SEVESO : des sites à risques

Des milliers de Français vivent à quelques mètres seulement de 1312 sites classés Seveso. Des centaines de personnes y travaillent. Ces sites sont et restent potentiellement extrêmement dangereux.

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31 morts, 2500 blessés. Voici le bilan, l'explosion de l'usine AZF à Toulouse le 21 Septembre 2001. C'est la plus grave catastrophe industrielle en France depuis la fin de la seconde guerre mondiale. Plus récemment, le 26 septembre 2019, l'incendie de l'usine Lubrizol à Rouen a aussi contribué à réveiller les craintes en matière de risque industriel. Et des dizaines de questions restent sans réponses. Quels enseignements a-t-on tiré des drames du passé ? Comment la situation des zones à risques a-t-elle évolué ? Comment les riverains de ces sites ont-ils appris à cohabiter avec le risque majeur et pourquoi la plupart n'envisagent toujours pas de déménager ? Quels impacts sur leur santé physique et psychologique ?

 



Où sont ces sites à risques ?

En France, 1 312 établissements sont classés Seveso parce qu’ils sont susceptibles de connaître des explosions, des incendies, des fuites de substances toxiques dans l’air, dans l’eau. Ce chiffre représente environ 10% des sites Seveso en Europe ; mais, plus que leur nombre, ce sont surtout leurs activités qui sont importantes pour notre économie.

CARTE. Risque industriel : à combien de kilomètres êtes-vous d'un site Seveso ?

Prenons la chimie : avec 400 ateliers Seveso dans l’hexagone, ce secteur recense à lui seul, un tiers des sites à risques français. Et la chimie, c’est stratégique. D’abord, parce qu’elle fournit tous les autres domaines : la construction, la mécanique, la pharmacie. Ensuite, parce que nos produits et matériaux chimiques se vendent très bien à l’étranger, mieux que nos voitures, ou nos avions. L’année dernière, nos exportations dans ce domaine ont rapporté plus de 10 milliards d’euros au pays.

Les autres secteurs où il y a des sites Seveso sont l’électricité, le gaz, le pétrole, les raffineries. On y pense moins, mais il y a aussi plus de 200 sites Seveso dans le transport, et la logistique ; on en trouve aussi beaucoup dans l’agroalimentaire, la fabrication de boissons, la pharmacie, l’électronique. Bref, c’est très large. Par ailleurs, toutes les régions françaises ont des sites Seveso y compris les territoires d’Outre-mer. Il existe une vingtaine d’usines Seveso en Guyane, huit en Martinique, six à La Réunion ? La région qui en concentre le plus reste Rhône-Alpes-Auvergne avec le "couloir de la chimie".
 

Etrangement, le nombre précis de salariés dans les usines Seveso n'est pas connu. C’est une donnée quasi « secret défense ». Mais on estime que ces sites font vivre des millions de personnes : les salariés directs, mais aussi les intérimaires, les sous-traitants. Dans certaines communes, l’usine Seveso, est souvent le principal employeur. Autour de Marseille, à Fos-sur-mer ou à Martigues. Cette petite ville de moins de 50 000 habitants, regroupe à elle seule presque une quinzaine d’établissements Seveso appartenant à Total, Primagaz ou Ineos Autre exemple, au Nord, dans les Hauts-de-France, il y a 165 sites et c’est une vraie source de richesse pour cette région marquée par le chômage.       


>>>Risque industriel : où sont les régions dangereuses ?

Après l’incendie de l’usine Lubrizol à Rouen les inspecteurs des risques industriels travaillèrent avec les enquêteurs judiciaires et les gendarmes pour comprendre les raisons de la catastrophe.

Aujourd’hui, plus de 1 500 inspecteurs en France contrôles les 1 312 sites Seveso ‘seuil bas’ et ‘seuil haut’ comme l'usine Lubrizol. En outre, ils doivent aussi avoir un regard sur près de 500 000 installations classées pour l’environnement (ICPE). Cela concerne les carrières, les décharges, les incinérateurs, mais aussi les stations-services ou les parcs éoliens.

