Le 24 novembre dernier, 27 exilés périssent au large de Calais. Des morts qui viennent s'ajouter à une longue liste d'accidents tragiques. La CFDT des Hauts-de-France interpelle Emmanuel Macron dans une lettre ouverte, alors que la France va prendre la présidence de l'Union Européenne.
Jeudi 3 octobre 2013 : 366 migrants clandestins périssent dans un naufrage près de Lampedusa. Mercredi 24 novembre 2021, ce sont 27 exilés qui se noient dans le naufrage d’une embarcation précaire au large de Calais. Entre ces 2 dates, selon la CFDT des Hauts-de-France, 23 000 personnes sont mortes ou disparues. Toutes fuyaient leur pays dans l’espoir d’un avenir meilleur pour eux et pour leurs enfants.
Dignité humaine, droits de l'homme, liberté, solidarité et démocratie, c'est au nom de ces valeurs que l'union régionale Hauts-de-France du syndicat adresse aujourd'hui une lettre ouverte. Emmanuel Macron, Jean Castex, Xavier Bertrand, les préfets de Région et tous les parlementaires sont les destinataires du courrier, dont l'enjeu dépasse la situation spécifique de Calais.
Parler d'immigration autrement
Pour la centrale de Laurent Berger, "les images chocs et les politiques inadaptées entretiennent le fantasme d'une migration incontrôlable et surtout ingérable". Elles sont le terreau des extrêmes qui entretiennent "des propos haineux, xénophobes et d'incitation à la haine raciale, privant ainsi les Français d'une parole raisonnée et des débats sereins qu'ils méritent".
La CFDT des Hauts-de-France invite donc à parler de l'immigration avec pour objectifs de :
- repenser l'accueil des demandeurs d'asile et résorber les campements insalubres,
- mettre en place un droit bâti sur des règles éthiques,
- rappeler qu'il est illusoire de mettre des murs et barbelés autour de nos territoires,
- se préoccuper de ceux qui vivent et travaillent au plus près des questions migratoires (habitants, policiers, agents des préfectures, travailleurs sociaux, enseignants, salariés, associations).
Une prise de position qui intervient à l'évidence dans le contexte de la campagne présidentielle. Michel Crépin, le secrétaire général CFDT Hauts-de-France, estime que parler d'immigration "cela ne doit pas se réduire à des propos nauséabonds de campagne électorale avec des candidat.e.s qui instrumentalisent la question migratoire pour agiter des peurs irraisonnées".
Le temps est venu pour la CFDT de réaffirmer ses valeurs et de prendre la parole, de remettre les questions d'humanisme et de solidarité au cœur de son action revendicative.
Michel CrépinSecrétaire général CFDT Hauts-de-France
Peser sur la Présidence Française de l'Union Européenne
Alors qu'Emmanuel Macron va prendre pour 6 mois la présidence de l'Union Européenne au premier semestre 2022, la CFDT Hauts-de-France s'associe à la démarche de la Confédération Européenne des Syndicats pour exhorter le chef de l'Etat et les 27 Etats membre de l'UE à construire "une véritable politique commune sur l'immigration et à engager une harmonisation des règles de reconnaissance du statut de réfugié". Il est temps, poursuit la lettre ouverte, d'élaborer "un véritable système d'asile européen". La France doit peser en ce sens auprès de ses partenaires et surtout des responsables politiques de Grande-Bretagne.
La CFDT appelle très clairement au "développement de voies légales d'accès au Royaume-Uni, en concertation avec les autorités britanniques". La centrale demande également l'activation de la clause humanitaire Dublin, qui peut permettre aux personnes de demander une protection sur le territoire français plutôt que de risquer une traversée au péril de leur vie.
Travailler main dans la main avec les associations
L'initiative prise par la CFDT des Hauts-de-France ne se veut pas une démarche isolée. Pas question pour son secrétaire général de faire cavalier seul, au contraire. Dès le début d'année, il invite les militant.e.s du syndicat à aller à la rencontre des associations de terrain. Celles qui sont au plus près des migrants sur le territoire. Objectif : identifier les besoins et déterminer comment l'organisation peut aider.
Depuis 2008, l’Auberge des Migrants intervient auprès des exilés dans le Calaisis et le Nord de la France, en apportant aide matérielle et alimentaire, accompagnement et défense des droits. Son Président, François Guennoc, salue la démarche du syndicat. "La CFDT n'est peut-être pas sur le terrain mais ce qu'elle décrit est conforme à la réalité. Si les exilés étaient mieux accueillis en Europe, il y aurait moins de monde ici à Calais."
Le responsable associatif rejoint également la CFDT dans son analyse : "Si on veut résoudre la crise migratoire ici, il faut que la Grande-Bretagne accepte de rouvrir des voies légales. La prise de position de la CFDT est globalement intéressante car elle prend aussi du recul par rapport à la situation de Calais et globalise la question".
Face au drame des migrants, la CFDT des Hauts-de-France pose simplement la question : encore combien de temps avant d'agir ? En attendant les actions des décideurs qu'elle interpelle dans sa lettre ouverte, le syndicat invite ses adhérent.e.s à placer les fêtes de fin d’année sous le signe de la solidarité et de la fraternité.