VERIFICATION. Covid 19 : Jean Castex a-t-il raison de dire que les accidents de ski risquent de saturer les hôpitaux ?

Le Premier ministre avait justifié leur fermeture en expliquant qu'il craignait un afflux de touristes propice à la diffusion du virus et une saturation des lits hospitaliers liés aux accidents de ski. 

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La douche froide. Le Conseil d'Etat a confirmé, vendredi 11 décembre, la fermeture des remontées mécaniques à Noël dans les stations de ski. Six régions, dont Provence-Alpes Côte d'Azur, avait saisi l'instance juridique pour casser cette décision du gouvernement destinée à lutter contre l'épidémie de Covid-19. Le 26 novembre, Jean Castex avait annoncé que les domaines alpins seraient ouverts mais pas les remontées mécaniques.

Dans le collimateur du Premier ministre, le risque de voir des rassemblements de touristes propices à la diffusion du virus mais aussi le skieur alpin et les accidents de ski qui risquent, selon lui, de saturer les services hospitaliers déjà sous tension. Un argument que contestent les acteurs de la montagne, qui ont lancé une pétition en ligne. Pour y voir plus clair, France 3 s'est penché sur ce dossier.

Le ski alpin très accidentogène 

L'arrivée des skieurs sur les pistes s'accompagne chaque saison d'une activité intense pour les secours en montagne. Selon l'observatoire d'accidentologie des sports d'hiver de Médecins de Montagne, 143 112 skieurs ont été blessés au cours de la saison 2018-2019 (année de référence la saison 2019-2020 ayant été écourtée par la crise sanitaire). Dans le détails, 76% ont eu un accident en ski alpin, 23% en snowboard.

En ski akpin, plus de la moitié des traumatismes concernent la jambe (54 %), le plus souvent il s'agit d'une entorse au genou (37%). Les fractures qui nécessitent une évacuation vers un hôpital ne représentent en revanche que 2 % des cas. Viennent ensuite les lésions de l'épaule (15%). Les traumatismes crâniens représentent eux 3% des blessés.

Plus du quart des blessures à la tête, dont les traumatismes crâniens, sont dûes à des collisions, qui représentent 10 % des accidents sur les pistes. Médecin de Montagne note que de nombreux accidents interviennent sur les pistes bleues réservées aux débutants. Ces derniers sont deux fois plus exposés aux accidents notamment dans les quatre premiers jours de pratique.

Peu d'hospitalisation

Si le ski alpin est une activité à risque, les blessés ne finissent pas tous aux urgences. Toujours selon Médecin de Montagne, 95,6 % des blessés sont soignés en cabinet en station. Ces derniers sont équipés notament en radiographie pour traiter la plupart des traumatismes qui se présentent. Seuls 4,4 % des blessés sont redirigés vers les urgences d'un hôpital local. Il n'est pas précisé quelle est la part des blessés hospitalisés après leur prise en charge et ni celle des admissions en réanimation.

"Certes, les accidents de traumatologie que nous traitons sont en grande majorité liés à la pratique du ski alpin ou du snowboard. Mais 95% des cas qui passent par nos cabinets de médecins de montagne n'ont pas besoin d'être hospitalisés, confirme au Figaro Suzanne Mirtain, médecin au Val Cenis en Savoie et présidente de l'association des médecins de montagne. Nous savons remettre une épaule, réduire une fracture, poser un plâtre… Et les 5 % restants, qui seront hospitalisés, ne passent pas tous en réanimation, heureusement." 

Très émue par le désarroi des professionnels du secteur touristique, elle comprend toutefois "qu'il ne faille pas surcharger les hôpitaux de la région, tant qu'ils ne donnent pas leur feu vert. C'est vrai qu'ils ont été très touchés par la deuxième vague. Tous les établissements de la vallée ont été sollicités pour accueillir des patients Covid. Or les touristes représentent une part importante de leur activité en hiver."

Dans une tribune publiée par le Figaro, professionnels des sports d'hiver et élus des régions concernées, avaient demandé à ce que les décisions soient prises mi-décembre en fonction de l'évolution de la situation. Ils soulignent que "les hôpitaux locaux sont le plus souvent un point de passage pour orienter les patients vers leur destination d'origine et il est extrêmement rare que les services de réanimation soient sollicités".

Moins de skieurs cette saison

Le syndicat professionnel Domaines skiables estime qu'en raison du Covid et d'une baisse importante de la clientèle étrangère, la fréquentation des stations à Noël va chuter de 40%. Et ce sera selon lui autant de potentiels blessés en moins.

Reste que l'épidémie de Covid-19 ne touche pas tous les départements de la même façon. La Haute Savoie, par exemple est plus touché et ses services de réanimation plus encombrés. Entre les Alpes du Nord et du Sud, la situation des lits hospitaliers n'est pas la même. En région Auvergne-Rhône-Alpes, les services sont saturés : 5  094 malades du Covid sont actuellement hospitalisés, dont 552 en réanimation, soins intensifs ou unités de surveillance continus. 

>> INFOGRAPHIES. Covid 19 : nombre de morts, incidence, places en réanimation... Suivez l'évolution de l'épidémie en Paca

En ce qui concerne Provence-Alpes Côte d'Azur, la situation est nettement moins tendue. Le bilan de l'ARS Paca du 9 décembre rapporte 881 hospitalisations Covid en cours, dont 325 en réanimation (-15 par rapport à la semaine précédentye). Le taux d'occupation de lits par des patients Covid est de 67,7%. Et au-delà de l'accidentologie liée aux sports d'hiver, de nombreux épidémiologistes redoutent les rassemblements de personnes dans les stations de ski propices à la propagation du virus.

Une clause de revoyure le 11 décembre

Les présidents de région de montagne avaient obtenu une réévaluation de la situation le 11 décembre. Mais le Premier ministre, Jean Castex, s'exprime cejeudi à 18 heures. Il annoncera notamment si le processus de déconfinement se poursuit comme prévu avec une nouvelle étape le 15 décembre. A 15 jours de Noël, les chiffres ne sont pas bons et pourraient entraîner un maintien des restrictions.



Emmanuel Macron a fixé l'objectif autour de 5.000 nouveaux cas de Covid-19 par jour. Or, plus de 14 595 cas positifs ont été enregistrés en France mercredi, selon les chiffres officiels. Si Jean Castex annonce que les mesures restrictives de confinement sont maintenues, on imagine mal comment Matignon pourrait lâcher du lest dans les stations de ski pour Noël.

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