Plusieurs régimes de contrôles

Evidemment avec autant d'installations, impossible pour ces inspecteurs de passer chaque année sur les sites. Pour les petites installations, les moins dangereuses comme les stations-service, leur travail a été simplifié avec un dossier d’enregistrement. Pour d'autres, il faut une autorisation plus contraignante et les inspecteurs des directions régionales de l'environnement, de l'aménagement et du logement (Dreal) accompagnent l'industriel dans son projet.

De plus en plus de missions sont confiées par les industriels à des cabinets agréés. Les inspecteurs doivent leur dire quelles études d'impact ils doivent mener, quels rejets ils peuvent avoir dans l'environnement. Ensuite, ils autorisent ou non le site à fonctionner et ils viennent le contrôler tous les trois à sept ans en fonction des risques. Enfin, pour les plus dangereux comme les sites Seveso seuil haut, avec de nombreux produits chimiques sur le site, il leur faut la liste complète des substances et que l'industriel participe aux plans de prévention des risques.
Les inspecteurs peuvent procéder à des contrôles inopinés ou pas sur site. Et ordonner des travaux ou des fermetures d’usine ; cela se fait sous l’autorité du préfet, surtout quand il y a beaucoup d’emplois en jeu.

 


Lubrizol a été inspecté 39 fois en 5 ans

Depuis l’accident de 2013 où un gaz avait dégagé une forte odeur d’œuf pourri pendant des semaines, les inspecteurs sont venus 39 fois sur le site de Lubrizol à Rouen, dont les dirigeants ont a investi plusieurs milliers d'euros dans la sécurité. Aujourd’hui, beaucoup d'agents sont mobilisés par la cellule de crise et l’enquête, alors qu'il y a 75 sites Seveso en Seine-Maritime pour une cinquantaine d’agents.
De leur côté, les syndicats des agents publics s’inquiètent des nouvelle baisses d’effectifs au ministère de l’Environnement dont ils dépendent. Même si la prévention des risques a été plutôt épargnée jusqu’ici, elle perd de nouveaux des postes depuis deux ans, environ une vingtaine sur l'ensemble de la France.

Pour eux, l'exemple à suivre c'est celui de l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN), qui a 500 agents pour contrôler 19 centrales et quelques dizaines de sites industriels, mais surtout avec une réelle indépendance vis-à-vis des préfets.

Un changement de législation depuis les accidents

Il y a plusieurs dizaines d'années, ces usines étaient excentrées des villes. Mais les agglomérations en se développant ont grignoté les zones périphériques. "Depuis un accident de Seveso en Italie, une directive européenne a obligé les États et les collectivités locales à pratiquement geler l'urbanisation dans des périmètres de proximité de ces sites-là", explique le député LREM, Yves Blein. Ces usines représentent un vivier important d'emplois pour les régions.

Le gouvernement a fait évoluer de façon importante la réglementation relative aux sites à risques, qu’il s’agisse des réglementations sectorielles (silos, sites pyrotechniques, stations-service, stockages d’engrais….) ou des réglementations transverses (protection contre la foudre, les séismes…).
 


Une meilleure information et association des riverains et salariés 
Les structures de concertation et d’information ont été profondément rénovées. Ainsi, des commissions de suivi de site (CSS, ex-CLIC), impliquant les riverains et associations, ont été créées par la loi autour de tous les sites Seveso seuil haut.
Elle a en outre renforcé les dispositions relatives à l’information, l’implication et la sécurité des salariés via le comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT).

Un dispositif assurantiel permettant une indemnisation rapide et complète des dommages aux habitations et aux véhicules des particuliers en cas de catastrophe technologique a été mis en place, ainsi qu’un fonds d’indemnisation des victimes de catastrophes technologiques, de façon assez similaire à ce qui existe pour les catastrophes naturelles.

Enfin, l’enrichissement de la base de données ARIA sur le recensement des accidents industriels. La base ARIA a été développée par le ministère chargé de l’écologie afin de recenser les incidents et accidents industriels. 40 000 événements en France et dans le monde y sont détaillés. Un argus des accidents technologiques, des synthèses sectorielles et des analyses du retour d’expérience sont par ailleurs publiés. 




Pour en savoir plus, regardez la bande annonce : 
RÉSEAU D’ENQUÊTES : VIVRE SOUS LA MENACE SEVESO
Mercredi 23 septembre à 23.15

 
 

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