Paul George vient de lancer Debout!, un site Internet recueillant les témoignages anonymes de personnes harcelées. Fraîchement bachelier, ce jeune homme qui a connu le harcèlement veut aider ceux et celles qui le subissent.
"En grandissant, tu deviens plus renfermé sur les harcèlements que tu subis. Tu n'oses pas en parler parce que tu te demandes si on ne va pas traiter de balance, de tapette, etc... Tu passeras pour une victime. Dans les deux cas, tu passes pour une victime". Le site n'a que quelques jours, mais dessus s'égrènent déjà plusieurs témoignages comme celui-ci.
On y trouve de la tristesse, de la souffrance, un peu de noirceur humaine et parfois, souvent même, de l'espoir. Car si le harcèlement est un calvaire pour celui ou celle qui le subit, on peut aussi en sortir. C'est le cas de Paul George, un jeune Viennois de 18 ans qui a passé son bac il y a deux mois. En juillet, il a passé trois semaines à créer son propre site Internet, Debout, pour sensibiliser au harcèlement scolaire ou au cyber-harcèlement, mais aussi à l'automutilation, fréquente chez les jeunes harcelés.
Un engagement mûrement réfléchi
Ce harcèlement, il l'a d'abord connu au collège en raison de sa petite taille. "Ca part d'une connerie, on me faisait des petites moqueries par rapport à ma taille, se rappelle-t-il. Au début, ça passait et au bout d’un moment, il y a eu une accumulation et ça passait plus, j'ai commencé à me morfondre là-dessus, ça m'a touché, quoi …"Mais la véritable prise de conscience est venue au lycée lorsqu'une de ses amies a tenté de mettre fin à ses jours. "C’est quelque chose qui m’a vraiment touché, et je me suis dit que dès que j'aurais le temps de faire quelque chose à ce sujet j'allais m'y mettre".
Reportage d'Anne Hédiard et Dominique Bourget.
Car le harcèlement tue: en 2013, le jeune Matteo s'était suicidé à Bourg-Saint-Maurice. Ses parents avaient alors créé l'association "Les Parents - veille éducative" en se mobilisant contre le harcèlement.
L'objectif de Paul George, c'est de créer une plateforme sécurisante pour les victimes de harcèlement, un espace de discussion semblable à un sanctuaire. Et de sensibiliser aux conséquences de ce que de nombreux enfants et adolescents considèrent comme un jeu. Pour son frère Titouan, le site a été bénéfique: "le site de mon frère m'a fait ouvrir les yeux sur ça, parce que je me dis que c'est vraiment très courant et qu'il y en a de partout". Un jeune sur dix serait victime de harcèlement à l'école.
Avez-vous idée de ce que c'est d'aller au collège la boule au ventre, l'envie de courir à toute jambes" Lettre d'une ancienne victime à ses harceleuses
Dans un message intitulé "Lettre à mes Harceleurs", une ancienne victime révèle à ses harceleuses la portée de leurs actes. "Avez-vous idée de ce que c'est d'aller au collège la boule au ventre, l'envie de courir à toute jambes ? écrit-elle. L'envie de fuir, pour ne pas mourir à petit feu ? La boule au ventre, presque l'envie de vomir ? J'avais vraiment peur de vous, de vos regards et de vos mots". Elle y détaille même l'instant où elle a failli se suicider, avant de trouver dans l'écriture un échappatoire.
L'une de ses harceleuses lui a répondu dans un autre message: "Je ne pensais pas que l'on était méchantes à ce point la, je n'ai jamais imaginé que ce que l'on faisait pouvait être aussi dur et méchant. Nous, je pense qu'on le faisait surtout pour rire et ce n'était pas pour te faire du mal ou pour te voir partir, et malheureusement pendant 2 ans on t'a fait subir ça apparemment..."
Le site ne compte actuellement que cinq pages, mais a déjà du succès. "En deux jours j'étais à 500 pages visitées et 200 visiteurs uniques, ce qui est déjà pas mal pour un petit projet qui a pas beaucoup de visibilité parce là j’ai vraiment utilisé que Facebook…" Surtout, l'initiative a déjà été repérée. Un hébergeur a proposé au jeune homme de construire un site plus conséquent, où pourront s'ajouter d'autres témoignages ainsi qu'un forum de discussion.
Le 3020, un numéro d'appel gratuit
Le gouvernement s'investit également dans la lutte contre le harcèlement à l'école et sur Internet à travers la plateforme Non au harcèlement à destination des victimes, témoins, parents et professionnels.Un numéro d'appel gratuit, ouvert du lundi au vendredi de 9h à 18h. a également été mis en place au 3020.
