La Cour de cassation a annulé mercredi une interdiction d'exercer prononcée en juin dernier par la cour d'appel de Grenoble à l'encontre de Bernard Ripert, ancien avocat de l'organisation armée d'extrême gauche Action Directe, dans le cadre de poursuites disciplinaires.
Me Ripert a obtenu l'annulation pure et simple de cette sanction qui portait sur trois ans, dont un avec sursis. Le tonitruant avocat à la barbe blanche, âgé de 66 ans, était poursuivi pour divers manquements.
Il se voyait notamment reprocher d'avoir lancé à un président de cour d'assises en mars 2015, lors d'un procès, qu'il était "préférable de connaître le code (pénal) avant l'audience que de le découvrir pendant ou après". Dans un courrier adressé à un directeur de maison d'arrêt, l'avocat avait aussi demandé au fonctionnaire s'il se croyait "en 1942 avec son surveillant minable".
Il lui était également reproché de ne pas avoir respecté de précédentes sanctions disciplinaires (trois depuis 2009). Alors qu'il était déjà sous le coup d'une interdiction d'exercer d'un an, Me Ripert avait voulu défendre des clients devant deux cours d'assises. Il avait alors invoqué l'article 275 du Code de procédure pénale qui permet à un accusé de se faire défendre par un ami aux assises.
D'abord relaxé par le conseil régional de discipline des avocats le 11 mai 2016, le conseil grenoblois avait été condamné en appel, le 23 juin 2016, à une nouvelle interdiction d'exercer, décision contre laquelle il avait formé un pourvoi.
Dans un arrêt rendu mercredi, la Cour de cassation a jugé que l'appel du procureur général de Grenoble contre sa relaxe n'avait pas été régulièrement déposé.
Lors de l'audience en appel, qui avait duré 25 heures sur deux jours, Bernard Ripert avait reçu le soutien d'une cinquantaine de ses confrères en robe et autant de manifestants étaient présents devant le palais de justice.
Quelques semaines auparavant, fin mai 2016, son interpellation à son domicile, suivie d'une brève mesure d'internement d'office, avait suscité un vif émoi dans la profession.
Actuellement "en congé à l'étranger" selon son cabinet, Me Ripert n'a pas pu être joint par l'AFP mercredi.
Les magistrats de la cour d'appel de Grenoble "prennent acte" de cette décision de la Cour de cassation qui porte sur la "procédure" et "n'aborde pas le fond des débats", selon le premier président de la cour d'appel, Jean-François Beynel, qui avait présidé l'audience-marathon de juin dernier.
Rappelant leur "attachement à la loyauté et à la relation confiante entre magistrats et avocats", ils "seront vigilants sur le respect de ces règles nécessaires au fonctionnement démocratique de la justice, au seul service des citoyens".
Plusieurs affaires dans lesquelles Me Ripert était désigné avant sa suspension pourraient être audiencées au TGI de Grenoble.
De son côté, le bâtonnier de Grenoble, Wilfried Samba-Sambeligue, a estimé que "l'objectif est de revenir aujourd'hui à l'apaisement dans le respect réciproque des fonctions de chacun. On y a intérêt".
"On ne peut pas préjuger de difficultés à venir", a-t-il ajouté, soulignant que "depuis le mois de juin, il n'y a eu aucun problème ou incident" entre robes noires et rouges et que contrairement à ce qui peut se dire "on n'a pas plus de couacs qu'ailleurs en France".