cette réunion a servi aux gens de l'AC Avignon, qui est le plus gros club avignonnais, qui est géré de façon pas claire du tout, avec des problèmes financiers etc."
"Moi je me suis insurgé, j'ai eu beaucoup de doutes et j'ai fait une enquête personnelle. Et je me suis rendu compte que l'ancien président avait été condamné sur la base d'un faux rapport d'instruction, que son affaire avait été classée sans suite par le procureur mais on m'avait caché ce classement sans suite." L'ancien président étant opposé à la direction actuelle du football régional et national, il a été exclu pour cette raison, selon Philippe Pascal, qui envoie un rapport de 17 pages au procureur de la République pour porter plainte.
Une deuxième enquête révèle des problèmes de carte bancaire, de frais. Un exemple "On va voir la ligue des champions, on reste deux-trois jours et tout ça, c'est aux frais de la princesse," dénonce Philippe Pascal.
Je sais qu'il y a eu plein de dépenses somptuaires et si j'ai porté plainte c'est pour que le procureur lise ma plainte et envoie la police pour faire une perquisition parce que sans perquisition on y arrivera jamais.
Philippe Pascal
"Malheureusement, on n'est pas pris au sérieux dans le football ", se désole l'ancien président de la Commission de Discipline du district grand Vaucluse, "mais c'est dommage parce qu'il y a des malversations énormes. Il faut que la justice fasse son travail, moi j'ai fait le mien.
"Tout le monde se bat pour être président de la ligue (paca) ou du district parce que tous les deux mois mois, on sait que va aller voir des matches de ligue des champions au stade de France ou au Vélodrome. et tout ça aux frais de la princesse. On va avoir de bons repas, de bons gueuletons dans les meilleurs restaurants. Et donc on se bat pour être président de ligue pour ça et pas pour servir les clubs de foot amateur de la région."
Le président du district grand Vaucluse, Michel Serre, réagit à ces accusations. "Sur les cartes bancaires, je n'ai absolument rien à me reprocher.
Je suis droit dans mes baskets
Michel serre
"J'ai la tête droite car je ne m'en suis quasiment jamais servi. J'ai été élu, j'assurerai mon mandat sérieusement, comme je l'ai toujours fait. Par contre, si les clubs venaient à me demander de démissionner, bien sûr, je le ferai.
François Ponthieu a une longue expérience des instances dirigeantes du football. Pour lui, les démissions du district du Vaucluse sont liées à une mauvaise gouvernance au niveau régional.
"Quand on est président, on touche 60.000 euros par an de la fédération, c'est à dire 5000 euros par mois. Et on touche ensuite des frais de représentation qui n'apparaissent même pas dans les comptes de la ligue, en tout cas de façon claire et sans aucune transparence. Et bien il ne faut pas s'étonner qu'on ait envie de conserver son poste. On fait tout pour conserver son poste même au détriment de ces districts. Et ça que je reproche aujourd'hui à la ligue de Méditerranée," dénonce l'avocat et ancien président du district du Vaucluse entre 1997 et 2009.
Dans les Bouches-du-Rhône, la situation n'est pas plus saine. Onze plaintes ont été déposées au sein du district Provence football pour harcèlement moral et propos homophobes.
L'inspection du travail enquête, la police aussi.
Dans le Vaucluse, les prochaines élections étaient prévues en juin 2024. Elles seront anticipées à une date encore inconnue.
Officiellement, le rôle de ces instances peut se résumer ainsi : servir le foot amateur.
