"J'ai pensé aux moments galères, aux gens que j'aime", Jean-Baptiste Grange après son sacre aux Mondiaux de ski

Après des années de galères marquées par des pépins physiques en tous genres, le Savoyard Jean-Baptiste Grange a reconquis à 30 ans l'or mondial à Beaver Creek, quatre ans après son premier titre, un deuxième sacre inattendu, récompensant tant son talent que sa persévérance.

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Sur le podium, alors que résonne la Marseillaise, "JiBé" a longtemps gardé les yeux fermés: "J'ai pensé aux moments galères, aux gens que j'aime. J'avais les larmes aux yeux", a-t-il avoué.

Les galères, ce fils de deux anciens membres de l'équipe de France de ski établis dans le village de Valloire (Savoie) les a accumulées depuis son sacre mondial à Garmisch-Partenkirchen (Allemagne) en 2011. Un titre qui aurait pu très bien rester sans lendemain, tant son corps l'a trahi à plusieurs reprises. Avant même l'or de 2011, il avait déjà connu une grosse désillusion. En décembre 2009, sur la "Birds of prey" de Beaver Creek - ironie de l'histoire - une rupture du ligament croisé antérieur du genou droit lui barre la route des JO-2010 de Vancouver.

Son corps refait ensuite des siennes avec une blessure à l'épaule gauche, qui gâche sa saison 2010-11 mais ne l'empêche pas d'enchaîner un doublé royal en slalom Kitzbühel-Schladming et de se parer d'or en Bavière deux semaines plus tard.

Au fond du trou

La saison suivante, c'est son dos qui se rappelle à lui: enfant, ce dos avait failli le priver à tout jamais du ski, à cause de deux hernies discales.
Et pour finir, conséquence indirecte de ce mal de dos, son genou droit cède de nouveau en fin de saison 2012. "Ce qui était lourd, c'était l'enchaînement des blessures. Après ma deuxième au genou, j'étais au fond du trou", rappelle le désormais triple médaillé mondial (bronze en 2007, or en 2011 et 2015).

Pourtant, ce passionné de chasse et de trial, vainqueur de la Coupe du monde de slalom en 2009, n'a jamais songé à raccrocher, invoquant "la passion du ski et de la compétition". Et aussi le soutien de son copain Julien Lizeroux, revenu lui aussi d'une grave blessure à un genou pour participer aux Mondiaux-2015 à 34 ans.
"Il a connu ce que j'ai connu, même en pire. On est revenu ensemble sur les skis pour arriver jusqu'ici. On sait tout le travail qu'il y a derrière, on a des caractères différents et on se complète", explique, à propos de Grange, le Plagnard vice-champion du monde de slalom et de super-combiné en 2009, en larmes dans l'aire d'arrivée au Colorado. "C'est une très belle histoire. Il est récompensé pour son travail. C'est beau!", renchérit David Chastan, chef du groupe technique tricolore.

Pour sa première saison sans pépin physique l'hiver dernier, Grange revient dans le Top-7 mondial. A Sotchi (Russie) pour les JO-2014, il pointe en cinquième position après la première manche, mais abandonne dans la seconde, la faute à un tracé tortueux.

Alternant le bon (quatre fois dans les dix premiers) et le moins bon cette saison, il arrive aux États-Unis en plein doute avec, de son propre aveu, "une claque" reçue à Kitzbühel (21e) et à Schladming (26e).

1.500 jours d'attente

"Je skiais bien, mais en course je n'y arrivais plus. Je commençais à me dire que je n'étais plus capable d'aller chercher une médaille", explique-t-il. Jusqu'à dimanche, où il se retrouve cinquième après la première manche du slalom. Contrairement à Sotchi, il tient en seconde et réalise la manche idéale sous une forte neige. Rien ni personne, pas même l'Autrichien Marcel Hirscher, tenant du titre et déjà paré d'or à deux reprises à Beaver Creek, ne peut le priver de ce titre en forme de rédemption.

Reportage Tout le Sport

Après presque 1.500 jours d'attente, il renoue avec la victoire le jour le plus important de la saison: "Cela a été très long, mais je n'ai jamais perdu patience, parce que c'est ce que j'aime faire".

"JiBé", qui sait trop bien que tout est fragile dans le ski de haut niveau, n'a pas trop envie de penser à l'avenir : "J'ai envie de profiter de ce titre!". Les Jeux de Pyeongchang dans trois ans constituent toutefois une belle perspective pour le seul titre manquant à son impressionnante carrière.
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