L’Office des Transports de la Corse (OTC) a publié ce lundi, « une consultation sur le périmètre du service public de transport maritime entre la Corse et le continent ». Toute personne intéressée pourra transmettre son avis à l’OTC avant le 15 décembre au soir.
Dans cette consultation de l’Office des Transports de la Corse que l’on peut lire ici, on comprend que le principe d’une Délégation de Service Public (DSP) assortie d’une subvention, comme aujourd’hui, n’est pas une obligation (page 34 et suivantes de la consultation). Le document envisage trois hypothèses :
une DSP, des OSP (Obligations de Service Public) sans subventions, un système mixte -DSP/OSP- selon les lignes
Cette nouvelle donne soulève un certain nombre d’interrogations, alors même que le nom du repreneur de la SNCM devrait être connu le vendredi 20 Novembre devant le tribunal de commerce de Marseille.
Si à l’issue de la consultation lancée par l’OTC, le principe de la DSP est rejeté -entièrement ou partiellement- le plan social et le projet économique des repreneurs seront revus à la baisse.
La situation actuelle
.Les lignes entre la Corse et les ports de Toulon et de Nice sont assurées sous le régime des OSP. Toute compagnie intéressée par une de ces lignes peut naviguer à condition de remplir un minimum de conditions (un minimum de rotations selon les saisons). Ces obligations ne sont plus assorties de subventions depuis 2013.Précédemment, durant 12 ans, un système de subventions nommé « aide sociale » a été attribué aux compagnies qui naviguaient vers Toulon et Nice. Sous cet ancien régime, deux compagnies assuraient le trafic : la SNCM et la Corsica Ferries France (CFF).
Depuis l’automne 2014, seule la CFF assure ces liaisons.
.Sur les lignes Marseille-Corse, le service est assuré sous l’égide d’une DSP, assortie de subventions. Il s’agit d’un service de cargos mixtes (fret et passagers).
Deux compagnies assurent le contrat signé avec l’OTC : la SNCM et La Méridionale (CMN). Les deux opérateurs reçoivent une subvention annuelle : 56 Millions€ pour la SNCM (4 cargos) et 40 Millions€ pour la CMN (3 cargos).
D’autres compagnies ont le droit de naviguer sur ces lignes, sans subventions, aucun opérateur ne s’est jamais présenté dans cette configuration.
Le contrat de DSP aurait du durer dix ans.
Une DSP devenue provisoire
Suite à un recours de CFF, l’actuelle DSP a été annulée en Avril 2015 par le Tribunal Administratif (TA) de Bastia. La décision est exécutoire le 1er Octobre 2016. En attendant, la DSP actuelle se poursuit dans les conditions et avec les montants de subventions prévus.Mais tout cela se déroule dans un contexte où l’un des deux opérateurs -la SNCM- se trouve en redressement judiciaire. On connaitra, peut-être, le nom d’un repreneur le 20 Novembre.
Ce repreneur devrait assurer le service dans sa configuration actuelle, avec subventions, jusqu’au premier Octobre 2016.
A cette date on devrait connaitre à quoi ressemblera le futur service qui aura été défini par l’assemblée de Corse.
Trois choix possibles
.Des OSP généralisées :Sur toutes les lignes entre la Corse et le continent français, des obligations minimales sont définies. Les compagnies intéressées naviguent sur les lignes qu’elles choisissent. Personne n’a de subventions.
.Une DSP sur toutes les lignes Marseille-Corse :
S’il on applique les règlements européens à la lettre, l’OTC doit constater qu’aucun opérateur ne peut assurer un service sans subventions.
L’OTC lance un appel d’offres européen, ligne par ligne. Le ou les vainqueurs assurent le service de cargos mixte entre Marseille et la Corse pour une durée de huit ans. Le contrat est assorti d’Obligations lourdes (type de navires, capacités, calendrier…) et comprend des subventions.
Les autres lignes (Toulon et Nice) restent sous le régime des OSP.
.Un système mixte :
Il comprend des OSP sur certaines lignes, là où un ou des opérateurs estiment pouvoir naviguer sans subventions.
On trouve également des lignes desservies sous contrat de DSP, avec subventions, là où aucune compagnie n’est intéressée par le régime des OSP pour cause de « non rentabilité ».
Des conséquences différentes
-Si le système de DSP sur Marseille est retenu, il ressemblera -globalement- à la situation actuelle. Le montant des subventions pourrait être, cependant, revu à la baisse.-Si l’assemblée de Corse choisi un système mixte, le repreneur de la SNCM devra revoir son plan d’entreprise (business plan).
S’il on prend le scénario d’une seule ligne avec OSP et les autres avec OSP, les professionnels du monde maritime estiment que le repreneur de la SNCM devra supprimer une centaine d’emplois supplémentaires.
Dans l’hypothèse de deux lignes avec OSP, on approcherait la suppression de 250 emplois.
-Dans le cas d’OSP généralisées, le coût social sera élevé Il n’est même pas sur qu’un repreneur soit encore intéressé par la reprise de la SNCM dans ces conditions.
Un choix lourd de conséquences
En cas de DSP la future SNCM n’est pas assurée d’emporter les lignes où elle serait candidate. Mais une chose est sure, sans DSP il n’est pas sur qu’il existe encore une SNCM en 2016.Le 16 Juillet dernier l’assemblée de Corse avait adopté le principe d’une DSP. On peut lire, ici, le courrier du Pdt de l’Exécutif de Corse envoyé à un opérateur candidat à la reprise de la SNCM. Le Président Paul Giacobbi rappelle que l’assemblée a adopté « (…) le recours à la procédure de Délégation de Service Public ».
L’Exécutif peut-il changer d’avis ? Les termes de la consultation publique (voir plus haut) laisse la porte ouverte à des « OSP généralisée ».
Une chose est sure, on ne connaitra pas le contenu du futur service avant le 20 Novembre. A cette date, on devrait connaitre le nom du repreneur choisi par le tribunal de Marseille sur… le contenu de son plan de reprise. Seulement voila ces plans risquent d’être caduques, car ils sont bâtis sur un scénario « entièrement sous DSP ».
Les organisations syndicales (à l’exception du STC) ne s’y sont pas trompées. Elles ont déposé un préavis de grève pour le 21 Novembre. Elles estiment notamment, qu’il faut attendre de connaitre le contenu du service avant de désigner un repreneur de la SNCM.
Le silence de l’État
L’État est toujours un actionnaire majeur de la SNCM, avec Transdev.Le 6 Novembre dernier, des représentants de l’État de la Collectivité Territoriale de Corse (CTC) ont rencontré les autorités en charge de la concurrence auprès de la Commission Européenne (UE).
Depuis cette date c’est le silence radio du coté de l’État comme du coté de la CTC, sur la rencontre de Bruxelles.
Ces hypothèses « d’OSP généralisées » ou bien de « système mixte », avec leurs conséquences économiques et sociales, sont elles la réponse aux indications de l’UE ou bien vont-elles au delà des recommandations de la Commission ?
Dans un communiqué publié le 17 novembre, la CTC estime que "le cap définit par l'Assemblée de Corse est connu depuis juillet dernier et c'est (...) le choix de la DSP qui a été adopté".