Un temps suspects dans l'enquête sur l'assassinat du préfet Erignac, en 1998, deux nationalistes corses ont déposé plainte cette semaine en visant l'ancien patron de la police antiterroriste Roger Marion, qu'ils accusent d'avoir fabriqué de fausses preuves, a-t-on appris vendredi de leur avocat.
En creux, la plainte contre X pour faux en écriture publique et dénonciation calomnieuse déposée à Paris vise aussi l'enquête sur la "piste agricole", suivie au début de la traque des assassins du préfet. Les soupçons des enquêteurs dans les milieux du syndicalisme nationaliste agricole corse avaient conduit à de nombreuses mises en examen et incarcérations.
Après l'arrestation en 1999 du commando, objet d'une procédure distincte ayant abouti à plusieurs condamnations, l'information judiciaire initiale est restée ouverte et n'a été clôturée qu'en mars 2014.
Selon une source judiciaire, il appartient maintenant au parquet de Paris de prendre ses réquisitions, avant une décision des juges d'instruction dans ce dossier où 32 personnes sont restées mises en examen, dont quatre sont décédées.
"On a l'impression un peu désagréable d'un dossier pénal ouvert et permanent qui sert à alimenter au fil des besoins les enquêtes à venir", avait estimé en novembre 2007 Dominique Coujard, le président de la cour d'assises qui jugeait Yvan Colonna. Ce dernier a été condamné à la perpétuité pour l'assassinat du préfet.
Roger Marion a déjà réfuté ces accusations par le passé
Dans leur plainte, Dominique-Mathieu Filidori, un nationaliste de la première heure, et Gérard Serpentini, tous deux mis en examen en 1998, soulèvent des accusations déjà portées contre Roger Marion, alors patron de la Division nationale antiterroriste (DNAT).Lors du troisième procès contre Yvan Colonna, en 2011, un témoin avait affirmé à la barre que Roger Marion et un responsable des renseignements généraux l'avaient obligé à déposer sur le domaine agricole de Dominique-Mathieu Filidori des explosifs finalement retrouvés lors d'une perquisition en septembre 1998.
Ces accusations, également apparues dans un livre en 2006 ("Place Beauvau La face cachée de la police") avaient été réfutées par Roger Marion, selon qui une enquête de l'Inspection générale de la police nationale (IGPN) avait été classée sans suite.
La qualification de faux en écriture publique vise un procès-verbal et un rapport dressés à l'époque par le chef de la DNAT. Selon l'avocat des plaignants, Me Emmanuel Mercinier-Pantalacci, si les faits remontent à seize ans, le délai de prescription est interrompu notamment par l'ouverture de l'enquête de l'IGPN en 2006.