Ce mercredi 25 novembre est la Journée internationale pour l'élimination des violences à l'égard des femmes. Une sensibilisation nécessaire contre les agressions physiques, les viols, les féminicides mais aussi contre les brutalités d'ordre psychologique dont le cyber-harcèlement fait partie.
Elle s'étonne de ne pas en recevoir beaucoup mais lorsqu'un commentaire insultant apparaît sur ses réseaux sociaux, la députée Alexandra Valetta-Ardisson ne l'oublie pas :
« Pendant la campagne des municipales, j’ai soutenu le maire LR sortant de Menton et ses opposants ont fait des remarques déplacées en insinuant qu'il avait sa main dans ma culotte ».
Dans son téléphone, elle conserve les screens des messages sexistes publiés sur sa page Facebook lui prêtant des relations avec des élus masculins ou critiquant son décolleté.
L'élue LREM de la 4ème circonscription des Alpes-Maritimes ne comprend pas pourquoi elle devrait faire profil bas et accepter ces remarques que les hommes ne subissent pas.
Le cyber-harcèlement en hausse
Et elle n'est pas la seule à devoir se confronter aux propos sexistes voire même au cyber-harcèlement. Ces tentatives d'intimidation sur les réseaux sociaux sont le quotidien de nombreuses femmes dites publiques.Qu'elles soient représentantes politiques, journalistes, comédiennes, youtubeuses, influenceuses... Peu importe. Être une femme et prendre la parole dans ses espaces s'est immanquablement faire face à la violence sexiste.
D'ailleurs, ce phénomène ne concerne pas seulement celles qui sont connues, identifiées. Dans son rapport « En finir avec l’impunité des violences faites aux femmes en ligne : une urgence pour les victimes » publié en 2018, le Haut Conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes (HCEfh) conclut que 73% des femmes déclarent en être victimes, et pour 18% d’entre elles sous une forme grave.
Et le confinement n'a rien arrangé. Le cyber-harcèlement et les propos haineux sur internet ont fortement augmenté comme l'a noté e-Enfance : les adolescents, contraints de rester à domicile, ont passé plus de temps sur leur téléphone et la plateforme d'écoute de l'association a enregistré une augmentation de 30% des sollicitations.
Une situation alarmante car le harcèlement scolaire pousse des élèves au suicide chaque année.
Les élèves sont équipés d'#outilsnumériques par les établissements scolaires. Intégrons dans ces outils, l’application #NetEcoute 0800 200 000 #ProtectionMineurs contre les #cyberviolences #GrandeCauseNationale. Votez sur @Make_org #partenariat @eenfance?https://t.co/jMBFnjdL5Z pic.twitter.com/7ZhbXtnuZg
— e-Enfance/Net Ecoute (@eenfance) November 18, 2020
C'est la raison pour laquelle le cyber-harcèlement fait partie des infractions condamnées par l'ONU en cette Journée internationale contre les violences faites aux femmes, avec les féminicides, les violences conjugales, les agressions sexuelles, le harcèlement de rue, les mariages forcés, l'exploitation sexuelle entre autres...
Les failles des plateformes
Le problème du cyber-harcèlement et, plus globalement, des propos haineux sur internet est qu'aucune plateforme n'a trouvé de solution pour l'empêcher ou du moins le limiter.Alors pour ces deux femmes politiques élues dans les Alpes-Maritimes, la stratégie est la même : ignorer et bloquer le compte, souvent anonyme sur Twitter, lorsque les propos tombent sous le coup de la loi. Aucune n'a porté plainte, pour l'instant.« On se rend compte vraiment de l'ampleur de cette haine sur Twitter. C'est un réseau défouloir, sans filtres. Il faudrait des centaines de salariés pour réguler tous les tweets »
« On s'y habitue » concède tristement Marine Brenier. Au point parfois de changer de comportement comme sa consœur, Alexandra, de la circonscription voisine qui hésite maintenant avant de poster une photo en robe : « les premières critiques m'ont rendue malade ».
La loi ne permet pas encore de protéger les victimes. La proposition déposée par la députée Laetitia Avia, vivement critiquée par les juristes, visait à renforcer la contribution des opérateurs numériques mais de nombreuses dispositions ont été censurées par Le Conseil constitutionnel estimant qu'elles portaient atteinte à la liberté d'expression.
Bodyguard, le succès d'une appli gratuite
Félicitations à @Bodyguard_intl qui remporte cette 6ème édition du @FundTruck ! ? #LaPoste avec #Frenchiot est fière d'être partenaire de ce beau concours de pitch #entrepreneurial. Rendez-vous l'année prochaine pour de nouveaux pitchs?#Fundtruck #LaPosteSEngage pic.twitter.com/wHCwOX5Aez
— Le Groupe La Poste (@GroupeLaPoste) November 19, 2020
C'est face à ce vide juridique et aux failles des plateformes que l'autodidacte Charles Cohen, âgé 25 ans, a décidé de créer l'application gratuite Bodyguard en 2018. Elle vient de remporter la finale nationale du FundTruck 2020.
Bodyguard est disponible gratuitement sur Android et Apple. Il est possible d'y connecter chacun de ses comptes sur les réseaux sociaux, de personnaliser le niveau de filtrage des commentaires « à partir de sa propre sensibilité » et ensuite l'application supprime et bloque le contenu violent. Les commentaires vous concernant sont analysés par l'application toutes les 20 secondes.« Au départ c'était un vrai challenge technologique, aujourd'hui on compte 55 000 utilisateurs et on veut s'étendre à d'autres pays »
« Les réseaux sociaux ne peuvent pas faire de l'analyse contextuelle mais nous oui », précise le Niçois, « on peut distinguer une insulte contre vous et un propos virulent mais général ».
Pendant le premier confinement, le nombre de contenus haineux gérés par la page a augmenté de 56%. Concernant les femmes, le bodyshaming et le harcèlement sexuel sont les comportement les plus fréquents.
La plateforme a décide de collaborer avec Stream'Her, une communauté de gammeuses, pour affiner son algorithme de tri des messages misogynes. L'objectif reste le même : empêcher le cyber-harcèlement des femmes pour éviter qu'elles ne se censurent. Une éducation au numérique semble essentielle pour cela.